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Quelques leçons du conflit syrien

par Moncef Wafi

Que nous apprend le conflit en Syrie ? La guerre civile alimentée par les Français et les Américains a mis à genoux l'un des pays forts du Proche-Orient, accusé par les Occidentaux d'être l'un des alliés du Hezbollah libanais et un relais des Iraniens dans la région. La propagande anti-Al-Assad a contribué à légitimer une guerre qui a favorisé la présence militaire des hommes de Aboubakr Al-Baghdadi, tolérés dans un premier temps par Paris et Washington, pour peu qu'ils fassent tomber le régime de Damas.

L'exode massif des réfugiés syriens vers l'Europe n'a atteint ces proportions qu'avec l'arrivée de Daech au pays et ses crimes innommables commis contre les populations locales. L'Europe qui se plaint aujourd'hui de ces réfugiés, l'Europe qui leur ferme ses frontières doit être jugée pour non-assistance à pays en danger. C'est cette même Europe qui chipote sur le nombre de réfugiés à recevoir chez elle, alors qu'il y en a deux millions en Turquie, qui est responsable de cette situation. Les Occidentaux, la France en tête de pont, et la logistique américaine aidant, ont précipité la Syrie dans le 19e siècle comme ils ont démembré l'Irak et la Libye.

Pourtant, l'équation syrienne est devenue à deux inconnues puisque outre les réfugiés, dont beaucoup d'anciens combattants des factions islamistes en guerre contre Al-Assad, la Russie de Poutine a décidé de s'impliquer directement dans le conflit. Une intervention préventive qui, dit-on, aurait mis fin brutalement à un plan d'invasion de la Syrie dirigé par Paris et Washington. La donne russe a de nouveau redistribué les cartes dans la région et Al-Assad n'est plus cet homme aux abois dont la capitale est le dernier bastion. Moscou qui n'a jamais caché sa présence militaire en Syrie, à travers ses instructeurs et des livraisons d'armes, veut mettre fin à l'hégémonie de l'OTAN en Méditerranée et à la logique de force des Etats-Unis d'Amérique et de ses vassaux européens.

Moscou évoque même l'envoi de troupes au sol pour combattre Daech aux côtés d'une coalition qui comprendrait également l'Iran et l'armée gouvernementale syrienne. Une proposition qui mettrait les Occidentaux devant le fait accompli, eux qui veulent défaire un ennemi complaisant par les airs. La présence de l'Armée rouge dans la région, en plus de nourrir les craintes de l'OTAN, a obligé certaines capitales à revoir leurs calculs. Par intérêt et pour mettre fin à l'arrivée des réfugiés. Paris, l'un des pires ennemis d'Al-Assad, a changé de ligne de mire annonçant, par le truchement de son ministre de la Défense, que le véritable ennemi c'est Daech, «Bachar Al-Assad est l'ennemi de son peuple».