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Selon une récente étude faite par les services du ministère des Sports, 35 stades seulement sur les quelque 1300 répartis à travers le territoire national sont dotés d'une pelouse en gazon naturel, les autrés sont revêtus en gazon synthétique tout au long de cette dernière décennie.
Autant dire que le gazon naturel est en voie de disparition en Algérie et ce, pour plusieurs raisons, notamment la sécheresse dans certaines régions du Sud, le manque d'entretien et la sur-utilisation. Cependant, et même si l'idée a été bien accueillie lors des années 90 en Algérie, elle a suscité bien des interrogations aujourd'hui à différents niveaux. Pour l'histoire, il faut retenir que les revêtements en gazon artificiel, inventés en 1964 en Amérique, ont révolutionné le monde du sport avec une promesse : il serait enfin possible de s'adonner au football sur une surface moins dépendante des conditions climatiques. Plusieurs paramètres ont contribué à l'intérêt porté à cette technologie. Avec les années et les critiques portées à leur égard, les terrains synthétiques ont évolué et sont aujourd'hui considérés comme une option sérieuse lorsque se pose la question de la création ou du remplacement d'un terrain. En Algérie, on estime unanimement que les pelouses synthétiques ne contribuent en aucun cas au développement du football, ni celui du niveau du joueur local d'ailleurs, dont la côte est au plus bas, contrairement aux années 70-80. A cet effet, l'ex-ministre des Sports, Mohamed Tahmi s'est fixé comme objectif de redonner aux pelouses en gazons naturel une place de choix en réponse aux exigences des instances internationales pour une pratique d'un football de haut niveau. En somme, l'interdiction de transformer les terrains en gazon naturel en surfaces synthétiques était inéluctable, à moins d'une dérogation des services concernés. Cependant, quelques mois après, la décision de Tahmi a été mise au placard, notamment après que l'Algérie ait perdu l'organisation de la CAN 2017. Mais que faut-il savoir sur le gazon artificiel ? Si les différents responsables optent souvent pour les solutions de facilité, mettant l'accent sur les avantages du tartan, il n'en demeure pas moins que des contre-indications existent. Augmentation significative des températures au sol Plusieurs stades ont subi ce genre de changement vers le synthétique, ces dernières années. Le premier effet négatif de l'installation de terrains en gazon artificiel est l'augmentation significative des températures au sol et en surface. Les diverses études sur le sujet rapportent une élévation pouvant aller jusqu'à 10°C par rapport aux températures environnantes. Cela peut en effet aggraver les effets nocifs de la chaleur élevée pendant la période estivale, notamment pour les joueurs. Ce phénomène influe donc négativement sur le rendement des athlètes et sur l'aspect physique, d'autant plus que la majorité des rencontres des championnats des Ligues 1 et 2 se sont déroulées cette saison en diurne. Ces pics de chaleur exercent aussi une pression accrue sur l'environnement : diminution de la qualité de l'air et émanations de gaz carbonique. Rappelons que les terrains en gazon naturel, au contraire, contribuent au rafraîchissement de l'air ambiant, ce qui offre aux joueurs une meilleure récupération. Le tartan est-il toxique ? Le second argument relève du champ de la toxicologie. Différentes inquiétudes sont fréquemment exprimées quant aux conséquences des composantes des fibres artificielles ainsi que des revêtements à base de pneus utilisés comme substrat du terrain. La majorité des études publiées à ce sujet n'ont cependant pu établir de liens significatifs entre ces composés et de quelconques problèmes de santé : les doses potentiellement absorbées par l'être humain sont dans la plupart des cas en deçà des seuils de toxicité tolérés. Seules les fibres composées entièrement ou en partie de nylon présenteraient des taux trop élevés de plomb, et cela ne concerne que les terrains de première génération. Les mêmes résultats ont été obtenus en ce qui concerne la présence potentielle de ces éléments chimiques dans le sol. Les blessures à répétition Une troisième conséquence sur le plan santé, et relative aux terrains synthétiques dont il est également question dans plusieurs études, est la fréquence et l'intensité des blessures subies par les sportifs sur ce type de sol. En effet, suite à des plaintes de joueurs, des comparaisons ont été faites entre des blessures se produisant sur du gazon naturel et sur du gazon artificiel. Les résultats de ces études sont sans appel, les blessures sont plus fréquentes au contact du gazon synthétique. En Algérie, le nombre de joueurs blessés sur du tartan artificiel est incalculable. Même des jeunes joueurs