« Durant les
années 80, on comptait près de 2 800 fabricants et artisans de chaussures, mais
aujourd'hui, ils ne sont que 80 qui luttent toujours pour sauvegarder cette
profession très noble. Le moins que l'on puisse dire, est que ce métier est
menacé de disparition si rien n'est fait à court terme.
Les fabricants et artisans ont d'énormes difficultés, parmi-elles, les charges
fiscales et parafiscales. Normalement, l'imposition fiscale n'a pas lieu d'être
dans le métier de la
chaussure et la cordonnerie, car le processus de la fabrication de la chaussure ou de la semelle est très compliqué
et requiert une collaboration étroite entre le Sanaâ, Mouawene, Mtaalam, Khiat,
styliste de la chaussure
et autres intervenants qui doivent tous être payés soit à la tâche, soit au travail accompli
bien même avant l'opération de vente des chaussures. Il y a aussi la malfaçon, le marché parallèle
et les produits importés notamment de la chine. Savez-vous
que l'importation anarchique de la chaussure de très mauvaise qualité a causé
beaucoup de maladies dermiques. Tout ce que l'on veut c'est l'interdiction de
ces produits dégradés qui nuisent à la santé des gens. Il ne faut autoriser que
l'importation de chaussures de bonne qualité. Actuellement, il existe de 80
millions de paires dans les magasins ou en stock alors que les besoins ne sont
que de 20 millions de paires annuellement, le marché algérien est donc saturé.
Il est urgent de revoir la
réglementation en vigueur et nous donner la possibilité de
travailler en fonction de la
bourse du citoyen démuni et moyen. En outre, la fabrication de la chaussure est très
dépendante de l'importation des intrants et qui nous reviennent très chers !
D'où la dégradation de
la qualité,
de la compétitivité
et des délais. On ne peut pas tenir tête à la concurrence déloyale
qui a tout le temps constitué une bête noire pour les professionnels du secteur
par rapport au produit fini étranger», c'est un cri d'alarme qu'a lancé hier à
notre journal Benmaâmar Mohamed, président de la commission des fabricants
et des artisans de la
chaussure ?'El-Mansourah'' qui active sous l'égide de la chambre de commerce et
d'industrie (CCI-Tafna). Et d'ajouter : «Le bénéfice dégagé par le patron n'est
même pas égal à celui qui revient au Sanaâ, du fait des charges fiscales et
parafiscales, la cherté de
la matière première,
les frais de la main-d'œuvre
et du vernissage, le créateur de la
forme, le styliste... Ce qui pose un grand problème pour les
fabricants et artisans qui ne sont même pas en mesure de s'acquitter de leurs
cotisations au niveau de la
Casnos, surtout dans les circonstances actuelles difficiles.
Tout le monde sait que l'ouvrier ne remplit que rarement ses heures de travail
et ne travaille pas les huit heures, ce qui influe sur le rendement. Il est
rare où un fabricant produit plus de 60 paires par jour. L'artisan à peine 12
paires. C'est ça la réalité,
et ils sont nombreux qui ont fermé et sont en train de chercher ailleurs. Avec la cherté de la vie, personne ne peut tolérer
cette situation catastrophique. Nous lançons un appel aux pouvoirs publics de
sauver ce métier de l'anarchie. Il faut à notre avis un nouveau statut pour
pérenniser cette profession. Quant à nous, nous sommes prêts à rehausser la production nationale,
faire apprendre ce métier aux jeunes pour assurer une relève et pourquoi ne pas
exporter nos produits à l'étranger». Au moment où les prix des barils de
pétrole poursuivent leur chute, il est temps pour les pouvoirs publics de mobiliser
tous les efforts pour préserver cette richesse, représentant l'identité
culturelle de nombreuses régions du pays, qui a malheureusement tendance à disparaître.