Le
mécontentement des auxiliaires médicaux en anesthésie réanimation (AMAR) du
service de neurochirurgie de l'hôpital d'Oran couve depuis plusieurs semaines
et risque de s'amplifier si rien n'est entrepris par la direction de cet
établissement pour régler ce conflit interne qui tend désormais vers le
pourrissement.
Les délégués
des huit AMAR de ce service, qui s'étaient déplacés à deux reprises à notre
rédaction, dénoncent des «pressions exercées à leur encontre par leur
hiérarchie pour la prise en charge péri-opératoire (avant, pendant et après
l'opération chirurgicale) des patients et ce, sans assistance médicale
permanente et notamment durant les gardes». «Nous sommes des infirmiers diplômés
d'Etat avec une formation de bac+3. Nous sommes contraints d'accomplir des
actes médicaux spécialisés à commencer par la préparation des malades à opérer,
le suivi durant l'acte médical et le post-opératoire. Aux yeux de la
réglementation, nous exerçons la médecine illégalement et en cas de décès ou de
complications chez les malades nous risquons la prison», regrette ce délégué
des concernés. Il ajoute que bon nombre de ses collègues ont été traduits en
justice pour pratique illégale de la médecine à travers le territoire national.
Une autre déléguée lance en colère : «nous exigeons seulement l'application de
la procédure légale». L'article 6 du décret exécutif n° 11-235 du Aouel
Chaabane 1432 correspondant au 3 juillet 2011 portant statut particulier des fonctionnaires
appartenant aux corps des auxiliaires médicaux en anesthésie réanimation de
santé publique stipule que «les AMAR de santé publique bénéficient d'une
protection spéciale à l'occasion et durant l'exercice de leurs fonctions». Les
concernés soutiennent que le service de neurochirurgie dispose certes de
médecins réanimateurs, mais ces derniers exercent uniquement entre 8h00 du
matin et 16h00. «Durant les gardes médicales, nous sommes sans aucune
protection médico-légale. Il existe certes des médecins réanimateurs de garde
au niveau des services des UMC et du pavillon 5, cependant ils ont une grande
tâche de travail et refusent souvent de se déplacer pour nous assister. Nous
sommes généralement assistés durant les gardes par des femmes de ménage ou des
agents de sécurité», affirment les concernés. Et d'enchaîner : «nous avons
déposé 14 demandes d'audiences pour rencontrer le directeur général de
l'hôpital d'Oran, mais en vain. Nous sommes ballotés depuis plusieurs semaines
entre la direction générale et la direction des ressources humaines. Notre
syndicat a adressé un écrit au ministère de la Santé, mais sans suite.
Aujourd'hui, nous pouvons dire que toutes les portes ont été fermées et que
toutes les possibilités ont été épuisées». Les huit AMAR de ce service ont
déposé une demande de mutation collective vers un autre service de l'hôpital
d'Oran, mais cette demande est restée sans suite faute de remplaçants. A ce
propos, le chef de service de neurochirurgie, le professeur Bouchakour, affirme
que ces AMAR ont refusé d'accomplir leur travail. «C'est de la non assistance à
des personnes en danger. Vous trouvez normal qu'ils refusent de prendre en
charge une urgence ou des bébés en détresse ?», s'interroge notre interlocuteur
qui s'est considéré comme un «avocat» des malades en détresse. Il ajoute : «il
s'agit d'un simple conflit interne qui ne devait en aucun cas déborder en
dehors des murs de notre service. Ces AMAR ont déposé une demande de mutation
collective à laquelle j'ai donné un accord favorable avec remplaçant». Le chef
de service a qualifié le mouvement de ces AMAR de «chantage», tout en assurant
que ces auxiliaires sont chapeautés par tout un staff médical composé de
maîtres-assistants et de médecins spécialistes. Du côté de la DG de cet hôpital,
le chargé de communication assure que la DG a mis à la disposition de ces AMAR
«tous les moyens nécessaires pour accomplir leur travail dans des conditions
optimales». «Nous avons deux services de réanimation opérationnels. La garde de
nuit est assurée par trente (30) médecins réanimateurs», précise notre source
qui n'a pas écarté le recours à des mesures disciplinaires à l'encontre des
concernés. Le bras de fer entre ces AMAR et leur tutelle risque ainsi de durcir
dans les prochains jours et finalement, ce sont les malades qui risquent de
faire les frais de ce conflit interne dans cet hôpital.