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Violence à l'égard des enfants : Des chiffres inquiétants et un tabou

par Yazid Alilat

La violence à l'égard des enfants est un phénomène en expansion, mais souvent tu, en Algérie.

Il y a, particulièrement, la violence sexuelle qui fait des ravages, car, selon les services de sécurité, «on n'en parle pas assez ou pas tellement, de peur des scandales». Hier, sur les ondes de la Radio nationale, la commissaire divisionnaire Kheira Messaoudene, chef du Bureau national de la Protection des enfants, est revenue sur cette problématique, à l'occasion de la célébration de la Journée internationale de l'Enfant. Et, d'emblée, les chiffres font peur: «en 2014, plus de 6.000 enfants ont été victimes de violences, dont la violence sexuelle», lance-t-elle, avant de préciser que pour les 4 premiers mois de 2015, ses services ont enregistré, à l'échelle nationale, plus de 1.700 cas de violence contre des enfants.

«La protection de l'enfant concerne tous les ministères, et pas seulement la DGSN», a-t-elle estimé, avant de relever que la DGSN «a mis en œuvre 50 brigades dédiées à la Protection de l'enfance, à l'échelle nationale, Alger ayant, à elle seule, 3 brigades».

Pour la commissaire divisionnaire Messaoudene, «il faut avoir une tolérance zéro, à l'égard de la protection des enfants». «Le travail quotidien consiste à recevoir les plaintes, auprès des brigades de la Protection de l'enfance, les alertes des familles, des voisins, des éducateurs, dans le cas de maltraitance de mineurs», explique-t-elle, avant de faire une distinction de taille entre kidnapping d'enfants et disparition. «On préfère parler plutôt de disparition d'enfants, car c'est l'enquête qui détermine s'il y a eu enlèvement ou pas. Dans la plupart des cas, ce sont des fugues relatives à l'échec scolaire, formulées en scénarios d'enlèvement». Pour autant, le bilan des enlèvements d'enfants est lourd, inquiétant: en 2014, il y a eu 195 enlèvements et durant les 4 premiers mois de 2015, il y a eu 25 cas «d'enlèvements d'enfants, récupérés et remis à leurs familles», a-t-elle indiqué.

En 2013, il y a eu 150 enlèvements d'enfants dont les 2 enfants de Constantine, retrouvés morts. Les derniers chiffres de la violence contre les enfants, «pour toutes les formes de violences, à l'échelle nationale, sont de 1.726 cas, dont la violence contre les enfants, 996 cas de violences physiques et 517 agressions sexuelles dont 305 contre des filles», selon la même source qui détaille qu'il a été recensé, également, «179 cas de mauvais traitements, 25 enlèvements, 3 cas d'homicides involontaires, et 6 cas de violences ayant entraîné la mort». «Un silence s'est installé, malheureusement, dans la société algérienne, dont la démission de la famille de ses responsabilités envers les enfants», estime Kheira Messaoudene, pour qui «il y a un problème de comportement à l'égard de la violence contre les enfants, autant de la famille, de l'école, des enseignants. C'est une affaire de la société algérienne. Il faut l'implication du citoyen, de la famille, de l'école et lutter contre le silence (dans le cas des agressions sexuelles notamment), chacun est impliqué dans ce phénomène, dont la passivité et le manque de civisme du citoyen.»

«Les prédateurs sont, malheureusement, parmi nous», a fini par lâcher la commissaire divisionnaire Kheira Messaoudene, qui a rappelé qu'une équipe spécialisée dans la cybercriminalité traque les chantages en tout genre qui circulent sur le Net.