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Sit-in des enseignants contractuels: Vers une intervention de la force publique

par Abdelkrim Zerzouri

Tout laisse à croire que les pouvoirs publics sont décidés à organiser le 30 avril prochain ce concours de recrutement de 28.000 enseignants, même s'il faudrait pour cela y aller à la hussarde.

C'est ce qu'a laissé clairement entendre le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Nouredine Bedoui, lorsqu'il a lancé en marge d'une séance plénière du Conseil de la nation consacrée aux questions orales, jeudi 14 avril, que «des mesures seront prises dans le cadre de la préservation de l'ordre public en cas de persistance du mouvement de protestation des enseignants contractuels à Boudouaou». Une menace à peine voilée quant au recours quasi certain à des moyens musclés pour disperser les manifestants de cet endroit qu'on qualifie de «place de l'intégration», où ils ont été stoppés par les services de sécurité, après une marche de 8 jours entamée à partir de la wilaya de Béjaïa (un certain 27 mars), et visant à rejoindre la capitale. Sur place, le climat est très tendu, selon les échos qui nous sont parvenus. De la parole à l'acte, M. Bedoui ne semble pas trop attendre, car des renforts policiers ont été dépêchés, hier, dans la ville de Boudouaou, bloquant tous les accès vers la place où se tient le rassemblement des contractuels, ne laissant personne entrer ou en sortir, nous ont signalé des témoignages. Les manifestants qui ont l'habitude d'user des toilettes des habitations limitrophes, ou s'y rendant pour de quelconques utilités quotidiennes, n'ont pas pu le faire, hier, car les habitants sont plus réticents depuis qu'ils ont reçu des «orientations» de ne plus accorder des aides ou des facilités de quelque nature que ce soit aux contestataires, affirment nos sources. Chose qui a encore ajouté plus de peine et de douleur morale aux contractuels, mais cela n'a guère brisé leur volonté et leur détermination à aller jusqu'au bout dans leur mouvement de contestation. Une détermination qui fait craindre le pire, selon des avis largement partagés. Le ministre de l'Intérieur a, ainsi, incité les enseignants protestataires à réintégrer leurs postes de travail soulignant que «le gouvernement leur avait accordé suffisamment de temps pour parvenir à des résultats positifs par la voie du dialogue». Apportant, donc, sans détours sa solidarité avec la ministre de l'Education, qui a déjà obtenu un autre soutien dans ce conflit, celui du ministre du Travail, Med El Ghazi, qui a fait savoir récemment que la participation au concours pour bénéficier des mesures d'intégration dans le monde du travail concernait «toutes les catégories, à l'instar de tous les secteurs, et ce dans le cadre de la justice sociale et conformément aux lois de la République». «Dès le début, le gouvernement a été très réceptif et fait montre d'une intention sincère à l'égard des protestataires», a rappelé dans ce cadre M. Bedoui, avertissant qu' «il n'est pas possible d'attenter à l'ordre public». «Si cette situation persiste des mesures seront prises», a-t-il encore mis en garde. M. Bedoui a déploré que l'approche participative prônée par le gouvernement n'ait pas été prise en compte par les enseignants contractuels protestataires lesquels, a-t-il considéré, «n'ont affiché aucune volonté ni intention d'aller au dialogue». Le ministre a fait remarquer que le ministère de tutelle, dès le début, a ouvert grand les portes du dialogue et de la concertation à travers une série de mesures qu'il a considéré comme «incitatives» dont la dernière concerne la valorisation de l'expérience professionnelle qui permettra aux enseignants contractuels de gagner entre un et six points supplémentaires, selon les cas, lors du concours de recrutement outre la reconduction systématique du contrat de travail lors de la prochaine rentrée scolaire au profit des enseignants qui ne peuvent pas postuler pour le concours. M. Bedoui a également regretté les tentatives de certaines parties d'instrumentaliser les préoccupations de cette catégorie à des fins douteuses.

Le choc avec les manifestants est-il pour autant inévitable ? Tout est possible si l'on se pare de sagesse dans le traitement de ce conflit, estime le chargé de communication du Cnapeste, Messaoud Boudiba. Ce dernier s'est montré très inquiet face au développement des évènements, craignant des dérapages incontrôlés qui envenimeraient davantage la situation dans une période sensible. Il estimera dans ce contexte que des solutions médianes peuvent exister, sans léser ni les contractuels dans leur droit, ni toucher au principe de l'organisation du concours. D'ailleurs, nous a confié notre interlocuteur, les contractuels ont mandaté, hier, trois syndicats, le Cnapeste, le CLA et le SNTE, pour négocier en leur nom une solution «équitable». Une lueur d'espoir pour donner un nouveau souffle au dialogue et éviter les tristes scènes de dispersion manu militari des manifestants. Notons, par ailleurs, que «près de 90% des enseignants contractuels ont déposé leurs dossiers pour postuler au concours de recrutement de l'éducation nationale», selon une déclaration du chef de cabinet du ministère de l'Education nationale, Abdelwahab Guellil, qui a précisé dans ce sillage que 963.602 candidats s'étaient inscrits, jusqu'au matin du jeudi 14 avril, à l'échelle nationale.

Pour rappel, selon un planning préétabli, le concours ouvert cette année à 28 nouvelles filières (à l'instar des sciences politiques, des sciences de la communication, du droit, de l'économie et de certaines spécialités scientifiques), sera organisé le 30 avril prochain pour le recrutement de plus 28.000 enseignants pour les trois paliers (primaire-moyen-secondaire), et les résultats de l'examen écrit seront donnés le 12 mai, permettant aux candidats retenus de passer le test oral les 8 et 9 juin, alors que les résultats définitifs seront rendus publics le 30 juin.