La
wilaya de Tlemcen s'enorgueillit de disposer de nombreux monuments et sites
historiques et archéologiques et villages traditionnels, tout particulièrement
dans les régions à haute charge symbolique de Mansourah, Béni-Snous, Nedroma,
Honaïne, Ouled-Mimoun, Remchi et Tlemcen, dont certains ont été élus sur la
liste du patrimoine mondial de l'UNESCO pour leur valeur universelle
exceptionnelle. Depuis 2002, plusieurs opérations de restauration des biens
culturels immobiliers de ces localités ont été engagées dans le cadre de
différents plans de protection, sauvegarde et mise en valeur des secteurs
sauvegardés et des sites archéologiques établis par le ministère de la Culture,
selon des études réglementées à travers des cahiers des charges types et des
exigences particulières en matière d'intervention sur bâti protégé, auxquelles
se sont conaformés les bureaux d'études, entreprises et différents acteurs
chargés de ces opérations de protection du patrimoine archéologique et
historique. «Ces plans fixent les règles générales d'organisation, de
construction, d'architecture, d'urbanisme, d'occupation du sol, ainsi que les
servitudes d'utilisation du sol, notamment celles relatives à la détermination
des activités qui peuvent y être exercées dans les limites du site classé et de
sa zone de protection. Les sites archéologiques sont définis comme des espaces
bâtis ou non bâtis qui n'ont pas de fonction active et qui témoignent des
actions de l'homme ou des actions conjuguées de l'homme et de la nature, y
compris les sous-sols y afférents et qui ont une valeur historique,
archéologique, religieuse, artistique, scientifique, ethnologique ou
anthropologique », a expliqué dans ce cadre Brahim Chennoufi, conservateur du
musée de Tlemcen et chef de la circonscription archéologique de Tlemcen. Durant
l'évènement culturel «Tlemcen, capitale de la culture islamique en 2011», de
nombreuses actions de conservation et de protection de monuments et sites
archéologiques et historiques ont été réalisées. La mosquée Sidi Abdellah Ben
Djaâfar du village millénaire de Tafessera, dans la commune d'Azaïl (daïra de
Béni-Snous), a été retenue pour sa rénovation. Il s'agissait de travaux
préconisés par un bureau d'études d'Alger, en l'occurrence ACOGER, pour le
ravalement des façades, la réfection des enduits, la révision de la toiture et
sa mise hors eau. Lors des travaux de drainage des eaux au niveau de la cour de
cette mosquée, qui servait de moçallah lors des fêtes, il a été mis au jour une
trentaine de tombes musulmanes jamais soupçonnées auparavant. Mais
curieusement, une seule pierre tombale de ce lot portait une inscription
funéraire. Selon la jeune archéologue Abir Chennoufi, qui a été chargée par ce
bureau d'études de mener les travaux de fouilles archéologiques, cette
découverte fortuite concernait probablement la tombe d'une personnalité
distinguée ou ayant vécu hors du village de Tafessera, dont les habitants de
l'époque, très à cheval sur les préceptes de l'islam, enterraient leurs morts
dans des tombes ne devant jamais comporter d'inscriptions funéraires jusqu'à
une période récente. Les tombes ne devaient s'élever du niveau du sol que d'un
empan. La tradition orale rapporte que les mosquées des Béni-Snous ont été
fondées sur ordre d'Abdellah Ben Djafar, neveu du calife Ali et compagnon de
Okba Ben Nafî. Pour rappel, Tafessera est l'ancienne Estazil connue des
géographes et historiens dont Marmol de Carvajal (15e et 16e siècles). Elle
aurait été la capitale d'un royaume berbère dont serait issu Chachnak qui
aurait vaincu un pharaon d'Egypte, selon la légende dont la mémoire collective
commémore l'évènement à ce jour à travers le fameux carnaval Ayred à l'occasion
de chaque Yennayer (les 11, 12 et 13 janvier de chaque année). Durant cette époque,
Tafessera était réputée par les forges de métal du fer dans toute la région.
L'outillage et les instruments qui y étaient fabriqués s'exportaient aussi bien
vers le Maroc (pays voisin) et le Sahara. Le gros s'écoulait à Tlemcen et sa
région. Selon Brahim Chennoufi, le visiteur à Tafessera remarquera encore
autour de la vieille mosquée de Sidi Abdellah Ben Djaâfar, des grottes
abandonnées, ainsi que des habitations traditionnelles en pierres teintées de
violet et leurs belles cheminées typiques, mais hélas qui sont de plus en plus
remplacées par de nouvelles constructions sans goût, d'une architecture plutôt
éclectique, souvent sans aucune harmonie et ce, à cause de l'absence d'un plan
permanent de sauvegarde pour la préservation du patrimoine matériel et
immatériel de ce village et des agglomérations voisines de Tleta, Zahra et
Khémis, qui sont riches en patrimoines archéologiques et biens culturels légués
par les différentes civilisations de la préhistoire à nos jours. Selon Brahim
Chennoufi, une frange de la population de Tafessera et la région de Béni-Snous
et de Béni-Boussaïd sont des cousins d'une tribu berbère des Koumia, qui
régnait dans les monts de Fellaoucène et Nedroma. D'autres populations de cette
région de Béni-Snous sont issues des tribus des Zénètes qui sont les fondateurs
de plusieurs Etats berbères au Maghreb, en Europe et en Afrique.