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La pédagogie court-circuitée ?

par Abdelkrim Zerzouri

Le mal est, enfin, reconnu, diagnostiqué, avec cette signature d'une convention-cadre pour la lutte contre la violence en milieu scolaire entre les ministères de l'Education nationale, de l'Intérieur et des Collectivités locales et de la Défense nationale représentée par le commandement général de la Gendarmerie nationale. Car, il n'y a pas si longtemps, quand on parlait de la violence dans le milieu scolaire, il fallait s'attendre inévitablement à une levée de boucliers générale au sein des responsables du secteur de l'Education nationale. On tentait, ainsi, de minimiser les dégâts immédiats et les conséquences à moyen et long terme des dérives dangereuses qui mènent l'école sur les sentiers de la violence. On ne voulait entendre parler que de violence dans l'environnement, pas à l'intérieur des établissements scolaires, et la lutte contre cette violence restait, naturellement, une mission qui incombe aux services de sécurité. Aujourd'hui, avec cette reconnaissance implicite de la violence qui sévit dans le milieu scolaire, un grand pas est franchi dans la prise en charge du phénomène qui prend des proportions alarmantes. Mais, ce n'est pas autant dire que la convention en question est une solution efficace, ou la mieux appropriée. L'école, ce n'est pas la rue, normalement. Indubitablement, certains aspects de la violence, partout où ils se manifestent, relèvent du pénal et sont du domaine de compétence plénier des services de sécurité, cela n'a, d'ailleurs, nullement besoin d'une quelconque convention, mais d'autres remèdes contre la violence en milieu scolaire, globalement, ne peuvent être prescrits hors du champ de la compétence pédagogique. Dans tous les cas d'espèces, la convention en question sonne le glas pour l'école, de quelques côtés qu'on s'y penche. Certains y verront, non pas à tort, que cette convention achève un acte pédagogique, déjà, asphyxié par les interventions, ou les violations, des décisions administratives, à travers l'ingérence dans les décisions des conseils de classes, pour l'exemple. Et, si d'un autre côté, on admet que la lutte contre cette violence doit fatalement inclure les services de sécurité, c'est quelque part un aveu implicite de l'échec latent de l'acte pédagogique pour venir à bout de ce phénomène de la violence dans le milieu scolaire. D'un côté c'est chaud, et de l'autre c'est brûlant. Une pédagogie qui n'arrive pas à juguler le « chahut des gamins », c'est grave. Et c'est doublement grave lorsque des policiers et des gendarmes sont appelés à la rescousse pour s'ingérer dans la spécialité des enseignants ! Le ministre de l'Intérieur hausse le ton, assurant que l'école « est la ligne rouge à ne pas franchir », et affiche une détermination du gouvernement à lutter contre toutes les formes de violence à travers l'adoption de nouvelles mesures à même de « réduire la dangerosité de ce phénomène ». Et, pas toujours dans le même ton, la ministre de l'Education nationale affirme, de son côté, que la lutte contre la violence en milieu scolaire passe par la « prévention et la sensibilisation en privilégiant le dialogue et la médiation, en redoublant de vigilance, et en bannissant l'impunité par l'application de la loi ». Mains de fer sans gants de velours et mains enveloppées d'un gant pédagogique peuvent-ils aller de pairs pour extraire cette violence qui écrase l'école ? Tous les moyens sont bons, doit-on en convenir, pour recréer cet espace de quiétude au sein de l'école. Et, maintenant, il n'y a pas que les élèves à protéger contre les dangers des agressions physiques et psychologiques car on éprouve toutes les craintes pour les enseignants, aussi, souvent victimes de la violence des élèves. Renversant.