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Le
Maroc vient d'accuser l'Algérie d'avoir tiré sur des sujets marocains et
d'avoir grièvement blessé l'un d'eux. L'Algérie a réagi en dénonçant une
«présentation fallacieuse» d'un incident survenu le 18 octobre entre des
contrebandiers et des gardes-frontières algériens. Le gouvernement algérien
affirme que les tirs de sommation ont été tirés en l'air à la suite de
«provocations» et qu'ils ne pouvaient «en aucune manière provoquer des
blessures à l'une quelconque des personnes engagées dans l'acte de
provocation».
Alger parle de travestissement, de «manipulation des faits» et «d'escalade» dans le discours des autorités marocaines à des fins «inavouables». On est face à deux versions diamétralement opposées. Ce qu'on peut observer est que la partie marocaine a très rapidement réagi à l'incident avec un maximum de tapage médiatique aux accents quasi martiaux. Même si les deux versions sont diamétralement opposées, cette rapidité avec laquelle les responsables marocains et principalement le ministre des Affaires étrangères, Salah-Eddine Mezouar, à dégainer et à tirer est pour le moins sujette à caution. Dans des affaires plus graves, les Etats prennent le temps de vérifier les informations et de consulter l'autre partie avant de se lancer dans la «guerre médiatique». En moins de six heures après l'incident, les responsables marocains ont enclenché la guerre médiatique. Trop rapide pour que cela ne suscite pas le doute d'une volonté délibérée de créer un incident diplomatique ou de le grossir démesurément. Les relations algéro-marocaines sont compliquées depuis trois décennies au moins, elles ne sont pas «normales». Et il suffit d'un peu de mauvaise foi ou d'un souci personnel, trivial, pour les rendre encore plus détestables. Ces derniers temps, le chef de la diplomatie marocaine a fait l'objet d'une série de révélations sur Internet sur sa double nationalité (franco-marocaine), sur le choix d'un cabinet conseil américain qui emploie «sa propre fille» pour réaliser une étude sur l'économie marocaine. L'authenticité de ces documents diffusés via Twitter reste à vérifier mais il est évident qu'ils ont suscité une nervosité accrue chez le ministre marocain. Et cela s'est traduit, lors d'une réunion des partis marocains membres du gouvernement, par une surprenante attaque en règle contre la France accusée de vouloir exercer une «tutelle» sur le Maroc. Une charge d'autant plus surprenante que la France reste fondamentalement le principal défenseur de la proposition marocaine d'autonomie du Sahara Occidental. Taper sur l'Algérie est une «banalité» venant d'un responsable marocain, mais charger le gouvernement français sur sa prétendue «préférence algérienne» n'a pas de sens. Les responsables marocains savent depuis longtemps qu'ils n'ont pas meilleur défenseur que Paris sur le dossier du Sahara. Pour beaucoup d'observateurs, y compris marocains, la seule explication à donner à ce discours «anticolonialiste» de M. Mezouar est une quête de diversion. Et c'est probablement dans le même sens qu'il faut lire l'empressement à faire d'un incident à la frontière une affaire d'extrême gravité. Presque un casus belli. Mezouar devrait se calmer. |
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