L'homo
algérianus est une espèce mutante, nouvellement apparue dans la niche
biologique qu'elle colonise. Ses représentants désolent. Ne se soucient de
rien, ivres de suffisance. Savent tout, critiquent la relativité et aussi
Taiwan. Imbus de grandeurs. Pas pressés, le temps d'un sablier. Ponctuels, mais
entre deux prières. Pressés pour voir, vert. Pressés de quitter la carlingue,
avant que le train touche le tarmac. Se disputent les bousculades, aussi avec leurs
ombres. S'amarrent devant un sachet de lait. La chaine devant les guichets, à
la mairie, à la poste et ailleurs. Ils sont là, ils ne vont pas au travail, ils
sont payés quand même. La disette inscrite dans les panses, ruades sur le pain.
Les poubelles rassasiées. Détritus en tas, juste devant, derrière et autour,
ils sont cernés de partout. Les odeurs montent, puent, schlinguent et pénètrent
les alvéoles. Les diptères, les rats, les souris et les recycleurs sont déjà en
concurrence. La nature les gâte, vent du sud saturé de limon, de sable rouge et
de mal vie. Soleil de plomb. L'eau est rare, rationnée et impropre. Le
Plasmodium falciparum leur a rendu visite, Ebola n'est pas loin. Inversion des
valeurs : louent le vice, se moquent des vertus. Saisonniers dans les mosquées,
adulent «Ben rouge», écoutent du Rai, achètent Echourouk. Se disputent Messi et
Ronaldo. Montrent leurs caleçons, s'offrent de fausses griffes et gominent les
cheveux. Boivent dans les bois et les interstices, pissent dans le plastique,
sur les murs et partout. Ne se gênent pas, sortent des monstruosités de leur
gueules de chiens marqueurs de territoire. Frondeurs, casseurs aux stades.
Ignorent ce qu'est une salle de cinéma, le théâtre c'est quoi ? Confondent une
librairie et une bibliothèque : ils ne connaissent pas, jamais mis le demi
pied. Ne lisent pas, comme leurs représentants : pas vraiment élus. Sans
culture pour la plupart, mais riches. Lèvent les mains, non ce n'est pas un
Hold up, ils acquiescent mais ne savent pas de quoi il s'agit, ou .s'en
moquent. Normal, tout est dans les normes. Les valeureux sont pauvres, et les
écervelés opulents. Certaines consciences s'offusquent, ne peuvent plus,
prennent leur destin à deux mains, s'organisent, sensibilisent, font du
bénévolat. Des camions, des Karchers, des balais, des pelles, des sacs de
poubelles, des pinceaux et des bidons de peintures irisées. A Souk ahras, les
escaliers sont coloriés : arc en ciel, un autre est devenu, piano. A Tiaret
l'ADAM (Association de développement de l'agriculture de montagne) a rassemblé
et sensibilisé des dizaines de bénévoles, pour débarrasser la forêt des pins de
tonnes de tessons de verre, de plastique et de métaux, laissés par les buveurs
des buissons et les pollueurs inconscients. Ces initiatives sont louables et à
encourager, mais insuffisantes puisque quelques temps après les mauvaises
habitudes ont repris leur cours. Ces actions ne doivent pas être ponctuelles et
sporadiques, mais inscrites dans le temps. Les associations ont un rôle
pédagogique et de sensibilisation à faire ; et ne pas se substituer aux
organismes et services compétents.
Dans
les pays propres, le civisme des citoyens conjugué au travail quotidien des
services de nettoiement des mairies font que leurs villes restent propres, chose
banale chez eux. Des amendes pour les pollueurs sont systématiques. Dans nos
villes, l'incivisme et la démission des responsables ont rendu notre espace
mortel pour nous, pour la faune et la flore. Si non comment expliquer qu'à
chaque fois qu'un ministre vienne en visite dans une ville, le réflexe ancré
des responsables est de cirer le sol, l'asphalte, peindre les bordures des
trottoirs, badigeonner les murs, etc? Nettoyer c'est bien, ne pas salir c'est
mieux, telle est la devise que tout un chacun de nous, doit savoir et surtout
appliquer dans son biotope.