à l'avenir prometteur ont vu leur carrière brisée en raison notamment de la qualité des terrains. C'est le cas du jeune Boualem Hamia (USMA), qui a dû mettre un terme à son aventure sportif après une très grave blessure. Aussi, il faut avouer que la combinaison de chaleur, d'humidité, de sueur et de salive en situation de jeu sur le terrain artificiel augmenterait fortement les probabilités d'infection en cas de blessures ouvertes. Le gazon naturel agirait plutôt comme un " autonettoyant " et limiterait ainsi ce risque. Le terrain du stade Ahmed Zabana dans un piteux état Exception faite aux pelouses du stade Mustapha Tchaker de Blida et du Chahid Hamlaoui de Constantine, qui sont bien entretenues, ainsi que le stade du 5 Juillet, qui a bénéficié récemment de la pose d'une nouvelle aire de jeu, les autres pelouses en gazon se trouvent dans un piteux état, notamment celui du 19 mai de Annaba. A Oran, grand fief du football pourtant, aucun stade en gazon naturel n'est à recenser. Pis encore, le stade Ahmed Zabana, où sont domiciliées les deux équipes de l'élite, l'ASMO et le MCO, est devenu très dangereux pour la pratique du football. Février dernier, le DJS de la wilaya d'Oran Badreddine Gharbi avait déclaré à l'APS que le stade Ahmed Zabana pourrait être doté à nouveau d'une pelouse en gazon naturel pour remplacer celle en synthétique posée depuis plusieurs années et dont l'état se dégrade de plus en plus. Nous avons reposé la question au même responsable récemment, qui nous dira, à notre grand étonnement: "Oui, la pelouse est en très bon état. Elle nécessite juste une petite toilette ". Cet avis n'est pourtant pas partagé par les sportifs, techniciens et observateurs qui fréquentent régulièrement l'enceinte. " Cette pelouse est un danger permanant pour les joueurs. Nous avons constaté plusieurs blessures d'articulation dues à la mauvaise qualité du tartan ", nous a déclaré l'entraîneur de l'ASMO, Djamel Benchadli. Pour sa part, le milieu de terrain du MCO, Yacine Bezzaz, l'un des éléments les plus expérimentés, explique à ce sujet: "Il existe des stades, qui ne sont pourtant pas utilisés (Stade Bouakeul ndlr) et qui ont bénéficié d'une nouvelle pelouse. Le tartan de Zabana ne sert plus à la pratique du sport. Nous avons souffert cette saison et croyez-moi je ne suis pas le seul à le dire. Même l'entraîneur Cavalli s'étonne encore qu'une telle pelouse très sèche soit encore utilisée ". Pour rappel, le stade Ahmed Zabana possédait une pelouse naturelle lors des années 1990. Devenant toutefois impraticable, elle a été remplacée par une autre en gazon artificiel après que l'enceinte ait été fermée pendant une longue période. En tous cas, la pelouse actuelle, sur laquelle s'est déroulée la finale de la coupe d'Afrique des moins de 20 ans en mars 2013, est devenue un véritable danger pour la santé des joueurs. "Il est vraiment temps de changer cette pelouse devenue impraticable, surtout que le MCO va disputer une compétition africaine la saison prochaine", nous dira un responsable au Mouloudia d'Oran. Par ailleurs, le nouveau stade olympique de Belgaïd sera doté d'une pelouse en gazon naturel et cela se répercuterait sur le stade Ahmed Zabana et ce, contrairement au stade OPOW du 24 Février de Sidi Bel-Abbès qui a fermé ses portes pour la pose d'une pelouse en gazon naturel . Le gazon mixte: est-ce la solution définitive en Algérie? Avec la science, les gazons ont également évolué. La nouvelle génération de terrains est aujourd'hui la seule à être vendue et installée en Europe ; elle offre une mixité de gazon naturel et artificiel, appelé également gazon hybride. C'est à dire le mariage entre l'artificiel et le naturel. Mais comment ? Dans un terrain en gazon naturel, on injecte des millions de fibres de gazon synthétique. Le résultat ? Les racines du gazon naturel poussent autour des fibres synthétiques et ancrent le terrain pour obtenir une construction solide présentant un meilleur drainage et un confort de jeu optimal. Quelques spécialistes se placent plutôt en faveur de ce genre de terrains. Ils estiment que ces surfaces feraient économiser de temps d'entretien, protègeraient les joueurs des blessures graves, ne présenteraient aucun risque toxicologique et coûteraient moins cher dans la durée. Elles sont également plus résistantes aux aléas climatiques. Au Canada, plusieurs pelouses dans ce genre ont été posées récemment en prévision de la Coupe du Monde féminine 2015, qui a débuté avant-hier. En Algérie, ce type de pelouse n'est pas encore cité, mais après la décision ministérielle qui prône un retour concret aux pelouses naturelles, notamment pour les clubs de Ligue 1, le gazon hybride pourrait être une solution définitive à ce problème de pelouses dans nos stades. |
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