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Abdelaziz Bouteflika a prêté serment hier devant une salle pleine à craquer et dans laquelle les interrogations se sont mêlées à une profonde compassion. L'on pouvait, en effet, déceler sur des visages des signes de grandes interrogations, certainement sur ce qui fera demain, comment et avec qui sera-t-il fait. Mais dès les premiers mots prononcés par le président de la République, des visages se sont attristés pour afficher une profonde compassion. Il faut reconnaître que l'homme qui s'est présenté hier pour marquer la solennité de son investiture pour un 4ème mandat présidentiel, n'a plus rien de celui qui était arrivé en 1999 décidé à accaparer les pouvoirs. Il a certes réussi sa gageure en détrônant les plus tenaces d'entre les hommes du régime. Ne lui reste que quelques pas à franchir pour mettre définitivement fin à un système politique qu'il connaît parfaitement pour avoir été l'un des ses architectes. Il semble s'être promis de le faire jusqu'au dernier souffle. C'est vraisemblablement ce qu'il a voulu montrer hier à la face du pays et du monde. La cérémonie de son investiture a été organisée hier au Palais des Nations de Club des pins. Hauts responsables des corps constitués, membres du gouvernement, responsables d'institutions publiques et privées, membres du Parlement, responsables de partis politiques (excepté le MSP et le reste des membres de l'alliance), représentants de la société civile, hommes d'affaires et autres responsables de médias, corps diplomatiques étrangers accrédités à Alger, tous étaient présents hier à cette prestation de serment. La salle débordait de monde. L'on pouvait voir à l'œil nu que le pouvoir de l'argent a bien pris le dessus sur celui des hommes en uniforme. Le nombre des premiers, les hommes d'affaires aux grosses fortunes, dépassait la centaine alors que celui des seconds était à peine visible de par les uniformes qu'on remarquait dans la salle. Evidemment, ceux à la retraite des corps constitués étaient bien là mais désormais sans aucune force décisionnelle. Même les artistes étaient de la partie. Parmi eux, Mohamed Lamari et Hocine Lasnami, mais tout le monde avait repéré le large sourire de Khaled. Bouteflika conduit par son homme de protocole Convoquée à 8h, l'assistance devait attendre jusqu'à 11h pour voir Bouteflika faire son entrée dans la salle sur sa chaise roulante. Il était arrivé au Palais des Nations à 10h37. Son image était retransmise en direct sur l'écran géant de la salle. Il avait passé en revue des détachements des corps constitués, eux, au rythme des tambours, des instruments à vent et du chant patriotique Min Djibalina, et lui assis dans sa chaise roulante. Il leur rendra le salut conformément aux usages protocolaires. A ce moment-là, son image a été agrandie à l'écran. La salle applaudit. La cavalerie de la Garde républicaine lui faisait la haie d'honneur. Ce cérémonial durera dix minutes. Bouteflika est dirigé vers la salle. Entre-temps, l'image sur l'écran géant a été arrêtée sur l'emblème national flottant au gré des vents. Un silence religieux s'installe dans la salle. A 10h50, Bouteflika a salué les ministres détenteurs de portefeuilles de souveraineté. A 11h, il a fait son entrée dans la coupole, conduit par son habituel homme de protocole et à ses côtés son frère Saïd. Nacer était présent aussi mais un peu loin. L'assistance se lève et l'acclame fortement avec l'appui des youyous. Il est placé devant une tribune abaissée pour la circonstance. L'ouverture de la cérémonie se fait par la lecture de la Fatiha. Le 1er président de la Cour suprême, lui, fera celle des termes du serment tels que consacré par l'article 76 de la Constitution. Slimane Boudi rappellera en outre à l'assistance que cette prestation de serment se fait « une semaine après l'annonce le 22 avril 2014, par le Conseil Constitution, des résultats du scrutin du 17 avril dernier et conformément à l'article 75 de la Constitution ». «RANA MAAK !» Bouteflika répétera après le 1er président de la Cour suprême les termes du serment, en gardant la main droite sur le Saint Coran. Il le fera avec une voix cassée, inaudible au début, devenant quelque peu claire mais restée très faible tout au long de la prestation de serment. Le 1er président de la Cour suprême rappelle encore une fois la conformité de la cérémonie avec les articles 75 et 76 de la Constitution et déclare Bouteflika président de la République. La salle se lève sous la mesure des applaudissements et des youyous. Bouteflika a prêté serment pendant à peine deux minutes. Mais à la surprise de tous, il s'essaiera à prononcer un discours dont les copies ont été distribuées bien avant son arrivée. Il en lira juste la première des 12 pages écrites. Il prendra deux autres petites minutes pour le faire. Même s'il voulait les lire toutes, il n'aurait pas pu. Sa voix devenait de plus en plus faible et il peinait à prononcer les mots. Un moment qui noue la gorge et l'estomac. D'ailleurs, nombreux des invités ont avoué avoir pleuré à cet instant. La compassion se lisait sur beaucoup de visages. Son homme de protocole le ramène juste au devant de la scène pour que les éléments de la Garde républicaine entonnent l'hymne national jusqu'au dernier couplet. Ce titillement de la fibre patriotique et nationaliste est venu s'ajouter au sentiment de compassion qui s'est dégagé de la salle. La sortie de la salle du président de la République est fortement applaudie et accompagnée de youyous. « Rana maâk ! Yahia Raïs » fusèrent du milieu de la salle. |
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