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Lettre d'un oligarque au petit peuple

par Moncef Wafi

Cher petit peuple assis, je me vois dans l'obligation de vous écrire pour me défendre contre les accusations infondées et gratuites, puisqu'elle ne nous a pas payé les droits d'auteur, de Madame Louisa Hanoune qui ne rate aucune occasion de nous tomber dessus, les deux talons joints. Cher petit peuple inutile, le temps de comprendre c'est quoi un oligarque, son histoire, ses aspirations et l'amour qu'il voue à son maître est venu. Un oligarque, selon hadj Wikipédia, est un membre d'une oligarchie, classe dominante liée au gouvernement d'un pays. En particulier, le terme est employé couramment en Russie pour désigner des personnalités de premier plan du monde des affaires, en lien avec le pouvoir politique, et qui se sont enrichies à la faveur de l'économie de marché et sa politique de privatisations à tout berzingue. Vous avez bien lu en Russie et pas en Algérie. Chez nous, on préfère mieux le terme d'affairiste, de beznassi, un mot bien de chez nous que tout le monde peut comprendre que ce terme importé du froid. D'ailleurs, je vais en toucher deux mots à notre ami, le ministre du Commerce, pour qu'il gèle l'importation des mots pour le bien de notre économie. Cher petit peuple insignifiant, je ne suis pas un vampire qui suce le sang du pays, et là je parle au nom de toute la famille des oligarques, de leurs proches et de leurs amitiés utiles. Je disais donc que je suis loin de l'image qu'on dépeint de moi qui veut que je sois l'ombre d'un wali ou d'un ministre, que je lui chuchote à l'oreille pour un lot de terrain de cent hectares ou une licence d'importation de tire-bouchons. Je n'ai pas d'accointance politique ni de couleur partisane sauf celle qui me permet de faire marcher mon business. Je suis Algérien de peau, de confession et d'intérêt. Je sais d'où je viens et je n'oublie jamais de baiser la main de celui qui m'a créé, m'a sorti de l'anonymat national et a fait de moi ce que je suis aujourd'hui. Si Hanoune et les autres me tirent dessus c'est parce qu'ils sont jaloux de ma réussite et de l'amour que me portent ceux d'en haut. Ils ne savent plus quoi dire, me cherchent des poux alors que je ne suis que l'ombre qui cache le marionnettiste. Cher petit peuple aphone, je ne suis pas cet homme d'affaires instruit, diplômé, sportif. Bref, je n'ai rien de cette carte postale nippone, je ne suis qu'un rémora parmi tant d'autres qui nageons dans les eaux troubles de l'Algérie. Je ne suis qu'un homme de paille tressé pour signer les gros contrats, empocher les milliards, beaucoup de milliards, dans ma poche et celle plus grande de mon maître et faire de la prison au cas où. Tous les oligarques algériens sont conscients de cette clause du contrat et que la prison peut être une éventualité envisageable si la justice venait à faire son boulot. Mais au bout du silence carcéral, on sait que notre avenir, celui de nos noms et de nos petits noms seront à l'abri jusqu'à ce que la dernière goutte du pétrole soit siphonnée par les requins. Je ne suis qu'une marionnette remplaçable, un prête-nom que je dois léguer à un autre rémora qui prendra ma place. Cher petit peuple aveugle, je vous écris ces quelques lignes pour vous dire que si ce n'est pas moi ça sera un autre. Et ne vous inquiétez pas, tant que les requins, qui vous regardent mourir en position assise, auront faim ils vous boufferont vous et votre pays.

P.S : cette lettre a été écrite par mon rémora.