A n'en pas douter, la visite en Algérie de l'inamovible
ministre des Affaires étrangères russe, Serguei Lavrov, en poste depuis 2004,
est importante pour ne pas dire cruciale quand on connaît les dossiers en
commun que partagent les deux capitales. Les sujets d'actualité ne manquent pas
entre crise des prix du pétrole, conflits syrien et libyen ainsi que les
dossiers bilatéraux. Si à l'évocation du couple algéro-russe, la première
réflexion concerne les contrats d'armement, faisant d'Alger l'un des premiers
acheteurs d'armes russes, les domaines de coopération sont pourtant
diversifiés. Néanmoins, ce qui importe le plus l'Algérie reste la question
énergétique et la stratégie à adopter pour rééquilibrer le marché pétrolier. Le
ministre algérien de l'Energie, commentant cette visite, a clairement laissé
entendre que tout sera fait pour essayer de rapprocher les points de vue pour
au moins geler les niveaux de production des pays exportateurs. Et plus si
affinités. Si Alger a besoin du poids énergétique de Moscou pour ramener à la
raison l'Arabie Saoudite, son rôle devra être prépondérant dans l'approche
iranienne puisqu'aux dernières nouvelles, Téhéran n'a pas accepté la
proposition du quartet Russie, Qatar, Venezuela et Arabie Saoudite de geler le
niveau de production à celui de janvier. Reste à savoir si l'Algérie jouera
l'intermédiaire entre Riyadh et Téhéran pour trouver un accord minimal et
relancer les prix du baril. C'est en tout cas l'espoir que nourrissent les
Algériens pour se sortir de la crise économique induite par la chute de la
mercuriale pétrolière. Autre sujet brûlant, le dossier syrien et l'implication
directe des Russes dans le conflit. Même si l'influence algérienne n'est pas
très pesante dans la région, il n'en demeure pas moins qu'Alger a toujours
soutenu le régime de Damas et les intérêts russes ne devront donc pas y être
inquiétés. Au contraire, le dossier libyen, apparemment loin des priorités
russes, représente, quant à lui, une question de sécurité nationale pour notre
pays de par la profondeur géographique qu'il pourrait offrir aux combattants de
Daech en cas d'intervention militaire étrangère en Libye. Y aura-t-il une
convergence d'idées à propos de ces deux conflits ? Certainement, même si
chaque pays à ses propres priorités. Pour le moment, aucune information n'a
fuité sur ces deux questions en dehors des annonces protocolaires.
D'autres sujets seront au menu des négociations, à commencer
par discuter de la «possibilité» de construire une centrale nucléaire de
conception russe, ce qui ne manquera pas de faire réagir le voisin marocain.
Les investissements russes en Algérie restent également l'une des faiblesses
enregistrées même si Lavrov a évoqué des domaines prometteurs pour le
développement du partenariat d'affaires entre les deux pays. Il invitera les
Algériens à exporter leurs produits agricoles en Russie, une opportunité à
saisir surtout que Moscou est en froid total avec ses fournisseurs habituels
que sont Bruxelles et Ankara.