Lorsqu'elle a pris
le micro, une fois la manifestation terminée au palais «Abdelkrim Dali» d'Imama
(Mansourah), Leila Abbou, présidente des sages-femmes du complexe «Mère et
enfants» de l'établissement hospitalier de santé (EHS) de Tlemcen, n'a pas
cherché longtemps ses mots. Du fond du cœur, et avec un large sourire sur le
visage, elle s'est dite «très satisfaite» de cette Journée mondiale des
sages-femmes, célébrée cette année sous le thème «Les risques professionnels de
la sage-femme». A en juger par les conférences scientifiques très riches
présentées lors de cette journée : risque professionnel et prévention
spécifique à la sage-femme dans l'établissement de soin (Dr Farida ILES,
directrice de l'INPRP), risque d'allergie respiratoire et cutanée chez la
sage-femme de l'EHS de Tlemcen (Dr Meziane, maître-assistante en médecine du
travail CHU Tlemcen), la protection juridique de la sage-femme des risques
professionnels (Ismail KDIDER, procureur-adjoint auprès du tribunal de
Tlemcen), l'accident du travail (Dr Abderrahmane MEZIANE, CNAS de Tlemcen), le
burn-out du soignant (Dr Benosmane, psychologue au CHU de Tlemcen), la maladie
thromboembolique veineuse (Dr Noureddine BETTAHAR, chirurgien à l'EHS de Tlemcen),
l'on peut dire que les sages-femmes de Tlemcen ont surtout voulu marquer la
journée en se focalisant sur la question, cruciale, des conditions de travail
lors de l'exercice de leur profession, qui consiste à pratiquer des actes
nécessaires au diagnostic, à la surveillance de la grossesse et à la
préparation psychoprophylactique à l'accouchement, ainsi qu'à la surveillance
et à la pratique de l'accouchement et des soins postnatals en ce qui concerne
la mère et l'enfant. L'exercice de la profession de sage-femme peut comporter
également des accidents du travail (piqûres septiques, accidents d'exposition
au sang, lombalgies, chutes, contusions par choc en cas d'encombrement,
brûlure, et risque électrique), des ambiances et contraintes physiques (Travail
à la chaleur produite par lumière et instruments, rayons x dus aux radios
thorax du nouveau-né), travail en lumière artificielle permanente (Blocs
maternité), des odeurs des désinfectants, du bruit (Cris de douleur, cris des
nouveaux-nés en suites de couches, alarmes des appareils), des contraintes
posturales (Station debout et piétinement), des gestes répétitifs
(Echographies, surveillance monitoring, efforts de «traction» pendant
l'accouchement), des agents, des allergies aux protéines du latex (gants essentiellement),
des médicaments (antibiotiques et pénicillines), des anesthésiques, des éthers
de glycol lors du nettoyage des sols, murs, vitres, des agents biologiques, des
contaminations hospitalières, des maladies dues au bacille tuberculeux et à
certaines mycobactéries atypiques, liées à des agents infectieux ou
parasitaires, ou liées aux infections d'origine professionnelle par les virus
des hépatites, et des contraintes organisationnelles et relationnelles, du
travail en urgence, de nuit, et le stress de la sage-femme, pendant
l'accouchement de la parturiente, de la manutention des femmes enceintes, la
manutention de matériel, et des nombreux déplacements dans l'établissement.
Mais, ce qui a marqué le plus cette Journée mondiale de la sage-femme à Tlemcen,
c'est l'intervention du magistrat Ismail KDIDER, qui s'est longuement attardé
sur le dispositif législatif et règlementaire pour la protection de la
sage-femme des risques professionnels. La loi algérienne assure-t-elle une
protection suffisante aux sages-femmes contre les risques professionnels,
s'interroge-t-il ? Pour répondre à cette question, M. KDIDER, a évoqué
l'ensemble des textes règlementaires promulgués dans ce domaine, à commencer
par l'ordonnance n° 73-65 portant institution de la médecine gratuite dans les
secteurs sanitaires, la loi fondamentale sur la santé de 1976 et 1986, la loi
n°83-13, modifiée et complétée, relative aux accidents de travail et aux
maladies professionnelles, la loi n° 85-05 relative à la protection et à la
promotion de la santé, la loi n° 90-17 modifiant et complétant la loi n° 85-05
relative à la protection et à la promotion de la santé, la loi 88/07 relative à
l'hygiène, à la sécurité et la médecine du travail, le décret exécutif n° 91-05
du 19 janvier 1991 relatif aux prescriptions générales de protection
applicables en matière d'hygiène et de sécurité en milieu du travail,
l'ordonnance n° 93-120 relative à la médecine du travail, l'instruction
ministérielle n°18 du 27 octobre 2002 relative à la protection de la santé des
personnels de santé, l'ordonnance n° 06-03 portant statut général de la
fonction publique, et la loi sanitaire n° 85-05 relative à la protection et à
la promotion de la santé? «Toutes ces dispositions fondamentales en matière de
santé, sécurité et de médecine du travail garantissent la protection et la
promotion de la santé des personnels en milieu hospitalier en général et des
sages-femmes en particulier. Le professionnel de santé bénéficie du même niveau
de sécurité que les patients. C'est de la responsabilité de l'employeur de
générer les conditions de travail pour que le salarié évolue dans une ambiance
sereine», a souligné le représentant de la Cour de justice de Tlemcen. Lors des
débats très riches, de nombreuses questions ont été soulevées par les participants.
L'on peut citer : les conditions d'exercice, le harcèlement moral et sexuel de
la sage-femme, le conseil de l'ordre, la déontologie, la formation continue,
l'élaboration d'un manuel juridique, le secret médical, la responsabilité,
l'obligation de conseil et d'information, l'assistance médicale à la
procréation, les droits de la femme enceinte, la protection maternelle et
infantile, la filiation et droit de la famille, le champ de compétence de la
sage-femme, les embûches des risques médico-légaux et les questions juridiques,
tant pour la sage-femme que pour sa patiente, la parturiente et l'enfant à
naître. A noter que le service de la maternité de l'EHS de Tlemcen, qui dispose
d'équipements modernes, a enregistré 12 869 naissances en 2014, dont 4 123 par
césariennes (interventions chirurgicales), 319 par forceps (instruments
d'extraction), 8 427 grossesses normales, 26 grossesses gémellaires (deux
bébés).