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Ali Kahlane, DG de
la société Satlinker de prestations Internet, de sécurité informatique et de
solutions entreprises, était l'invité hier de l'émission «L'invité du direct»
de Radio M, la web radio de Maghreb Emergent, pour s'exprimer les chiffres
publiés la veille par l'ARPT à propos de la 3G.
Commentant les chiffres du rapport de l'ARPT, dont il évoque l'ambiguïté de certaines données, Ali Kahlane estime que le lancement de la 3G «a été une réussite du point de vue du nombre d'abonnés». Il constate au passage que le chiffre donné par l'ARPT faisant état de plus de 8,2 millions d'usagers de la 3G «a complètement démenti les prévisions institutionnelles». «Vous vous rappelez, l'année dernière, le président de l'ARPT, justifiait le fait que la 3G n'a pas été lancée d'un coup sur tout le territoire national en estimant qu'il n'y aura pas 3 millions d'abonnés avant trois ou cinq ans». Cette erreur de prévision vient du fait, explique M. Kahlane, que les autorités «n'ont jamais pris au sérieux le lancement de la 3G, ni observé l'écosystème du mobile et de l'internet combinés». Cette attitude, ajoute l'invité de Radio M, est due au fait que les responsables du secteur viennent de l'ancienne «administration des postes et télécommunications» et que «la gestion d'une technologie aussi rapide ne peut que leur poser des problèmes de visibilité». «Pour l'anecdote, ajoute Ali Kahlane, le lancement de la 3G qui devait intervenir courant décembre 2013, allait être reporté à janvier 2014. A la dernière minute ils se sont rendus compte qu'il fallait un décret qui n'était pas prêt et pas signé. La levée de boucliers a permis de débloquer la situation». Interrogé sur la «double numérotation» qui a été abandonnée en juillet dernier, M. Kahlane considère qu'elle a «énormément gêné l'opérateur Mobilis» alors que l'autre opérateur (Ooredoo, ndlr) allait trop vite», «au point où les autorités ont dû intervenir pour le freiner en lui interdisant de vendre les forfaits 3G en ligne parce que l'autre (Mobilis) ne peut pas le faire». «Il faut croire aussi que, très vite, les autorités se sont rendus compte de l'erreur. Et lorsque Djezzy avait lancé sa 3G, ils ont tout d'un coup éliminé la double numérotation, ce qui est une bonne chose», explique Kahlane. Le DG de Satlinker s'interroge par ailleurs sur le frein imposé à la généralisation de la 3G aux 48 wilayas, alors que «les opérateurs sont prêts». «Quelque part il y a des gens qui avaient peur du surplus de travail qui allait leur être demandé. Il fallait donc mettre des entraves administratives, du style double numérotation, étalement sur plusieurs années avant la généralisation de la 3G, et même demander des agréments pour installer des BTS», explique Ali Kahlane. «DJEZZY A UNE EXCELLENTE COUVERTURE» Invité à commenter les 12% de parts de marché de la 3G de l'opérateur Djezzy, pourtant arrivé six mois plus tard que les deux autres, Kahlane estime que «Djezzy a un très bon ancrage d'abonnés corporate (entreprises) et même de grosses institutions qui voulaient avoir une bonne connexion. Ce n'est d'ailleurs pas un secret, et même l'ARPT le dit dans le rapport, que Djezzy a un très bon réseau, même s'il ne le crie pas sur tous les toits, il a une très bonne couverture et, surtout, une fiabilité de la connexion. C'est vrai aussi qu'au niveau du son ce n'est pas encore le top, car c'est une technologie qui date de la fin des années 90 et début des années 2000, mais au niveau de la couverture, l'opérateur Djezzy est très bon». Djezzy, affirme l'intervenant, «n'a pratiquement pas perdu d'abonnés privés». «Il y a eu juste un petit glissement après le lancement de la 3G en décembre qu'il a pu récupérer après». Le passage de Djezzy au statut d'opérateur «semi public» lui a été bénéfique, estime Ali Kahlane qui évoque une «forte demande de la part d'institutions», ce qui explique, selon lui, les 12% de parts de marché dans la 3G réalisés en «trois mois». Le DG de Satlinker pense même que «d'ici juin», Djezzy «va avoir un pourcentage comparable à celui qu'il détient dans la 2G». LE MINISTERE DES PTIC «NE SERT A RIEN» Le succès que rencontre la 3G ne doit pas faire oublier que le secteur TIC rencontre d'innombrables freins en Algérie. Ali Kahlane constate qu'il y a eu un recul ces dernières années par rapport à la dynamique enclenchée au début des années 2000 avec la nouvelle loi sur les télécoms, le passage d'Algérie Telecom au statut d'entreprise publique économique, et l'ouverture du marché de la téléphonie mobile et de l'Internet. «La lune de miel a duré, en fait, deux ou trois années. En fait, le personnel d'Algérie Telecom provenait de l'administration du ministère des Télécommunications de l'époque. De même que ceux d'Algérie Poste et de l'ARPT. Ces fonctionnaires ont une façon de fonctionner qui ne pouvait pas changer du jour au lendemain. Vous ne pouvez pas faire du neuf avec du vieux», explique-t-il. Pour M. Kahlane, «il n'existait pas de feuille de route de développement du secteur». Interrogé sur le blocage du projet de loi sur les télécoms, présenté par Benhamadi en 2012, Kahlane rappelle que c'est l'actuelle ministre des PTIC, Mme Zohra Derdouri, qui bloque ce texte. «Au moment où elle était présidente de l'ARPT, elle a tout fait pour bloquer la loi parce qu'elle estimait qu'elle ne mettait pas suffisamment en avant le rôle du régulateur. Et maintenant qu'elle est ministre, elle se rend compte de l'inverse et qu'en fait le MPTIC est mis de côté». L'intervenant rappelle que cette loi, qui devrait introduire le dégroupage de la boucle locale, est nécessaire pour relancer le secteur des TIC en Algérie, afin de permettre l'émergence de nouveaux acteurs (dont les MVNO). «Quand je vois la liste des «grands dossiers» sur le site du ministère, je vois en fait celle des «grands échecs». Le projet «e-Algérie 2013» n'a été réalisé qu'à hauteur de 15%. Le «réseau de recherche» qui devait interconnecter les chercheurs algériens, n'a été qu'un effet d'annonce. Les «indicateurs TIC» datent de 2011. Le Fonds «Faudtic», destiné à financer des projets dans le secteur, n'a été utilisé qu'à une échelle de 2 ou 3 % par le Cyberparc. Je peux citer des cas de jeunes qui ont déposé leurs dossiers en ligne, mais à qui on n'a pas donné de suite. Il y a 5 milliards de DA qui dorment, alors qu'ils sont faits pour développer les TIC». Revenant sur le rôle du MPTIC, Ali Kahlane estime que son fonctionnement est plus «un facteur bloquant». Le ministère «ne sert absolument à rien», «je ne vois pas qu'elle est la valeur ajoutée qu'il ramène». Selon lui, le MPTIC «bloque au niveau de la régulation, de la loi, de l'évolution et de la création de start-up, et bloque même l'évolution d'Algérie Telecom qui ne peut rien faire sans en reporter à la tutelle». «En fait, le ministère devrait disparaître le plus rapidement possible pour qu'on puisse voir le bout du tunnel», conclut Ali Kahlane. |
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