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S'il
est conceptuellement possible de séparer les libertés économiques des décisions
politiques régaliennes, il est difficile d'imaginer un régime démocratique qui
n'assurerait pas aussi les premières.
La tentative de blocage par le Ministère de la communication de la cession des parts du journal El Khabar, illustre une fois de plus que c'est dans un contexte de lente in version des priorités entre décisions politiques interventionnistes et libertés économiques qu'il convient à notre avis d'apprécier la remise en cause du rachat du quotidien national. Contre toute logique économique, le Ministre de la communication s'accroche au modèle désuet d'un quotidien généraliste n'appartenant pas à un groupe, n'étant pas soutenu par des actionnaires, et qui n'a pas pour premier objectif , le marché et le profit, ce type de presse écrite est en déclin depuis bien longtemps dans la plupart des démocratie parce que représentant l'allégeance et la compromission avec le pouvoir du moment. Alors, quelles sont les motivations du Ministre de la communication pour dire que la cession du journal en question n'est pas conforme à la Loi ? Comment sauvegarder un système d'information hors du marché ? Peut- on faire de l'information un bien d'exception non marchand ou bien marchand spécifique et subventionné ? L'information est-elle un bien public séparé du marché économique ? Peut-on imaginer des structures, non viables au sens économique et donnant de l'information au public ? Le rôle de l'équipe éditoriale est-il en déclin au profit du gestionnaire, annonceur, Publicitaire, et actionnaire ? La réponse du Ministre de la communication semble très hasardeuse au vu du traitement qu'il accorde à cette affaire qui secoue l'opinion nationale depuis quelques semaines. Le recours à la justice administrative dans une affaire purement commerciale renseigne de l'incapacité du régime politique et son improbabilité effective à assurer la sécurité juridique des droits de propriétés, des successions et des transactions. La répression des libertés, notamment celle de la presse, signifie que des informations utiles à l'expression des libertés économiques sont dissimulées par un concours d'asymétries d'informations. On peut difficilement penser qu'une telle institutionnalisation du secret puisse servir la confiance nécessaire aux transactions économiques. C'est l'un des enjeux majeurs que rencontre le régime algérien dans sa politique économique : des agents économiques, sachant que les droits de propriété, comme les décisions des tribunaux, sont de fait soumis à l'arbitraire et à la justice de nuit, répugnent à investir leur épargne dans l'économie nationale, un autre problème plus grave est à signaler ici , il est en rapport avec le fondamentalisme religieux lorsqu'il usurpe le domaine économique, sinon comment expliquer qu'un pseudo sulfureux cheikh puisse à lui seul et à travers ses prêches cathodiques , invalider et mettre en péril le projet souverain du gouvernement de l'emprunt obligataire ? C'est précisément pourquoi, il y'a une urgence à mettre la question du pluralisme des médias et donc des opinions libres à l'abri de tout assujettissement idéologique, c'est l'une des réponses à la forte demande de démocratie en Algérie. De cette soif de démocratie, on a deux visions contraires, mais également possibles, de la démocratie comme « règne de l'intérêt ». d'un côté , une lecture que je qualifierais de « paranoïaque », qui prétend repérer dans toute action, l'expression d'une attitude politique nuisible et condamnable, bref d'un conflit d'intérêt. Dans l'affaire El Khabar, et de l'avis du Ministre de la communication, la confusion des intérêts économiques et politiques ne se dément pas ; de l'autre côté, une vision strictement objective et « fonctionnaliste », qui se contente de noter les effet ( et éventuellement les bienfaits) d'une saine et loyale concurrence entre intérêts. Ces deux interprétations correspondent à deux visions différentes de la société. L'une a le culte de l'intérêt général qui passe, selon cette vision, par l'éradication des intérêts particuliers et privés. L'autre considère au contraire que c'est par la concurrence des intérêts privés et la libre entreprise que l'intérêt général sera atteint. Comment comprendre un tel clivage en Algérie ? Autrement-dit, ce clivage doctrinal, existe-t-il réellement chez nous ? Pour la deuxième fois, quelles sont les motivations du Ministre de la communication par son refus de céder les actions d'El Khabar ? Serait-ce des motivations d'intérêt général ? De domination économique et d'influence de l'actionnariat sur l'orientation politique et le contenu de la presse ? Une ligne éditoriale peut-elle être politiquement et idéologiquement neutre ? Il nous appartient tous de répondre à ces questions de société, ce qui est clair, en revanche c'est que le bon système de gouvernance doit trouver les moyens par lesquels les individus et les institutions ( publiques, privées et civiques ) gèrent les affaires collectives de la cité, les divers intérêts acceptent et surmontent leurs différences ; et ces multiples acteurs et organisations participent à un processus permanent de concurrence, de coopération et d'apprentissage formels et informels. *Universitaire |
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