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Quel débat politique en Algérie ?

par Moncef Wafi

Alors que l'opposition se cherche un second souffle pour convaincre l'opinion publique qu'elle est capable d'incarner l'alternative démocratique au pouvoir actuel, l'attaque frontale de Saadani contre Ouyahia ramène le débat politique à sa juste valeur. Même si le niveau du débat frôle le rase-mottes, les diatribes du SG du FLN ont ce quelque chose de pragmatique qui déshabille complètement les convictions des uns et des autres. Pour les romantiques d'une politique menée la fleur au fusil, le rappel est brutal, sans concession. Saadani, en demandant la tête de son ennemi intime, veut baliser le chemin à El Mouradia. Son ambition personnelle de succéder à Bouteflika n'est un secret pour personne, on l'a rappelé maintes fois sur ces mêmes colonnes, et le fait de s'en prendre derechef à Ouyahia et réclamer publiquement son limogeage de son poste de chef de cabinet de la Présidence est un signal fort en direction des faiseurs de rois. Saadani sait mieux que quiconque que la course à El Mouradia est engagée et le mal qu'il prend à essayer de discréditer son pendant au RND trahit ses doutes. L'équilibre en haut lieu est toujours de vigueur et les clans se neutralisent encore, sinon comment interpréter ces appels du pied pour se débarrasser d'un présidentiable en puissance ? Le message de Saadani est adressé à deux destinataires et le timing n'est pas fortuit. En premier, à qui de droit, se sentant en perte de vitesse, puis à l'opposition, présente hier à Zéralda pour la tenue de son deuxième congrès. Le message adressé aux partis dits de l'opposition est clair : n'espérez aucun changement puisque le futur président sera choisi en haut lieu. Et pour Saadani, le nouveau locataire d'El Mouradia ne peut être que lui. La réaction d'Ouyahia et surtout son avenir proche nous renseigneront sur la valeur exacte de ses soutiens. Avec de telles attaques, le patron du FLN exclut toute réelle volonté du régime à assainir puis démocratiser la vie politique. Son discours coupe court à toutes les promesses institutionnalisées sur la transparence et la propreté des futures élections. Comment réagira l'opposition ? Les Algériens qui ont d'autres urgences quotidiennes, accablés par des augmentations de prix assassines, ont la tête ailleurs. Et c'est l'objectif recherché. Reste alors une opposition plus bavarde qu'entreprenante, se regardant le nombril, attendant qu'on lui souffle la solution aux problèmes de ce pays, plus que jamais aux mains de clans occultes.