Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Gouvernement irakien d'union nationale : Les 30 jours d'Al-Abadi

par Moncef Wafi

Le Premier ministre irakien sortant Nouri al-Maliki continue de dénoncer le coup de force de son président Fouad Massoum qu'il accuse de «violer la Constitution» en nommant, à sa place, Haïdar al-Abadi, estimant avoir la légitimité, pour un troisième mandat, après l'arrivée en tête de sa coalition aux législatives.

Pourtant, ses alliés le lâchent, un par un, à commencer par Washington, Bruxelles et New-York qui ont applaudi à la désignation d'un nouveau Premier ministre, mais également Téhéran qui cherche, elle aussi, à tourner, définitivement, la page du très contesté Al-Maliki.

Ainsi, Haïdar al-Abadi, lui aussi membre du parti Dawa de M. Maliki, a, désormais, 30 jours pour former un gouvernement d'Union nationale, si c'est possible, comme souhaité par les Etats-Unis, avec pour mission prioritaire de sortir le pays de la guerre avec les djihadistes de Daech et le sauver de l'éclatement. Depuis Sydney, le secrétaire d'État américain John Kerry l'a bien fait comprendre, exigeant un gouvernement d'Union, en Irak, condition préalable à tout élargissement de leur aide politique, économique et militaire, à Bagdad. Son successeur aura, surtout, la lourde tâche de faire oublier la politique sectaire et d'exclusion d'Al-Maliki qui a conduit les Sunnites à prendre les armes. M. al-Abadi s'est voulu rassurant en direction de ses parrains occidentaux puisqu'il a affirmé au vice-président américain Joe Biden qu'il avait l'intention de former, dans les plus brefs délais, «un gouvernement large, capable de contrer la menace de l'EI», selon la Maison-Blanche. Choisi, pourtant, par l'Alliance nationale, le bloc parlementaire chiite, comme son candidat, Al-Maliki ne désarme, toujours, pas, fort du soutien d'un certain nombre d'officiers, au sein des forces armées irakiennes. A Bagdad, les forces spéciales, la police et l'armée se sont déployées, en force, aux abords de positions stratégiques, bouclant les grandes artères et fermant des ponts clés. Face à ce qui s'apparente à un coup d'Etat, le représentant spécial de l'ONU, à Bagdad, Nickolay Mladenov, a appelé les forces armées irakiennes à ne pas s'ingérer dans la transition politique. Rappelons que le nouveau Premier ministre était, jusque-là, considéré comme un proche de son prédécesseur.

Né en 1952, il a été ministre des Communications au sein du gouvernement intérimaire mis en place après le renversement de Saddam Hussein, en 2003. Il a, ensuite, été élu au Parlement irakien, en 2006, où il a, d'abord, présidé la Commission de l'Economie, de l'Investissement et de la Reconstruction, puis celle des Finances. Dernièrement, en juillet, il avait été élu vice-président du Parlement . M. Abadi a passé des années en exil avant de rentrer en Irak.

Il a vécu en Grande-Bretagne où il a décroché, en 1981, un doctorat en ingénierie électrique et électronique à l'Université de Manchester. Il était à l'étranger durant l'essentiel du règne de Saddam Hussein.

Sur le plan militaire, le ministre américain de la Défense, Chuck Hagel, a confirmé que Washington transférait des armes, via le gouvernement irakien, aux Kurdes qui se battent contre les hommes de l'Etat islamique au Nord du pays. Une décision qui appuie le bombardement par l'Air Force, des positions insurgées. Quant à John Kerry, il a exclu, tout envoi de troupes américaines au sol, indiquant que les Etats-Unis et l'Australie allaient saisir les Nations unies sur la question des djihadistes étrangers qui combattent en Irak ou en Syrie, dans le but d'obtenir le soutien des pays d'origine de ces combattants ainsi que des pays concernés. L'Algérie sera-t-elle concernée par cette demande, surtout que de nombreux Algériens sont présents parmi les djihadistes, aussi bien sur le front syrien qu'irakien ? Par ailleurs, une réunion extraordinaire des ambassadeurs des pays de l'Union européenne a été convoquée, hier, dans la capitale belge pour étudier les moyens de contrecarrer l'avancée de l'EI qui s'est emparé de pans entiers du territoire dans l'ouest, l'est et le nord de l'Irak, sans rencontrer de grande résistance, hormis de la part des Peshmergas soutenus par les frappes américaines.