|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Le statut de la Sonatrach continue de susciter des
interrogations auprès de la partie civile et des avocats de la défense,
notamment le mode de gestion des ressources financières de l'entreprise,
l'octroi des marchés et la responsabilité des hauts cadres dans la gestion de Sonatrach, considérée comme le poumon du pays.
Le conseiller de l'ex-PDG de la Sonatrach et directeur exécutif financier de l'entreprise, Rezaiguia Ali, apporte un certain éclairage, en précisant que Sonatrach n'est pas soumise aux investigations ou enquêtes de la Cour des comptes. Il explique que la passation des marchés ou les contrats signés sont alimentés à 100% par l'entreprise, elle-même. Et de souligner que Sonatrach paye l'impôt direct pétrolier à hauteur de 85% et que le reste des recettes alimentent les projets d'investissements. En ce qui concerne les bénéfices dégagés après l'élaboration du bilan financier chaque année, l'assemblée générale fixe une part d'une moyenne générale de 6% qui ira directement dans les caisses de l'Etat et cette même assemblée procède au partage des dividendes sur l'ensemble des directions. Si ce témoin affirme que Sonatrach n'est pas soumise au contrôle de la Cour des comptes, le témoignage de la directrice de la direction centrale de l'Audit au sein de la Sonatrach, Boughanem Nour El Houda Nabila, a jeté pour sa part un pavé dans la mare. Elle a précisé devant le juge Mohamed Reggad que la direction qu'elle dirigeait, au moment des faits, et qui chapotait cinq sous-directions, n'a effectué aucun audit sur les contrats (de télésurveillance, du GK3 et de la réhabilitation du siège de Ghermoul), les trois marchés liés à l'affaire Sonatrach 1 dont le procès est en cours. Pourtant, affirme-t-elle, sa direction avait effectué en trois ans (de 2006 à 2009) 500 audits dont 25% ont concerné le contrôle du processus de passation des marchés. Elle a également précisé que l'ex- PDG de Sonatrach, Mohamed Meziane qui était habilité à recommander des audits auprès de la direction, ne les pas demandés pour le cas de ces contrats. Le juge marque son grand étonnement et lance « comment vous n'effectuez pas des audits pour des contrats dont le montant est de 1100 milliards de centimes et 4300 milliards de centimes ? », en faisant référence aux deux contrats (contrats de télésurveillance octroyés au groupement Contel Funkwerk et au gazoduc GK3 octroyé à Saipem). La directrice de la direction de l'audit affirme que des instructions ont été données par la hiérarchie en appelant toutes les directions de la Sonatrach de prendre en compte les résultats des audits dans leur projet. Interrogée par la défense sur la base d'un procès-verbal de la police judiciaire, sur lequel est indiqué que la direction centrale de l'audit avait traité 1843 contrats de gré à gré, elle dira qu'aucun des trois marchés octroyés de gré à gré (3 affaires de Sonatrach 1) n'a fait l'objet d'un audit. Le témoin précise qu'il s'agit tout simplement d'une synthèse trimestrielle sur le nombre des contrats accordés gré à gré, avec l'accord délivré par le PDG de l'entreprise. Et de souligner que la synthèse est adressée au PDG de Sonatrach, et qui sera par la suite envoyée au ministère (la tutelle). Elle a tenu à préciser qu'aucune mention « douteux » n'a été relevée dans ladite synthèse. Interrogée sur la majoration des prix, elle dira que la direction de l'audit n'est pas habilitée à effectuer une analyse des prix des soumissionnaires et que cette tâche incombe au maître d'ouvrage. Interrogée par la défense sur le mode dérogatoire, elle dira qu'elle n'a pas de réponse. Et de préciser qu'elle a quitté Sonatrach en 2010. Est-ce que son départ avait une relation avec l'éclatement de l'affaire ? Elle ne répond pas et continue à affirmer