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Le
traitement de la crise libyenne est un «processus long et ardu, il faut faire preuve
de patience». Ce que Ramtane Lamamra a déclaré aux journalistes, le 8 octobre
dernier, en marge de la commémoration de la «journée de la diplomatie
algérienne». Cette sage recommandation adressée à des journalistes «pressés»
d'aboutir à un résultat vaut pour la diplomatie algérienne elle-même.
Rassembler les Libyens dans un dialogue «inclusif» n'a rien d'une sinécure. Il
faut d'abord identifier ceux qui doivent participer à ce dialogue et cela n'est
pas facile dans une scène libyenne atomisée en de nombreuses milices.
Veiller à «n'exclure personne» ne signifie pas qu'il faut accepter des acteurs tentés par le Daech comme cela est le cas pour des miliciens à Derna, dans l'est de la Libye. L'envoyé des Nations unies en Libye, Bernardino Leon, s'est fait d'ailleurs l'écho du risque «Daech» en évoquant le retour de djihadistes libyens de Syrie et d'Irak qui trouveraient dans le «chaos actuel un milieu idéal pour leur implantation». Cette menace Daech est probablement exagérée pour inciter les acteurs «raisonnables» libyens à aller rapidement vers la solution politique. Mais si le pourrissement perdure et qu'il n'y a aucune issue permettant de recréer l'Etat libyen, cette perspective est réaliste. Or, si comme l'indique M. Lamamra le processus sera «long», il faut constater qu'il n'est toujours pas enclenché même si les idées défendues par l'Algérie semblent admises. Une rencontre entre les «acteurs libyens» est prévue en Algérie pour le mois d'octobre - voire en novembre - et il est difficile de pronostiquer qu'elle sera le début d'une dynamique vertueuse. On peut avoir de bonnes idées pour résoudre la crise en Libye, cela ne constitue pas une garantie de succès. Il faut effectivement faire preuve de grande patience dans ce rôle de «facilitateur». La situation se complique par le fait que l'Egypte, acteur important et impliqué, ne semble pas du tout d'accord avec l'approche algérienne. L'officieux Al-Ahram évoquait, hier, à l'occasion de la visite du chef de gouvernement libyen au Caire où il a été reçu par le président Abdelfattah Sissi, l'existence d'une grande «divergence avec l'Algérie» sur la gestion du dossier libyen. Al-Ahram parle même d'une «intrusion de l'Algérie sur la ligne de la crise libyenne» et évoque une «colère silencieuse» des pays voisins contre «l'initiative algérienne» qui constituerait un des «dossiers les plus opaques». L'initiative algérienne, affirme le journal qui exprime en général le point de vue du pouvoir égyptien, est la «plus importante source de malaise actuellement». Le langage n'est pas codé: pour Le Caire, l'approche algérienne du dossier de la réconciliation libyenne est «trop inclusive». Le fait que les islamistes et notamment les Frères musulmans puissent y être associés hérisse à l'évidence le gouvernement du maréchal Sissi. L'Egypte tend à exporter sa propre crise au dossier libyen en étendant le qualificatif de «terroriste» affublé aux Frères musulmans égyptiens à ceux de Libye. Il y a bien une divergence de fond entre la vision algérienne qui veut rassembler les acteurs libyens et celle de l'Egypte qui veut en exclure certains. Alger et Le Caire ne sont pas sur la même ligne sur le dossier libyen, c'est une évidence. La diplomatie algérienne devra en tenir compte. |
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