L'Organisation
des pays producteurs de pétrole, l'OPEP, joue pratiquement sa crédibilité,
sinon son pouvoir de stabilisation des forces du marché pétrolier, à la réunion
(informelle) prévue fin septembre à Alger, en marge du 15ème forum
international de l'énergie. Experts et courtiers digèrent actuellement les
déclarations, parfois contradictoires, sur les intentions de certains pays
membres de l'Organisation et, surtout, leur plan de bataille qu'ils comptent
défendre à la réunion d'Alger. Les choses se sont considérablement compliquées
et l'objectif d'un gel, sinon d'une réduction de la production OPEP durant
cette rencontre, est rendu encore plus difficile par les déclarations de
certains ministres du pétrole, à contresens des attentes du marché et des pays
producteurs. Il y a d'abord cette déclaration ambiguë du ministre saoudien du
pétrole qui a douché les marchés et certains pays Opep,
dont l'économie est aux abois, qui voudraient bien un peu de répit dans cette
lente chute des prix. Riyad est, comme qui dirait, devenu un vrai caméléon :
après avoir déclaré au début du mois d'août que la réunion d'Alger est capable
d'arriver à un accord sur le gel des prix, son ministre du pétrole refroidit
les espoirs en estimant qu'il ne croit plus « qu'une intervention importante
soit nécessaire. Je ne préconise certainement pas une baisse » de production,
même s'il a souligné que « nous écouterons nos collègues ; ce qu'ils ont à
proposer ». A moins d'un mois de cette tant attendue
rencontre d'Alger, les premières salves du conflit politique entre Riyad et
Téhéran sont tirées et le marché se recroqueville sur lui-même, prêt à repartir
à la baisse. Car si Riyad lance à qui veut l'entendre qu'il ne fera rien pour
favoriser un gel de la production, Téhéran, de son côté, fait monter les
enchères en réclamant le recouvrement de sa production d'avant les sanctions
internationales, c'est-à-dire les quelque 8 MB/J d'avant 2012. La porte d'une
autre déconvenue, d'une autre guerre intra muros au
sein de l'Opep est en train de faire fondre comme
peau de chagrin les espoirs que les marchés fondent sur un accord, même aux
forceps, pour au moins un gel de la production des pays producteurs à la
réunion d'Alger. Les «déclamations» de l'Iran et de l'Arabie saoudite
n'arrangent bien sûr pas la situation. Bien au contraire, ces tiraillements ne
font que porter préjudice à l'Opep, si tant est
qu'elle reste une organisation unie, avec des objectifs clairs à défendre. Les
positions de certains pays membres, ajoutées aux anciennes et nouvelles
rivalités politiques, ne sont pas pour jeter des ponts solides ouvrant la voie
vers une sorte de ?'gentelmen agreement'' qui
consoliderait le poids de l'Organisation sur le marché pétrolier mondial.
L'Iran a dit ?'coopérer'' avec l'OPEP pour améliorer les prix du pétrole et la
situation sur le marché. Riyad a dit le contraire, c'est-à-dire qu'il ne fera
rien pour aider à un gel de la production et que, de toute façon, cela ne servira
à rien. Il y a sur le marché une offre abondante que le ralentissement de
l'économie mondiale ne peut éponger. Faut-il dès lors envisager, en septembre
prochain à Alger, le début d'une autre guerre au sein de l'Opep,
ou tout simplement son lent et inexorable éclatement ? « Si la réunion de
septembre se conclut sans accord de gel de production, non seulement la
crédibilité du cartel va prendre un coup, mais aussi les prix du pétrole se
retrouveraient à la merci de lourdes pertes », prédisent les analystes de
marché. A moins que certains pays ne veulent saborder la réunion d'Alger.