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Pour
son président, Amara Zitouni, le Conseil national de
la concurrence (CNC) «évolue dans un environnement institutionnel hostile».
Outre des conditions de travail ne répondant pas aux normes, notamment en ce
qui concerne le nombre de personnes composant le CNC, et un siège adéquat, son
institution n'est pas consultée avant l'élaboration de lois ayant un lien avec
la concurrence.
Amara Zitouni, qui était l'invité hier du Forum El Moudjahid, a expliqué qu'il «a fallu les évènements de 2011 (émeutes dans plusieurs villes du pays en raison de la hausse des prix de certains produits, ndlr) et le rapport d'enquête de l'APN qui suivit pour que cela plaide en faveur du retour du Conseil national de la concurrence». L'intervenant a rappelé que la création du CNC date de 1995, avant d'être dissoute en 2003, puis relancée en 2013. Si son institution «est très peu connue» du grand public et des entreprises, elle l'est d'autant plus de l'administration. «A un certain moment, on considérait que le CNC était sous tutelle du ministère du Commerce. Mais depuis l'arrivée de M. Bakhti Belaib, les choses sont claires: le CNC est une institution autonome » et le ministère du Commerce «n'a qu'une autorité morale», insiste M. Zitouni. De 1995 à 2003, le CNC «a fonctionné normalement». A cette époque, le CNC a «sanctionné des entreprises nationales (ENIE en 1999 et SNTA en 1998) à de très fortes amendes» (respectivement de 4,3 millions de DA et près de 800.000 de DA, selon un document du Conseil), rappelle le premier responsable de cette institution. Depuis la relance de son activité en janvier 2013, le CNC «est passé par une année blanche» nécessaire pour constituer son équipe et observer le marché. De 2013 à fin 2015, le CNC a traité et statué sur 29 affaires touchant plusieurs secteurs de l'économie, dont l'industrie (ciment, médicament, énergie...), les télécommunications et le commerce (automobile...). Par ailleurs, dans une douzaine d'autres affaires, le CNC a prononcé «son incompétence». Parmi les affaires traitées par le CNC, Amara Zitouni cite une plainte déposée contre le cimentier Lafarge Algérie par un grossiste en matériaux de construction et une autre relative à une requête introduite par le représentant des distributeurs de lubrifiants à l'encontre de Sonatrach. Sur les 29 affaires traitées par le CNC depuis sa relance en 2013, «trois décisions ont été attaquées devant le tribunal administratif». M. Zitouni rappelle à ce propos que les décisions du CNC peuvent être dénoncées auprès de la justice. Effectif réduit et siège inadéquat Concernant les conditions de travail des 30 employés de l'institution, dont les 12 membre du Conseil de la concurrence, M. Zitouni évoque des difficultés. «La norme en matière de nombre d'employés est de 150 personnes», selon M. Zitouni qui annonce que le CNC voudrait recruter environ 70 personnes, mais «faute d'espace de travail» ce recrutement n'aura pas lieu. Évoquant le siège du CNC, Amara Zitouni affirme : « Nous travaillons dans un réduit». Au sujet de la législation relative à la concurrence, le président du CNC évoque l'absence de prérogatives importantes, comme la perquisition qui permet aux enquêteurs d'aller chercher des preuves irréfutables, et la notion de «clémence» qui «n'a pas été prévue par la loi». Selon M. Zitouni, la «clémence» est un élément clé, utilisé par d'autres pays pour démanteler les cartels qui s'adjugent un marché. Par ailleurs, si le CNC à la prérogative de s'auto-saisir, « en cas de présomption d'atteintes à la concurrence ». Mais, compte tenu des moyens dont ils dispose, le CNC ne peut se permettre de recourir souvent à l'auto-saisine. Cependant, le président du CNC affirme que son institution a lancé, dans le cadre de l'auto-saisine, «une étude thématique sur le marché du médicament ». «Informés comme monsieur Tout-le-Monde» Interrogé sur l'avis du CNC sur les quotas d'importation imposés à certains produits, le président affirme que cette institution a appris la mise en œuvre de la mesure « via la presse, comme monsieur Tout-le-Monde ». « Nous avons protesté contre notre mise à l'écart dans la prise de cette décision. On nous a dit que c'est trop tard, mais que nous allons être consultés lors des décrets d'application », affirme M. Zitouni. Le président du CNC rappelle, à ce propos, les dispositions de l'article 36 de l'ordonnance n°03-03 du 19 juillet 2003 (modifiée en 2008 et 2010) qui stipule que cette institution doit être consultée « sur tout projet de loi législatif et réglementaire ayant un lien avec la concurrence ou introduisant des mesures ayant pour effet (...) de soumettre l'exercice d'une profession ou d'une activité, ou l'accès à un marché à des restrictions quantitatives ». Interrogé également sur le rôle des associations de consommateurs dans la saisine du Conseil national de la concurrence, M. Zitouni déplore l'absence totale de la société civile parmi les organismes qui adressent des requêtes à son institution. |
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