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Le mauvais timing d'une volonté de renégocier

par Kharroubi Habib

De l'accord d'association signé entre l'Algérie et l'Union européenne en 2002 et mis en œuvre en septembre 2005, les autorités algériennes ont principalement attendu qu'il provoque un afflux d'investisseurs européens dans le pays. A l'époque, l'Algérie n'avait pas encore l'aisance financière qu'allait lui procurer le surenchérissement exceptionnel des prix du pétrole et a misé sur une coopération avec l'Europe dont elle a espéré qu'elle se traduirait par une contribution d'importance au développement du pays.

Ses autorités ont donc négocié et signé l'accord d'association en question, même en sachant que le contexte dans lequel elles l'ont fait était défavorable à l'Algérie, ce qui les obligeait à accepter des clauses et dispositions voulues par la partie européenne qui ont été dénoncées à juste titre par des acteurs politiques, économiques et sociaux algériens comme incompatibles avec les intérêts nationaux et la preuve flagrante que l'Union européenne a dicté un contrat léonin au pays dont il ne fallait attendre rien de bénéfique pour son économie et son développement. Les autorités algériennes signatrices de l'accord avaient alors fustigé sans ménagement les voix qui s'étaient élevées contre l'accord et prétendu que l'association conclue avec l'Union européenne a été réalisée sur la base du principe du «gagnant-gagnant».

Dix ans après le début de la mise en œuvre de cet accord, les autorités algériennes ont enfin convenu que le pays n'a pas tellement bénéficié de l'association qu'il a contractée avec l'Union européenne et surtout qu'elle n'a pas provoqué l'afflux d'investisseurs de cette zone sur lequel elles ont tablé de façon hasardeuse.

Sans aller jusqu'à le remise en cause de l'accord d'association décevant pour le pays en ses résultats, elles ont officiellement demandé l'ouverture de discussions sur «une évaluation conjointe objective» de sa mise en œuvre. Ce qu'elles auraient dû demander quand le pays s'est trouvé en position de force pour le faire assuré qu'il était de mettre sur la table de négociations les atouts qui étaient sa situation financière dont l'opulence avait un attrait irréfragable pour les économies européennes en berne de croissance et son marché intérieur dopé par elle auxquels s'ajouteraient ceux dont l'Algérie dispose du fait de sa situation géographique et du poids qui est le sien au plan régional et international.

A ne pas avoir bousculé l'Union européenne pour qu'elle revienne à la table des négociations alors que le pays avait cette position de force en question, les autorités algériennes risquent de se retrouver face à des interlocuteurs européens dont l'intransigeance à l'égard de leur demande de reconsidération des clauses et dispositions de l'accord d'association se fera encore plus arrogante et sans concession. La crise pétrolière impacte sévèrement l'économie et les finances de l'Algérie. Ce qui contraint à nouveau ses autorités à s'accrocher à la «planche de salut» qu'elles pensent voir dans de conséquents investissements européens en Algérie.

Cette illusion, les négociateurs européens qui sont tout sauf de désintéressés philanthropes, l'entretiendront auprès de ces autorités pour peut-être leur soutirer encore plus d'avantages au profit des économies de leur zone. Si elles ont réellement l'intention de renégocier l'accord d'association avec l'UE, il est patent que les autorités algériennes ont laissé se refermer la fenêtre temps dans laquelle elles pouvaient le rééquilibrer au profit du pays.