On n'en finit plus de payer l'aventurisme guerrier des Français qui ont précipité
l'Afrique et le monde arabe dans l'enfer terroriste des groupes armés. La chute
de Kadhafi, l'intervention armée au Mali et une ambiguïté toute française en
face du dossier syrien ont mené la région vers le précipice. Après les
attentats de Paris, les groupes terroristes ont frappé à Bamako, pourtant
sécurisée par Barkhane. Après l'attaque de l'hôtel Radisson à Bamako,
revendiquée par le mouvement al-Mourabitoune, le
groupe jihadiste de Mokhtar
Belmokhtar, qui a fait au moins 21 morts (dont treize
étrangers), le Mali a décrété dix jours d'état d'urgence ainsi qu'un deuil
national de trois jours. La prise d'otages a fait, selon le bilan donné par le
président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, 21 morts, dont deux assaillants, et
sept blessés alors que trois suspects sont «activement recherchés». Parmi les
pays endeuillés, la Russie
(six), la Chine
(trois), les Etats-Unis d'Amérique (un), la Belgique (deux) et le Sénégal (un) en plus des
victimes maliennes (six). L'attaque du palace bamakois était-elle prévisible ?
Oui, le Mali est une cible des groupes armés vaincus mais non chassés du Nord
malien et qui gardent encore toute leur puissance de nuisance. La prise
d'otages à Tiguentourine revendiquée par le même Belmokhtar en est un exemple frappant. En octobre dernier,
le chef du groupe jihadiste Ansar
Dine, allié d'Al-Qaïda au
Maghreb islamique (Aqmi), Iyad
Ag Ghaly, dénonçait, dans
un enregistrement, l'accord de paix signé entre Bamako et la rébellion et
appelait à frapper la France
«croisée». Autant d'indices qui présupposaient d'une imminente action
terroriste d'envergure au Mali d'autant plus que les services de sécurité
locaux ne sont pas suffisamment outillés pour faire face aux groupes armés. La France qui se dit visée, de
par son rôle dans sa guerre déclarée contre un certain terrorisme, n'est plus à
l'abri des frappes des hommes d'Aqmi au Sahel qu'ils
ont financés à travers le paiement des rançons. Cette attaque repose avec
acuité la pertinence de la présence des troupes françaises dans la région puisque,
près de trois ans après le déclenchement de l'opération militaire Serval, le
Mali est toujours confronté aux groupes jihadistes.
En 2012, à l'origine d'une insurrection dans le nord du pays, les rebelles
touaregs du MNLA se sont fait déborder par leurs alliés, des groupes islamistes
armés : Aqmi, le Mouvement pour l'unicité et le
djihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) et Ansar Dine. Après avoir pris le
contrôle du nord du pays où ils ont mis en application leur conception
totalitaire et ultra rigoriste de l'islam, les hommes en noir ont menacé le sud
du pays. En janvier 2013, la
France a lancé l'opération Serval destinée à stopper leur
avancée vers la capitale Bamako, et, dans un deuxième temps, à reprendre le
contrôle du Nord. Les forces françaises assistées de forces africaines ont
repris les grandes villes du Nord en quelques mois. En juillet 2014,
l'opération Serval cède la place à la force franco-africaine Barkhane, une
opération plus large de lutte contre le jihadisme
avec 3.000 soldats français mobilisés dans cinq pays du Sahel. Les Français
justifient leur semi-échec par la géographie de la
région et l'immensité de la zone désertique au nord du Mali. Pour rappel, avant
même l'attaque de l'hôtel, et en août dernier, 13 personnes ont été tuées lors
d'une prise d'otages dans un hôtel de Sévaré, au nord
du pays.
Cinq mois plus tôt, un attentat avait frappé un café de Bamako causant la
mort de 5 personnes dont un Français. Cette attaque avait été revendiquée aussi
par Mokhtar Belmokhtar.