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Nait-Mazi Noureddine : un vrai «grand» de la presse nationale

par Témoignage De Belkacem Ahcene-Djaballah*

Quelques éléments biographiques :

- Né à Paris en 1935, un mois de janvier, c'est donc un Capricorne. C'est vous dire le caractère du bonhomme pour ceux qui croient en l'influence des astres.

- Fils de fellah émigré de la commune d'Illiten.

- Issu d'une famille nombreuse (10 enfants).

- A fait le lycée Voltaire à Paris, ce qui n'est pas peu !

- Militant au PPA-MTLD dès l'âge de 16 ans.

- Prison de la Santé (Paris) puis à Fresnes en 56/57 pour « insoumission et atteinte à la sûreté de l'Etat ».

- Juste après sa sortie de prison, il déserte l'armée française et se réfugie en RFA (Allemagne).

- 62 : Retour (ou arrivée) au pays. Rédacteur au journal Le Peuple créé en 1962. Chef de rubrique, puis rédacteur en chef adjoint en 1964.

- Rédacteur en chef d'El Moudjahid (quotidien), de 1965 à 1971.

- DG de l'entreprise en 1971.

- 1980 : Conseiller auprès du ministre de l'Information.

- Septembre 1983 : Retour à El Moudjahid ; l'entreprise éditant aussi le quotidien Horizons fondé en 1985, en même temps qu'El Massa.

- Août 1990 : Départ à la retraite.

- 1998-2001 : Consultant en communication auprès du président du Conseil de la nation.

Il a, donc, un CV long et bien plein, totalement au service du pays, durant la guerre de libération nationale comme durant celle de l'édification, au service de l'Etat, au service d'une profession. Cependant, s'il y a un homme bien mal connu par le grand public, c'est bien lui. Il est vrai qu'il n'a pas fait grand-chose pour qu'on le connaisse bien plus et bien mieux. Il avait un immense défaut, en ces temps de médiatisation à outrance du moindre fait et geste du plus minable d'entre nous. Ce défaut, c'est du « trois en un » : La modestie. L'humilité. La discrétion. Trois défauts qui, mis ensemble et conjugués au travail, travail toujours bien fait (dans la rigueur et la discipline), deviennent une qualité sans égale.

Tous ceux qui ont travaillé avec lui, sous ses ordres ou à ses côtés, le reconnaissent aujourd'hui, quels que soient leurs choix politiques et idéologiques, et ce malgré tous les incidents de parcours, bien souvent imposés par des conjonctures inattendues ou par les humeurs toujours chagrines de décideurs politiques en mal de dirigisme.

C'est pour cela que Nait Mazi est resté un homme à découvrir... et on avait toujours espéré le voir un jour « passer à table » en se confiant (ce qui n'aurait pas été une mince affaire) ou écrire ses mémoires.

Ce qui était absolument certain, c'est que s'il ne le faisait pas, d'autres allaient le faire à sa place et c'était dommage, car bien des pans de sa carrière vont rester incomplets ou, alors, déformés.

Pour ma part, Nait Mazi, j'en entendais parler déjà dans les années 60, encore étudiant (en journalisme) et lui, déjà journaliste. Je l'ai mieux connu au début des années 70 et, pour moi - alors, après un passage dans la presse écrite, tout nouveau fonctionnaire au ministère de l'Information et de la Culture, à la Direction de l'Information plus précisément (sous les ordres d'abord de Yahia Henine, puis de Mohamed El Mili)- il restait un mystère... tant il paraissait carré, bourru, peu bavard... le tout caché derrière une carrure impressionnante... et la fumée d'une cigarette qui ne le quittait jamais.

Premier coup de canif au mystère Nait Mazi : Au début des années 80, avec une ouverture, relative il est vrai, de l'expression, il m'avait proposé d'écrire une chronique de critique sociale hebdomadaire. Cela dura plus d'une année...J'avais écrit sur tout, sans jamais être « revu ou corrigé » (Kamel Belkacem était alors réd-chef et Mohamed Abderrahmani, réd-chef adjoint, je crois). Grâce à O. Abrous, alors responsable de l'édition à la SNED, c'est devenu un bouquin.

Second coup de canif, toujours fraternel : nous avons travaillé ensemble, dans un groupe de réflexion restreint, durant près de trois mois ou bien plus, quasi quotidiennement, du temps de Bachir Rouis, ministre, sur la restructuration du secteur de l'Information, à un moment où ce secteur traversait une crise organisationnelle objectivement réelle et grave... alors esquivée continuellement. Des souvenirs inoubliables, car travailler dans des conditions particulières oblige, durant les rares moments de repos, à s'évader par l'intermédiaire de souvenirs, d'anecdotes, d'histoires drôles. Je ne vous les raconte pas... mais celles, dites par Nait Mazi, à sa manière, étaient les plus délirantes et les plus reposantes. Il savait y faire le bonhomme, sachant bien, habitué qu'il était à la gestion des rédactions, qu'il fallait, de temps en temps, « évacuer » la pression qui pesait sur nous vu la lourde et difficile mission alors confiée (la restructuration était alors imposée par une résolution du Comité central du parti, alors unique, le FLN)

Troisième coup de canif au mystère du désormais « grand frère » : un long voyage en Chine dans une délégation officielle, conduite par Bachir Rouis, alors que j'étais DG de l'APS...afin de voir ce qui s'y faisait comme réformes économiques. Je ne vous raconte pas ! Mohamed Melaïka et Benamar Zerhouni, alors présents parmi nous, pourraient en témoigner. A son retour, il avait publié dans El Moudjahid un long et super reportage sur la Chine en mouvement.

La retraite venue, pour l'un comme pour l'autre, j'ai, à chaque fois, grand plaisir, à chaque rencontre, à le revoir...et à parler, avec lui, non pas tant du passé, mais surtout du futur. Toujours aussi bougon, le « grand homme blond », et bien que peu bavard, toujours disert. Mais, on voyait cependant, rapidement, sur son visage et ses expressions - même au plus fort de la maladie - pour ceux qui le connaissaient, qu'il se faisait un « sang d'encre » pour le pays et pour la presse. Journaliste il a été, journaliste il le restait. Droit dans ses souliers, droit dans ses idées. Un journaliste « engagé »... pour l'éternité. Pour l'Algérie.

*Ancien DG de l'APS