Les plages ont aussi leur mafia, ces groupes et bandes
organisées qui rackettent les estivants sur des plages perdues sur le vaste
littoral, et souvent y font régner leurs propres lois. Cette année encore, les
autorités annoncent que l'accès aux plages sera gratuit et que les estivants
seront accueillis par un personnel saisonnier recruté pour leur confort. C'est
ce qui a été annoncé, il y deux jours, par la wilaya d'Alger, qui assure que
les plages gardées, 72 seulement, seront gratuites, hormis les chaises longues
et les parasols, qui seront payants. Durant le mois de ramadhan, à Chlef, la
secrétaire générale de la wilaya avait fait une tournée dans les principales
plages de la wilaya, et rappelé que l'entrée y est gratuite. Dans les wilayas
d'Oran, Mostaganem, Skikda ou Béjaïa et Jijel, c'est la même rengaine:
accès des plages gratuit. Dans la réalité, les choses se passent autrement, car
tout le monde feint d'ignorer que les présidents d'APC, pour faire travailler
les jeunes de la commune, leur louent les plages les plus fréquentées, et donc
les plus rentables. Comme dans les plages d'Oued El Melh, ?'Datté'', Oued
Zeboudj, El Hamdania ou Oued Goussine et Beni Haoua dans la wilaya de Chlef,
des plages où l'entrée est gratuite, mais l'accès aux véhicules interdit, sauf
si les vacanciers paient la somme de 100 DA pour le parking. C'est en fait non
pas l'accès mais le parking des véhicules qui est payant, une astuce pour
contourner la gratuité de l'accès aux plages. A moins de se déplacer en tapis
volant, on ne peut rallier ces plages qu'en voiture. Question à 100 dinars: si un vacancier refuse de payer le parking imposé
par des jeunes souvent munis de matraques et autres cannes, où laissera-t-il
son véhicule? Juste après le passage de la SG de la wilaya de Chlef, fin juin
dernier, sur le littoral ténésien, les estivants ont été surpris de voir que
l'accès de la plage de ?'Glamime'', une belle petite crique bordée de pinèdes
entre Ténès et Boucheghal, en allant vers Beni Haoua, était interdit par une
clôture. Questionné, celui qui était en train de clôturer la crique de Glamime
répondit que certains vacanciers leur causent des problèmes. Le fait est que
dans la plupart des grandes plages du pays, hormis celles proches des grandes
villes, il y règne une grande ?'faouda'', une anarchie où souvent les pères de
famille se font racketter, paient l'accès aux plages pour avoir au moins ?'la
paix'', en s'acquittant d'une redevance pour le parking. Et malgré les appels
du ministère de l'Intérieur, jamais ces ?'parkingueurs-racketteurs'' n'ont été
rappelés à l'ordre. Cette année encore, en dépit des communiqués répétés sur la
gratuité des plages, tous les pères de famille vont payer non pas pour avoir
accès à la mer, mais pour sécuriser leurs véhicules, car les APC côtières,
encore moins les wilayas qui les gèrent, n'ont songé jusqu'à présent à y
déployer une police communale pour faire respecter les lois de la République.
Il y a bien le ?'Plan Delphine'' de la Gendarmerie nationale, mais ?'une seule
main ne peut applaudir'', d'autant que ce dispositif, devenu traditionnel, est
mis en place pour surtout sécuriser le réseau routier pendant les vacances. Un
?'plan national d'accès'' aux plages sans les ?'summer parkingueurs'' tarde à
être mis en place. En attendant ce miracle, cet été encore, l'accès aux plages
et aux plus belles criques du pays sera payant, quelles que soient les
déclarations des uns et des autres.