Les espoirs d'un rapide retour en politique de l'ancien président
français Nicolas Sarkozy ont été douchés dans la nuit de mardi à mercredi par
sa mise en examen pour corruption active, alors qu'il est sous la menace
d'autres affaires judiciaires. Cette inculpation survient au moment où les
rumeurs sur sa volonté de prendre à l'automne la tête du parti de droite UMP
dans la perspective de la présidentielle de 2017 se font de plus en plus
précises. Mais après environ 15 heures de garde à vue dans les locaux de
l'office anticorruption - une première pour un ancien chef de l'Etat - Nicolas
Sarkozy a été mis en examen pour recel de violation du secret professionnel,
corruption et trafic d'influence actifs. Il n'est pas soumis à un contrôle
judiciaire. La corruption et le trafic d'influence sont des délits passibles de
peines pouvant aller jusqu'à dix ans de prison. Dans la même procédure, deux
autres personnes ont été inculpées: son avocat Thierry Herzog et un avocat
général à la Cour de Cassation, Gilbert Azibert. «Cette situation est grave,
les faits sont graves (...) Et puis cela concerne des magistrats, de hauts
magistrats, un avocat, un ancien président de la République», a déclaré le
Premier ministre socialiste Manuel Valls sur BFM TV/RMC. «Mais moi comme chef
du gouvernement, je dois m'en tenir au respect des principes» d'indépendance de
la justice et de présomption d'innocence, a-t-il ajouté. Les juges
d'instruction cherchent à établir si l'ancien président (2007-2012) a essayé
d'obtenir des informations couvertes par le secret auprès de M. Azibert sur une
décision de justice le concernant, en échange de la promesse d'une intervention
pour un poste de prestige à Monaco. A l'origine de cette affaire, le placement
sur écoute de l'ancien président en septembre 2013 dans l'enquête sur les
accusations, pour l'heure non étayées, d'un financement par la Libye de
Mouammar Kadhafi de sa campagne victorieuse de 2007. Dans ce dossier libyen,
plusieurs de ses proches avaient d'abord été placés sur écoute: les anciens
ministres Claude Guéant et Brice Hortefeux, mais aussi Michel Gaudin, ancien
patron de la police nationale. Ce dernier, devenu directeur de cabinet de
Nicolas Sarkozy après la défaite de 2012, entretient au printemps 2013
plusieurs conversations qui interpellent les enquêteurs. Il semble vouloir, en
vain, se renseigner sur l'enquête libyenne auprès d'un responsable policier.
Les juges décident alors - une décision sans précédent connu en France - de
placer à son tour l'ex-président sur écoute, en particulier le téléphone qu'il
utilise sous l'identité d'emprunt de Paul Bismuth pour converser avec Me
Herzog. Or, des échanges entre les deux hommes peuvent laisser croire qu'ils
ont cherché à obtenir des informations confidentielles auprès de Gilbert
Azibert.