Après son
coup de gueule sur les dépassements de certaines chaînes de télévision
«pirates», l'Autorité de régulation de l'audiovisuel (ARAV) vient d'être
installée par Sellal. Dans la logique du
gouvernement, cette instance est une étape importante dans l'organisation et le
développement du paysage médiatique national, de l'avis même du Premier
ministre. Cette ARAV, en quelque sorte la CSA française, est perçue comme une
véritable police des télés et radios privées ne devant rendre compte qu'au
président. Sellal, qui souligne l'indépendance de ses
membres, semble ou feint d'oublier que ces derniers sont en majorité désignés
par Bouteflika. De là à parler d'indépendance ! Sellal
avait auparavant menacé ces chaînes de télévision privées, à majorité offshore,
et demandé à son ministre de la Communication d'assainir la situation. L'ARAV
devra donc jouer le rôle de gardien de la morale et des constantes nationales
dans un champ médiatique en ruine, laissé volontairement sans bornage par un
Etat spectateur. Lorsque Sellal évoquait la violation
de la vie privée, les insultes et les atteintes à la dignité des citoyens
algériens, le régionalisme et la fitna, l'apanage
exclusif de certaines chaînes tolérées, il oublie que ces mêmes logos sont
instrumentalisés à des desseins politiciens et à des fins personnelles. L'ARAV
aura également pour tâche d'être aux côtés des médias qui s'inscrivent dans une
démarche vertueuse, si chère à Grine, dans le respect de la loi et de la
liberté d'information et d'expression. Pourtant, les lois de la République sont
claires mais leurs interprétations sont soumises à des réflexions
clientélistes. Partant de là, le travail de l'ARAV ne pourra être que
subjectif, dépendant de directives officieuses. Ses membres, gageons-le,
n'auront pas la latitude de leurs compétences et devront se soumettre aux
exigences politiciennes de l'heure. On l'avait déjà vu avec la première mouture
de l'Autorité sous Miloud Chorfi, une autorité
véritable tambour de résonance des directives de Grine. Du temps de cette instance,
ces chaînes «Taiwan», pourtant en sursis à croire les remontrances et les
menaces du ministre de la Communication, ne se privaient pas d'étaler en public
leurs travers. La campagne menée par l'une d'elle, actionnée dans une cabale
menée contre un capitaine d'industrie et d'une femme politique résume à elle
seule cette délinquance médiatique. La volonté de l'Etat n'est pas tournée
exclusivement vers des chaînes satellitaires du pouvoir, abattant par
procuration le sale boulot, mais s'adresse aux logos qui ont fait de la
critique du pouvoir un plan de charge.