face aux questions de la défense relatives à la réglementation interne et l'audit interne, qu'elle ne sait rien. LE PAPILLON QUI ENFONCE L'EX-PDG MOHAMED MEZIANE Le juge Mohamed Reggad a questionné, ensuite, le témoin Faghouli Abdelhafid, vice-président du PDG et directeur de la direction aval d'Alger et d'Oran, sur les contradictions dans le mode d'octroi du marché de télésurveillance dans la direction aval et amont. Il lui a demandé d'expliquer pourquoi sa direction de l'aval avait respecté la directive R15 A 408 en lançant un appel d'offres national et international ouvert pour le marché de la télésurveillance, qui concernait 3 complexes gaziers d'Arzew et un complexe à Skikda, alors que la direction amont avait signé les contrats de gré à grés en octroyant 13 sites à Funkwerk ? Et de le lancer « est-ce que l'ex-PDG était moins influent sur l'aval que sur l'amont ? ». Et d'enchaîner « pourquoi le caractère urgent des projets concernait uniquement l'amont et non pas l'aval ? » Le témoin a précisé qu'au départ sa direction avait lancé un appel d'offres national et international ouvert pour sécuriser leurs sites et que le complexe d'Arzew avait déjà des cameras de télésurveillance, et que ces complexes sont encadrés du point de vue sécuritaire par la police, contrairement aux régions du Sud qui posent un problème de complexité en matière de sécurité. Mais, précise-t-il, on a voulu élargir cette sécurité au-delà des structures internes pour plus de sécurité. Et pour répondre aux directives du ministre qui nous a donné un délai pour sécuriser tous les sites. Il enchaîne en affirmant que l'entreprise (RPS) qui a été retenue suite à cet appel d'offres n'a pas respecté ses engagements, elle n'a pas pu poursuivre les travaux. Et d'affirmer qu'ils ont procédé à la résiliation du contrat en informant l'ex-PDG de la Sonatrach qui ordonna le recours à la consultation restreinte. Il affirme qu'il avait reçu un papillon de la part de Mohamed Meziane, sur lequel est mentionné le nom de l'entreprise Contel Funkwerk et la carte de visite d'Al Ismail Réda Djaffer, patron de Contel Funkwerk. Le témoin précise que sur les quatre entreprises soumissionnaires, l'offre du groupement Contel Funkwerk était trois fois plus chère que les trois soumissionnaires. Il dira « j'étais surpris ». Et de souligner qu'il avait demandé à Funkwerk d'aligner ses prix par rapport au reste des soumissionnaires, mais cette dernière avait refusé, elle s'est contentée d'une baisse de 10% seulement. Faghouli Abdelhafid a affirmé qu'il avait sollicité sa direction d'audit pour faire une analyse des prix pour ne pas exclure Funkwerk sans raison justifiée. Et c'est ce qui a été fait, Funkwerk n'a eu aucun contrat ni à Arzew, ni à Skikda. Le juge conclut « donc la direction aval, et la direction commerciale et même la direction audit que vous dirigez ont tout simplement fait leur travail conformément à la réglementation, en respectant la R15 A 408 et la publication de l'appel d'offres, l'avis, l'offre et l'entreprise retenue sur le Boesem contrairement à la direction amont ». Faghouli a expliqué à la défense le bien-fondé de la directive R15 A408. Il précise que Sonatrach a inscrit rien qu'en 2009, 170 projets d'envergure qui se chiffrent en milliards, « La R15 impose l'appel d'offres ouvert et favorise le moins-disant, pour préserver les ressources de Sonatrach ». Et d'enchaîner « si on avait favorisé le gré à gré et le mieux-disant, certains soumissionnaires vont nous imposer des offres à coûts forts en l'absence de concurrence ». Interrogé par la partie civile pourquoi il n'avait pas évalué le préjudice occasionné par ces contrats, en tant que vice-président du PDG, il répond « cette initiative devait venir du PDG de Sonatrach, par le fait qu'il a été nommé par décret présidentiel ». |
|