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Une banque privée au cœur du trafic : Près de 400 millions d'euros transférés, illicitement

par Moncef Wafi

Les Douanes algériennes, alertées par une hausse «anormale» du nombre des opérations d'importations domiciliées auprès d'une banque privée, à capitaux étrangers, ont mis à jour un transfert de capitaux à partir de l'Algérie vers l'étranger, en 2013 et 2014.

L'information rapportée par l'APS, citant des sources douanières, fait état de près de 400 millions d'euros qui ont été, ainsi, transférés vers l'étranger. Le pot aux roses a été découvert suite à une vaste opération de contrôle lancée, en mars 2014, par les services douaniers, dans le cadre de l'apurement des opérations d'importations.

En l'espace de 2 ans, l'établissement bancaire en question est passé de la 10ème à la 2ème place, en termes de volume de financement du commerce extérieur.

Une place sur le podium juste après une banque publique qui finance les grandes opérations d'importations de produits alimentaires. Cette anomalie a poussé les enquêteurs à aller plus en profondeur, révélant de nouveaux éléments.

Le rapport d'enquête détaillé a été transmis aux pouvoirs publics. Les premiers éléments de l'enquête ont révélé que plus de 30% des opérations d'importations de marchandises, domiciliées auprès de cette banque, étaient non identifiées et réalisées, pour la plupart, par des importateurs fictifs et des registres de commerce loués. Le modus opérandi des importateurs consistait à établir deux factures différentes pour une même marchandise importée.         

La première majorée et destinée à la banque pour pouvoir transférer un maximum de devises alors que la deuxième, minorée, était présentée aux services des Douanes pour payer moins de taxes douanières.

A titre d'exemple, cite la source douanière, une marchandise facturée au prix de 1,8 million d'euros, pour la banque, est déclarée aux Douanes algériennes pour seulement 23.900 euros.

Au départ, la direction de cet établissement bancaire a refusé de coopérer avec les enquêteurs, en communiquant les informations relatives à ses clients suspectés, se cachant derrière le secret bancaire.

Un refus des banques à l'origine du blocage de plusieurs enquêtes d'investigation, enclenchées avant la mise en oeuvre, en mars 2014, du nouveau système informatisé de l'apurement des importations.          Un système d'informations reliant, dorénavant, les Douanes algériennes aux banques, ce qui permet un contrôle plus rigoureux des transferts de fonds vers l'étranger et destinés au paiement des importations. Les documents douaniers, dont notamment le D10 qui atteste de l'arrivée de la marchandise, de sa valeur ainsi que des tarifs douaniers appliqués à l'importation, sont ainsi partagés en délais réels entre les deux institutions.

Un système qui a permis, aussi, d'informatiser la gestion des documents. En effet, la falsification du D10 permettait aux importateurs frauduleux de transférer, vers l'étranger, des capitaux à travers des opérations d'importations fictives. Des enquêtes sont en cours, actuellement, touchant d'autres banques, dans le cadre de cette opération d'apurement des importations. Pourtant, l'Algérie applique une politique très stricte en matière de transferts de capitaux vers l'étranger. La réglementation en vigueur impose aux opérateurs et aux particuliers de déclarer, auprès du service fiscal, territorialement, compétent les fonds objet du transfert. Cette politique restrictive a pour objectif de lutter contre la fuite de capitaux, le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, objets des derniers amendements votés par l'APN. En 2009, le tribunal criminel de la Cour d'Alger a traité un dossier impliquant une cinquantaine d'individus, principalement des hommes d'affaires, accusés d'avoir transféré, illégalement, près de 900 millions d'euros vers l'Espagne. Mais il semblerait que l'essentiel des opérations illicites soit le fait d'opérateurs économiques étrangers, activant en Algérie. Outre la technique de la surfacturation, plusieurs méthodes sont utilisées pour faire sortir d'importantes sommes d'argent, à l'exemple des réseaux de passeurs.