Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Congrès d'Oran sur la paix et la sécurité en Afrique : Le continent noir aspire à mieux

par Houari Saaïdia

A peine les leaders africains se sont-ils mis autour de la table ronde pour reprendre l'ordre du jour -en passant au mode huis clos- en présence de Lakhdar Brahimi en sa qualité de membre du Groupe des Sages de l'Union africaine, que Ramtane Lamamra s'est extirpé par une porte latérale, accompagné par son homologue angolais, George Chicoty.

Destination : une salle à côté, aux accès bien surveillés. Moins d'une demi-heure plus tard, la grande porte à double volet s'ouvre. Contre toute attente, les journalistes sont invités à un point de presse commun Lamamra/Chicoty. Le décor est planté en à peine trois petites minutes. Règles de bienséance exigent, c'est l'invité, le MAE angolais, qui se prête en premier au jeu des questions-réponses. En hôte avisé, il commence par situer le rendez-vous d'Oran dans son contexte. A savoir : « un évènement d'autant important que l'Afrique se retrouve devant l'impérieuse nécessité d'avoir une seule voix devant le Conseil de sécurité de l'ONU ». Et le chef de la diplomatie de l'Angola, pays membre élu pour un mandat biennal au Conseil de sécurité des Nations unies depuis le 1er janvier 2015 et ce pour la seconde fois après 2003-2004, d'ajouter : « Cette initiative (le congrès d'Oran sur la paix et la sécurité en Afrique : Ndlr) est fort importante car on n'a jamais eu la possibilité de le faire auparavant, c'est-à-dire de faire en sorte que l'Afrique soit représentée d'une seule et unique voix par le biais du A3 (les trois pays du continent africains membres non permanents au Conseil de sécurité : Ndlr). Et si l'Afrique aura une seule et unique voix au Conseil de sécurité, elle sera davantage respectée ». Un peu plus tard, à la question posée par le Quotidien d'Oran selon laquelle « cette nouvelle approche d'unification des positions des trois pays africains membres du Conseil de sécurité, du moins sur les dossiers propres au continent qui se taillent les 2/3 de l'agenda de cette structure principale de l'ONU, ne sous-entend-elle pas qu'il y avait jusque-là une non-cohérence, voire divergence, au sein du A3 et par extension au sein du continent ? », George Chicoty a reconnu sans détour cet « état de fait », précisant que « c'est donc pourquoi nous sommes là aujourd'hui ».

Faisant une corrélation avec ce sujet et les relations bilatérales entre l'Algérie et l'Angola, M. Chicoty qualifiera d'« excellents» les rapports algéro-angolais, rappelant à ce propos que « l'Algérie a joué un grand rôle dans la guerre de l'Indépendance de l'Angola et que son pays libre et indépendant est solidement lié à l'Algérie, depuis plusieurs années, par un accord de coopération bilatérale. Il a fait savoir, dans ce même registre, qu'il allait effectuer, courant mars 2016, une visite officielle en Algérie, pour «approfondir les relations bilatérales». Cependant, il a reconnu que le niveau de ces relations, sur le plan pratique, reste malheureusement « un peu en deçà de ce qu'il doit être ».

SAHARA OCCIDENTAL, « LE REFERENDUM D'AUTODETERMINATION EST LA SEULE SOLUTION »

A la question un peu récurrente dès lors qu'il s'agit d'un rendez-vous regroupant les leaders africains, la demande par l'Afrique d'un siège permanent au sein du Conseil de sécurité, le MAE angolais a indiqué, en substance, que toute l'Afrique est engagée dans cette perspective de réforme du système des Nations unies, particulièrement son Conseil de sécurité. « On ne peut qu'émettre, une fois encore, le vœu de voir les propositions formulées au temps de l'ancien SG de l'ONU se traduire en faits ». Selon le même ministre d'Etat angolais, ce projet au fond duquel il existe une « injustice historique » vis-à-vis de l'Afrique qui la prive du droit légitimement revendiqué de siéger au Conseil de sécurité de l'ONU en tant que membre permanent jouissant du droit de veto, en plus de l'élargissement des sièges des membres non permanents à plus de 10 membres élus par l'AG chaque deux ans, « pourrait se réaliser dans une dizaine d'années ».

Interrogé, par ailleurs, sur le dossier du Sahara occidental, le conférencier, en sa « double » qualité de MAE de l'Angola, pays membre de l'UA, et membre non permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, a affirmé que « la position officielle et inchangée de l'Union africaine est connue, à savoir : pour l'autodétermination comme droit légitime et indiscutable du peuple sahraoui et seul règlement définitif et permanent du conflit ». Regrettant que certaines voix de chefs d'Etats soient sorties de cette ligne officielle de l'UA, il a émis le message que « la position de l'ONU doit être en phase avec cette ligne, la seule valable, pour la mise en place d'un référendum ».

L'ARMEE DE L'AIR ALGERIENNE PARTICIPE A DES MAN?UVRES MILITAIRES EN AFRIQUE DU SUD

De son côté, le MAE algérien, Ramtane Lamamra, a fait savoir qu'entre autres thèmes débattus lors de sa conversation avec son homologue angolais, la conjoncture de la dégradation du marché pétrolier. Tout en rappelant que l'Angola, au même titre que l'Algérie d'ailleurs, dépend essentiellement des hydrocarbures, il a dévoilé une démarche commune algéro-angolaise, en coordination avec d'autres pays producteurs de gaz et de pétrole, « visant à ramener le prix du baril du pétrole à un niveau satisfaisant ». S'agissant de la lutte contre les fléaux qui frappent de plein fouet le continent noir, comme le terrorisme, le trafic de drogue et autres crimes transfrontaliers, M. Lamamra a souligné qu'il y a beaucoup d'actions préventives et répressives entreprises par l'Afrique en ce sens, dont Afripol fraîchement installé n'en est qu'un exemple. Il a tenu à préciser que le problème ne réside pas dans le support législatif et juridique, ni sur le plan régional ni à l'échelle internationale, mais plutôt dans les aspects opérationnels.

Dans un chapitre annexe, M. Lamamra a révélé que les forces armées aériennes de l'Algérie ont participé, il y a quelques jours, à des manœuvres militaires mixtes regroupant, pour la première fois dans l'histoire du continent, des unités militaires de nombreux pays africains, ayant eu pour cadre l'Afrique du Sud. Ces manœuvres militaires de grande envergure, a-t-il ajouté, organisées sous l'égide du Conseil de paix et de sécurité de l'UA, a eu lieu dans le cadre de la mise en œuvre de dispositif dit la « Capacité africaine de réponse immédiate aux crises ». Dans ce test grandeur nature pour la vérification et en même temps le perfectionnement de la capacité de riposte, de mobilisation et de déploiement des forces africaines face à un danger, l'ANP a joué un rôle central via son armée de l'air, et en particulier, ses escadrons de transport aérien, qui ont acheminé les unités militaires de plusieurs pays africains, notamment de l'Afrique de l'Ouest, vers l'Afrique du Sud.