La condamnation récente d'au moins vingt pharmaciens de Constantine dans
l'affaire de la vente de compléments alimentaires contenant des cyclamates a
suscité stupéfaction et aigreur au sein des pharmaciens d'officines. Lors d'une
assemblée générale tenue hier à Ali-Mendjeli, les pharmaciens ont avoué qu'ils
ont été choqués par ces décisions de justice rendues par les tribunal de
première instance de Ziadia, dont les jugements « manquent de conformité » d'un
cas à un autre, pourtant tous jugés sous le même chef d'inculpation et ne sont,
de ce fait, pas du tout faciles à digérer, indique-t-on.
Donc, hormis les deux pharmaciens qui ont été jugés sous le même grief de
commercialisation de produits sans certificat de conformité et qui ont été
finalement acquittés, tous les concernés ont interjeté appel auprès de la Cour
de Constantine pour annuler ces décisions de justice dont le prononcé condamne
les pharmaciens concernés à des amendes allant de 10.000 à 500.000 dinars. « La
justice suivra son cours et nous sommes persuadés qu'on obtiendra gain de cause
au bout de la logique, mais nous allons immédiatement passer à l'offensive sur
d'autres plans. Comme le fait d'interdire l'accès aux officines pharmaceutiques
à tout contrôleur de la Direction du Commerce, et le dépôt d'une plainte contre
ce dernier sur la base des textes de loi qui autorisent ou accordent cette
prérogative du contrôle dans les pharmacies uniquement aux inspecteurs de la
Direction de la Santé publique », nous dira hier M. Issam Boulakhrasse en marge
de la rencontre des pharmaciens. Ajoutant dans ce sens que cette décision
devrait figurer en pole position parmi les résolutions de l'AG. La
détérioration des rapports entre les pharmaciens et la Direction du Commerce va
ainsi de mal en pis. Selon les déclarations de plusieurs pharmaciens, les contrôleurs
du Commerce continuent encore à opérer des visites dans les pharmacies, avec
acharnement, estime-t-on, surtout depuis la prononciation des dernières
décisions de justice. C'est une guerre de tranchées qui s'annonce longue entre
la Direction du Commerce et les pharmaciens. Pour rappel, la Direction du
Commerce a intenté une action en justice contre 39 pharmaciens chez lesquels
les contrôleurs ont découverts des produits parapharmaceutiques (Solyne et
omnivit) mis en vente alors qu'il contenaient du cyclamate dont l'interdiction
en Algérie est effective depuis l'année 2012. « On a le droit de vendre trois
types de produits à l'intérieur d'une pharmacie, à savoir le médicament, le
parapharmaceutique (ndlr, dont les compléments alimentaires), le cosmétique.
Et, les compléments alimentaires étant classé parmi les produits
parapharmaceutiques où figurent les vitamines, se trouvent sous l'égide du
ministère du Commerce et sont de ce fait soumis à un certificat de libre vente
(CLV) délivré par le ministère du Commerce, donc ces deux produits ont été
introduits dans le pays en toute légalité et avec l'approbation du ministère du
Commerce, comment alors les contrôleurs viennent-ils constituer des dossiers à
l'encontre des pharmaciens sous le grief de mise en vente de produits
contenants du cyclamate alors même que c'est leur tutelle qui a accordé le CLV
afférant ? », renchérit le président du bureau du Snapo de Constantine. Pour
lui toute la démarche de la Direction du Commerce est aberrante et illégale,
car seul l'inspecteur pharmacien de la Direction de la Santé (DSP) est qualifié
pour cette tâche. Ce dossier devait constituer l'essentiel lors de la
rencontre, mais des pharmaciens n'ont pas manqué lors de leurs interventions de
soulever les problèmes rencontrés avec la vente de produits psychotropes. L'un
des pharmaciens, qui a rappelé au passage qu'une pharmacie a été incendiée la
semaine passée à Jijel par des toxicomanes, a affirmé qu'il a été agressé en
fin de semaine écoulée par un forcené qui voulait prendre des psychotropes sous
la menace d'un couteau. « Nous ne sommes pas assez protégés, en matière de
commercialisation des psychotropes, contre les agressions de malades violents
», soutient-on dans la salle. En tout cas le mécontentement était perceptible
dans les interventions des pharmaciens, lesquels ont proposé de soumettre leurs
préoccupations au ministre de la Justice et autorités administratives. Et bien
sûr, si après toutes ces démarches rien de positif n'est enregistré, « on
n'exclut pas le recours à une grève générale illimitée qui sera suivie à
travers tout le territoire national, car nous avons le soutien de toutes les
wilayas », nous dira M. Issam Boulakhrasse.