Les chefs d'Etat et de gouvernement européens ont reconduit les sanctions
contre Moscou lors du Sommet de jeudi et vendredi à Bruxelles. Au même moment,
Moscou a voté au Conseil de sécurité de l'Onu une résolution en faveur d'un
processus de paix en Syrie.
Le Danemark veut dépouiller les réfugiés rescapés de guerre qui arrivent
sur son sol de leurs bijoux, argent et toute autre valeur marchande.
L'Autriche, la Hongrie,
la Slovaquie,
la Slovénie
ont construit des murs de barbelés parfois électrifiés pour freiner des femmes
et des enfants et aussi les hommes fuyant la guerre qui débarquent épuisés à
leurs frontières, l'Espagne en précurseur a érigé depuis longtemps des
barrières mortelles à Ceuta et Melilla, la France a redéployé sa police des frontières et sa
douane à ses frontières et appelle à la révision du traité de Schengen de libre
circulation dans l'Union européenne, la Grande-Bretagne
demande un statut particulier au sein de l'Union européenne sinon elle la
quitte? et le Conseil européen de jeudi et vendredi a diffusé un communiqué par
lequel il appelle à plus d'Europe. Chaque pays de l'Union fait ses « siennes»,
enfreignant au grand jour le contenu du traité de l'Union, puis lorsque les 28
chefs d'Etat et de gouvernement se retrouvent à Bruxelles, ils affirment qu'ils
progressent dans l'intégration européenne malgré quelques divergences de forme,
sans grande importance, disent-ils. La diplomatie a ses secrets que le commun
des citoyens européens ignore. Tactiquement, le Sommet européen de jeudi et
vendredi a fait fort : le projet de la mise en place d'un corps commun de
gardes-frontières terrestres et maritimes proposé par la Commission a été
accepté par tous et remis à discussion pour le mois de juin 2016. Quant à
l'accord avec la Turquie
pour qu'elle endigue chez elle les réfugiés de guerre contre l'ouverture de
négociations pour son intégration à l'UE plus un chèque de trois milliards
d'euros, il faut attendre de voir pour l'entamer dans les faits. En fait, il
faut que le flot de réfugiés cesse côté turc pour entamer les négociations et
libérer le chèque. Entre-temps et ailleurs à l'Onu, le Conseil de sécurité a
adopté au moment où se tenait le Sommet de Bruxelles, une première résolution
pour un cessez-le-feu en Syrie et l'ouverture d'un dialogue entre l'opposition
(les oppositions) syrienne et le régime de Bachar El-Assad. On ne sait pas si l'Organisation de l'Etat
islamique fera partie de l'opposition est sera invitée à la table des
négociations, parce que la résolution du Conseil de sécurité parle de
l'opposition sans nommer sa « diversité». On ne sait pas aussi si le front Al-Nosra en fera partie. Là aussi, la magie de la
diplomatie onusienne fait des miracles. Y compris pour « l'avenir» de Bachar El-Assad et sa famille,
puisque la résolution ne dit pas clairement qui va gérer la période de
transition qui devra aboutir à des élections libres et démocratiques : une
équipe de diplomates internationaux ? Le régime de Bachar
El-Assad ? Ce dernier et des représentants des
différentes factions de l'opposition sans exclusive ? On se rappelle que les
deux conférences de Genève (juin 2012 et janvier 2014) ont été un échec en
raison du refus absolu de l'opposition de voir y participer le régime de Bachar El-Assad. Faut-il espérer
un miracle cette fois-ci ? Croisons les doigts pour qu'au moins le
cessez-le-feu ait lieu en ce début de janvier comme édicté par la résolution
onusienne. Peut-être que les civils syriens seront moins tentés par
l'émigration vers l'Europe qui verra ses disputes internes sur cette question
s'atténuer. Cependant, l'Europe continue dans sa confrontation stratégique avec
la Russie : le
Sommet de Bruxelles a voté pour une prolongation de six mois (juin 2016) le
train de sanctions commerciales contre la Russie en raison de son attitude face à
l'Ukraine. Mais pas que, puisque Moscou est maintenant totalement impliqué dans
la guerre en Syrie et maintient son soutien au régime syrien. Conséquences :
par quelle prestidigitation diplomatique l'Europe va convaincre la Russie pour exclure Bachar El-Assad ou ses
représentants d'être partie prenante dans la période de transition politique en
Syrie ? L'Europe comme les USA ne peuvent solliciter l'aide de la Russie dans la résolution
de la guerre en Syrie et voter contre elle des sanctions commerciales et
financières en raison de la question ukrainienne. Le président russe a démontré
son habilité et sa volonté de ne pas laisser son pays enfermé dans le chantage
occidental pour céder, par ailleurs, à la logique des Occidentaux dans la
question syrienne. Pour Moscou, les deux questions syrienne et ukrainienne
(ainsi que l'Abkhazie et l'Ossétie) obéissent à une logique géostratégique
globale face au camp occidental. Vladimir Poutine a les moyens de résister au
jeu des Européens et aux USA. Ces derniers, les USA, ont largement les moyens et
ne sont point touchés par la crise diplomatique Europe-Russie.
En revanche, l'Europe subit déjà les conséquences de cet « affrontement» avec
les Russes. L'Union européenne vacille, tangue et se craquelle de l'intérieur
au point où même les Sommets à Bruxelles n'arrivent pas à colmater les brèches
et aboutissent à des conclusions vagues, voire inutiles.