Histoire
vraie, ayant eu pour théâtre, début des années 70, exactement, le n°50 de la
rue des Puits. Oran, en ce temps-là, à l'instar de toutes les villes d'Algérie,
vivait au rythme illusoire, des slogans tout faits et des révoltions
inabouties. Une vie en apparence, en toc, qui cachait mal celle qui se tramait
en-dessous avec ses rites obscurs et ses règles malsaines, venant d'un autre
âge. Le charlatanisme couvait au petit feu, dans une société vivant mal son
déracinement et ses contradictions. L'on recourait, plus promptement, au taleb qu'au médecin. Au 50 rue des Puits, les nombreux
voisins du haouch, partageant le même patio, ne
pouvaient que se taire quand ils virent un jour, débarquer un nouveau voisin.
En fait un géant de 2 m qui chaussait du 47, peu bavard mais au regard sombre
et menaçant, accompagnant une femme de couleur toujours vêtue de djellaba
marocaine et d'une fillette aux yeux bleus et tristes, presque nue et à la
blondeur immaculée. Des étrangers commencèrent, dès lors, à s'inviter chez le taleb qui a pris ses loges au 1er étage de ce haouch, sous le regard apeurés des voisins, surtout les
femmes témoins craintives de tout ce va-et-vient incessant d'hommes et de
femmes. On venait consulter ce taleb à la réputation
bien établie de par les marques de véhicules qui venaient s'y garer et de la
tenue de ses patients. Le cauchemar, le vrai cauchemar : c'était les cris de
cette fillette qu'on entendait chaque nuit, pleurer et crier et souvent gémir.
Le matin, quand le maître des lieux sortait, suivi de sa compagne comme
toujours, les voisins demandaient à la fillette sur le pourquoi de ses cris
mais cette dernière se murait, dans un silence de plomb et de peur mais non
sans laisser apparaître des bleus partout et des morsures. Ainsi, pendant des
mois, ce charlatan qui ne mangeait que de la viande et qui faisait, même sans
menace, peur à tout le monde, mènera sa vie de Pacha. Sa complice, également,
se faisait servir au moindre petit claquement de doigts par les femmes du haouch. Ses 2 pièces étaient sombres et dégageaient, tout
le temps, l'odeur fade de la sorcellerie. Une nuit, les cris qui semblaient, de
plus en plus, forts au milieu d'incantations maléfiques se sont soudainement
tus.
On entendit, par la suite, la porte s'ouvrir
avec grand fracas et des pas de géant descendirent les escaliers. Au petit
matin on le sut. La fillette est morte, la veille des sévices, subis par ce
couple maléfique et que le corps chétif emmené vers l'hôpital par le charlatan
était déjà sans vie à l'arrivée. L'on sut par la suite que le charlatan est
mort, subitement, en prison avant même son jugement et que sa compagne fut
retrouvée égorgée, au petit matin du côté de Sidi El Hasni.