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Crash de l'avion d'Air Algérie au nord du Mali: Le rapport final présenté vendredi prochain

par Moncef Wafi

Le rapport final sur l'accident de l'avion d'Air Algérie qui avait fait 116 morts en juillet 2014 au Mali sera présenté ce vendredi, a annoncé hier le Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA), autorité responsable des enquêtes de sécurité

dans l'aviation civile française.

Le rapport sera publié par le ministère malien des Transports à Bamako et un point de presse sera animé à Paris en présence du président de la commission d'enquête du Mali, N'Faly Cissé, précise le BEA dans un communiqué. Le McDonnell Douglas MD 83, affrété par Air Algérie auprès de la compagnie espagnole de leasing Swiftair, assurant le vol AH 5017 entre Ouagadougou et Alger s'était écrasé dans le nord du Mali environ 32 minutes après son décollage avec 110 passagers, dont six Algériens, 54 Français, des Burkinabés, des Libanais et six membres d'équipage, tous Espagnols. L'épave a été retrouvée dans le nord du Mali, précisément près du village de Boulekessi à cinquante kilomètres au nord de la frontière avec le Burkina Faso. C'est un drone d'observation de l'armée de l'air française, un Reaper, qui l'a localisée dans la région de Gossi. La cause principale de l'accident, déjà révélée par le BEA, réside dans la non-activation par les pilotes du système antigivre des moteurs, ce qui a pu provoquer le décrochage de l'avion. Le BEA avait déjà indiqué en avril 2015 que «les paramètres enregistrés indiquent qu'il n'y a pas eu de manœuvre de récupération du décrochage réalisée par l'équipage », se basant sur les premiers éléments de l'enquête.

Rappelons que le premier rapport d'enquête, rendu public en septembre 2014 à Bamako, n'avait pas permis d'expliquer l'accident. C'est du moins la lecture faite par le BEA, chargé le 7 août 2014 par les autorités maliennes de mener l'enquête technique sur l'accident, qui explique qu'aucune «piste privilégiée» ne se dégageait après les premiers résultats de l'enquête. Sitôt le dossier en main, le BEA avait indiqué que l'avion avait été pulvérisé à son impact au sol après avoir perdu de la vitesse et viré à gauche pour une raison indéterminée alors qu'il traversait une zone orageuse.

Ces premiers résultats laissaient alors un goût d'inachevé puisqu'ils n'avaient même pas permis d'éloigner la piste criminelle. « Rien ne peut confirmer ou infirmer la piste terroriste », avait tenu à souligner Bernard Boudeille, un responsable du BEA présent dans la capitale malienne.

Ainsi, selon le BEA, il est impossible de comprendre les messages échangés entre les membres de l'équipage du fait que l'enregistreur des conversations dans le cockpit (CVR) ne fonctionnait pas normalement. M. Boudeille notait également que le vol AH 5017 a été victime d'une «chute brutale» d'après l'enregistreur des données de vol ; cette perte sèche d'altitude est due au «ralentissement de ses moteurs» à son altitude de croisière. Le MD83 aurait ainsi mis trois minutes pour tomber de plus de 30.000 pieds. Le rapport fait état d'une déconnexion des systèmes de pilotage automatique du McDonnell Douglas « sans qu'il soit possible de dire si cette déconnexion a résulté d'un automatisme de l'avion ou d'une manœuvre volontaire ou involontaire de l'équipage », avait encore précisé l'expert français.

Revenant sur l'équipage espagnol aux commandes de l'appareil, le BEA estime dans son rapport que le pilote ainsi que le co-pilote n'étaient pas fatigués et que l'équipage disposait d'une expérience africaine, alors que plusieurs hypothèses avaient circulé sur l'état physique de l'équipage ainsi que de son manque d'expérience du ciel de l'ouest africain et de la manière d'aborder ses violents cumulonimbus. Un élément aggravé dans cette région du globe où le contrôle aérien n'est pas le plus performant au moins jusqu'à la frontière algérienne.

L'avocat des familles des victimes avait qualifié d'«accablants» les dysfonctionnements révélés par l'enquête judiciaire. Deux ans et demi après le crash, les familles des victimes, après les indemnisations, ont réclamé les corps de leurs proches disparus. Dans un communiqué rendu public en février dernier, «les associations de familles de victimes burkinabé, françaises et libanaises avaient unanimement exprimé le désir de les voir inhumées à Ouagadougou et s'en étaient ouvertes auprès des autorités impliquées, dont le ministre des Transports malien». Pourtant, «courant avril», les familles «ont appris contre toute attente que les restes mortels non identifiés de leurs proches, après avoir été conservés à Gao, ont été subitement inhumés au cimetière de Bamako sur décision de la justice malienne, sans aucune information aux familles et sans explication».

Le McDonnell qui s'est écrasé dans le nord du Mali a été loué par Air Algérie à Swiftair dans le cadre d'un contrat de sous-traitance dit «ACMI». Une compagnie créée en 1986, spécialisée dans les vols d'entreprises et la location de sa flotte estimée à une trentaine d'avions dont des McDonnell MD-83 de 18 ans d'âge (167 sièges), mais aussi des Boeing 727 et 737-300, des Embraer 120 et Fairchild Metroliner. Ses clients sont généralement des tour-opérateurs et des compagnies aériennes. Elle n'avait jamais connu un tel accident et l'avion crashé avait subi une révision générale deux jours avant l'accident lors d'une escale à Marseille, selon le directeur général de l'aviation, Patrick Gandil.