L'artisanat traditionnel constantinois, qui revêt un cachet culturel
prononcé, plutôt qu'un aspect économique, a inauguré, hier, sa première
exposition avec une participation limitée mais qui a le mérite de représenter
toutes les facettes de la production artisanale, authentique, du terroir. Du
pain traditionnel fabriqué avec du son jusqu'aux joailleries, en passant par la
gandoura traditionnelle constantinoise, le caftan et le «caracou», les artisans
de la wilaya qui fabriquent leurs produits, dans des ateliers improvisés, dans
leurs demeures familiales, ont eu l'honneur de la fête en présentant au public,
non sans un certain art et avec fierté, leur savoir-faire, sous forme de
produits qu'ils exposent dans les locaux de la Maison des Syndicats «Abdelhak
Benhamouda» jusqu'au 17 de ce mois de juin.
La manifestation est organisée, sous l'égide du bureau de wilaya de
Constantine de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA)
et a été inaugurée, en grande pompe, hier matin, par le secrétaire général du
Syndicat des commerçants M. Salah Souilah. L'exposition a réuni quelque 45
artisans « qui ont été triés sur le volet et choisis parmi ceux que nous
connaissons, parfaitement et qui sont affiliés à notre organisation », a tenu à
préciser le coordinateur du bureau de wilaya du syndicat des commerçants M. Bouhenguel
Laid, ajoutant que cette exposition ne représente, en fait, qu'une sorte de
prélude à la manifestation « Constantine, capitale de la Culture arabe 2015 »
où sont prévues des manifestations d'envergure, dans le secteur traditionnel. »
Faute d'avoir trouvé un lieu qui se prête aux manifestations de foires et
expositions, fera observer notre interlocuteur, nous avons sollicité les
responsables de l'Union de wilaya de l'UGTA qui ont mis à notre disposition les
locaux de leur siège. Pour Mme Facih, présidente de la Fédération des artisans
de la wilaya de Constantine, cette première édition est destinée à « mettre en
lumière et faire valoir les arts traditionnels constantinois ». Interrogée sur
les problèmes que rencontre cette corporation, Mme Facih Nacéra a préféré,
plutôt, s'adresser aux familles, en les invitant à venir visiter l'exposition
pour aider et encourager les jeunes artisans, surtout en cette période où ces
familles s'apprêtent à organiser les fêtes de succès aux examens scolaires et
des mariages. Elle consentira à ne parler des problèmes
propres aux artisans que pour signaler le manque flagrant d'organisation de
foires et expositions, à Constantine, leur permettant de sortir de l'ombre pour
communiquer, avec le public, afin de lui montrer leur savoir-faire. Et pour
cela, elle a évoqué les programmes en préparation pour remédier à cette lacune
et faire participer ses adhérents aux expositions nationales et
internationales. Mais cela ce sera pour le moyen et le long termes. Dans
l'immédiat, la corporation vit, certainement, des difficultés et ce sont les
artisans, eux-mêmes, qui les ont évoqués. Ainsi, M. Merabet Younès, artisan
professionnel en confiserie traditionnelle ancienne et qui active, dans ce
créneau, depuis les années 1960, du siècle dernier, formé par de grands maîtres
artisans, ayant toujours travaillé avec ses propres moyens matériels et
financiers, a résumé en quelques phrases la marginalisation dans laquelle a
toujours vécu cette corporation. « On ne nous sollicite guère pour participer
aux foires et expositions dont on n'entend la tenue que par le ouï-dire. Et
notre marginalisation se poursuit. Nous demandons l'aide de l'Etat pour
perpétuer nos métiers qui commencent à disparaître. J'ai élaboré un projet de
création d'une école pour former des artisans sur les métiers traditionnels
constantinois purs, dans le segment nutritionnel, mais je n'arrive pas à le
faire aboutir par manque de soutien, notamment financier ». C'est le même souci
pour Mlle Beningliz-Bey Hind. qui s'est spécialisée dans la fabrication d'un
plat traditionnel constantinois, bien connu et prisé dans les fêtes de mariages
appelé « Chbah Safra », mais aimerait bien développer son activité. « Je ne
prétends pas monter une usine pour industrialiser le produit, mais juste un
petit atelier et employer, avec moi, quelques ouvrières, pour contribuer à la
préservation du charme de ces plats traditionnels », souhaite-t-elle.