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Dans un marché
national d'assurances dominé par la branche automobile, créneau juteux mais
trop prisé, le changement de cap opéré par le gouvernement dans sa politique
économique pour faire face au choc pétrolier constitue une belle opportunité
pour les compagnies d'assurances et de réassurance.
Faisant l'objet d'un intérêt gouvernemental sans précédent sur fond de baisse drastique des recettes d'hydrocarbures, les PME/PMI sont plus que jamais lorgnées du coin de l'œil par les assureurs. Ces derniers veulent profiter de l'actuel contexte politico-économique pour mettre en avant la nécessité et l'intérêt pour les opérateurs économiques de (bien) s'assurer. Il s'agit là pour les assureurs d'une occasion « inédite » pour recruter un maximum de clients potentiels et ce, dans un pays où la culture d'assurance reste rudimentaire. De même que, il faut le dire aussi, de l'autre bout du comptoir, le service offert est de qualité très en deçà de la moyenne. La SAA, compagnie d'assurances n°1 en Algérie avec des fonds propres de plus de 30 milliards de DA et une part de marché de 23%, a été la première à se lancer dans cette campagne à mi-chemin entre marketing et action de sensibilisation à destination des entreprises économiques publiques et privées, de différentes pointures, tous secteurs confondues. En effet, le staff dirigeant de cette compagnie, devenue EPE-SPA dès la dissolution des fonds de participations avec, aujourd'hui, un capital social appartenant à 100% au Trésor public, conduite par son PDG, Nacer Saïs, ratisse large dans le milieu entrepreneurial, avec comme objectif : améliorer les autres produits hors-automobile (lesquels ne représentent que 22% du portefeuille de la SAA), notamment ceux liés aux activités économiques. Hier mardi, une autre action à portée régionale du plan SAA, a été menée à Oran, sous le papier plutôt «générique» : séminaire sur le management et l'assurance des risques au sein d'une entreprise. En marge des travaux, à la question posée par le Quotidien d'Oran, voulant connaître les raisons de la prédominance du risque automobile à hauteur de 78% du portefeuille de la SAA, le président-directeur général de cette compagnie a, tout en contournant le vrai sujet de la question, essayé de relativiser : « En fait, les autres 22%, ce ne sont pas du rien. Ça représente quelque 5,83 milliards de DA du chiffre d'affaire de 26,5 MDA de la SAA pour l'année 2014, soit 3,2% par rapport à l'année d'avant 2013 et 23% par rapport au chiffre d'affaires réalisé par le marché ». Cependant, selon les versions convergentes de plusieurs chefs d'entreprises approchés en marge de la rencontre, il ressort que les PME-PMI, confrontées à une détérioration de l'accès au crédit bancaire, principalement, elles explorent d'autres sources de financement possibles telles que la mobilisation de réserves, l'autofinancement et l'affacturage et font le plus souvent de l'auto-assurance en mettant en place un compte spécial dans lequel elles puisent pour réparer leur matériel affecté par tel ou tel sinistre, naturel ou le fait d'un incident technique ou d'une négligence humaine. « Une bien mauvaise idée », réplique Omar Akchiche, expert-conseiller auprès de la SAA. « En faisant de la sorte, vous allez mettre de côté de l'argent qui probablement ne servira à rien. Tant qu'aucun incident ne se produira, ça restera de l'argent dormant. Et puis, il y a le fisc qui vous taxera toujours. Allez-y dire au fisc que cet argent c'est pour couvrir les risques ! Il ne cherchera pas à comprendre». GESTION DES RISQUES : TALON D'ACHILLE DES ENTREPRISES Entre autres « failles » évoquées et qui sont en partie à l'origine du recours fort modéré -pour ne pas dire juste quand il s'avère une obligation administrative, un pur élément exigé par la paperasse- des opérateurs économiques aux assurances, ce sont le manque de connaissance de la législation, la non maîtrise des risques et enfin le peu de développement d'actions de prévention. Le fait que ces risques soient encadrés réglementairement implique des obligations qui pèsent sur les PME/PMI en termes de mesures préventives et de protection contre ces risques. Le non-respect de ces obligations peut entraîner l'insolvabilité et la disparition des entreprises concernées, souligne-t-on. On fait savoir, par ailleurs, que la branche automobile continue à dominer le marché des assurances dans notre pays. Avec une part de 50 % dans la production totale, le créneau automobile est tout simplement essentiel pour l'activité des compagnies d'assurances en Algérie, et pour leur survie même. On souligne, cependant, que le risque obligatoire automobile (la responsabilité civile) est « déficitaire depuis longtemps ». Les dirigeants des compagnies d'assurances profitent de ce déficit bien réel pour revendiquer une augmentation des tarifs, omettant de signaler au passage que la branche automobile prise dans son ensemble est bénéficiaire et même très largement bénéficiaire. Une simple soustraction entre le chiffre d'affaires réalisé par la branche automobile des assurances et le montant remboursé aux clients dans le cadre des sinistres, montre que les compagnies d'assurances se retrouvent avec une marge de 15 milliards de dinars, en moyenne, ce qui représente plus d'un tiers du chiffre d'affaires. L'APPEL D'OFFRES : PASSAGE OBLIGE Dans le monde des affaires, une marge d'exploitation de 33% est loin d'être négligeable. Pour beaucoup d'industriels c'est même une « très grosse marge ». Il est clair que l'essentiel de l'activité des compagnies d'assurances en Algérie ainsi que leur résultat d'exploitation provient de la branche automobile. Elles ne pourraient tout simplement pas survivre sans cette manne financière. D'ailleurs, des compagnies multinationales ne s'y sont pas trompées. La dernière arrivée dans notre pays, AXA, a commencé ses activités avec le seul produit d'assurance automobile, révèle-t-on. Dans un autre registre, des critiques ont été émises par des responsables et des experts-conseillers de la SAA quant au recours par (la plupart) des entreprises publiques, et même des privés, à l'appel d'offres pour souscrire à une couverture d'assurance. « C'est ridicule ! », a commenté Omar Akchiche. « Le produit assurance, ça n'a rien à voir avec un produit fourniture. Ce dernier, on le touche, on en vérifie la conformité au bon de commande, au cahier des charges. Mais en matière d'assurance, tout soumissionnaire pourra vous vendre des promesses, à bas prix. Mais, le jour du sinistre, et c'est ça l'essentiel, tiendra-t-il ses engagements ? Serez-vous remboursés au tarif convenu, dans les meilleurs délais ? Son assureur, on le choisit directement sur la base de critères, dont sa crédibilité et sa solvabilité, via un contrat aux clauses négociables. Mais jamais via une mise en concurrence privilégiant le moins- ou le mieux-disant ». Ce à quoi, des chefs d'entreprises publiques ont répondu, en substance, qu'ils faisaient cela malgré eux ; qu'ils étaient poings et mains liés, pour la simple raison que le code de marchés publics les y obligeait. |
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