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Le double attentat suicide de Beyrouth, qui a fait au
moins 44 morts et plus de 250 blessés jeudi à une heure de pointe, résonne
comme une inquiétante guerre des franchises terroristes au Liban. Le fait que
l'attentat ait été perpétré dans la partie chiite de la capitale libanaise,
de surcroît dans un quartier hyper-protégé du Hezbollah, serait un message clair
à ce parti qui a entre 3.000 et 4.000 combattants engagés en Syrie aux côtés de
Bachar Al Assad.
L'attentat, qui a été revendiqué très rapidement par la branche libanaise de l'Etat islamique (Daech), prélude à autant de batailles violentes et tout aussi sanglantes sur le sol libanais que d'une lente dérive de la violence armée au Liban. Il serait même tentant, estiment des experts des mouvements terroristes, de dire que le Liban est en train d'être happé, par les attentats terroristes, vers la guerre civile en Syrie où plusieurs franchises terroristes s'affrontent. Or, si le front Al Nosra, la franchise d'Al Qaïda en Syrie n'a pas réussi à s'implanter au Liban ni avoir de la popularité qu'ont réussi à avoir les groupes sunnites autoproclamés de l'EI dans les quartiers sud de Beyrouth, la première explication du double attentat de jeudi à Beyrouth est une sorte d'avertissement à Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, engagé aux côtés des troupes du régime de Damas à Idleb, Hama et Alep. Récemment, Nasrallah avait déclaré que « la présence du Hezbollah en Syrie est plus importante que jamais, qualitativement, quantitativement et en matière d'équipements ». Réponse violente de l'EI contre le Hezbollah, accusé par cette franchise terroriste de poursuivre et de faire arrêter ses « hommes » au Liban et de les combattre en Syrie ? «L'attentat dans la banlieue sud de Beyrouth revêt une forte portée médiatique, alors que l'EI recule sur plusieurs fronts, à Raqqa, Hassake ou Alep», estiment des politiques libanais qui ne sont pas loin de penser que la guerre civile en Syrie en particulier et l'instabilité sur fond de violences armées dans la région sont en train de tenter un passage en force au Liban, où sur la dizaine d'attentats perpétrés entre 2013 et 2014, un seul seulement avait été revendiqué par la branche alépine de l'Etat islamique. Faut-il s'en inquiéter ? Assurément, car cette attaque de front de l'EI contre le Hezbollah a également d'autres grilles de lecture, dont celle de museler le Hezbollah, le faire sortir de Syrie et l'occuper à résoudre des questions d'intendance sécuritaire de son fief beyrouthin, loin des questions de fond qui minent l'Orient. Autant Israël que les Américains verraient d'un bon œil un affaissement de la force de frappe dans la région du Hezbollah, qui a réussi à lui tout seul à sécuriser une bonne partie du Liban contre les terroristes, mais également tenir à distance les velléités hégémoniques d'Israël dans la région. Un Hezbollah affaibli serait également du pain béni pour les monarchies du Golfe qui prendraient ainsi une revanche morale contre l'Iran et les chiites en général, quitte à donner, par contre, plus d'arguments à tous ceux qui désespèrent de voir l'Orient enfin pacifié. Même si les « barbouzes » ne quitteront jamais une région par où transitent plus de 45% du pétrole consommé dans le monde. |
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