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Dénonçant une anarchie dans le secteur : Les opticiens voient rouge

par Abdelkrim Zerzouri

On voit flou dans la profession des opticiens lunetiers. Plus personne n'est en mesure de faire la différence entre un marchand de lunettes, un artisan en possession d'un certificat d'aptitude professionnel et un opticien spécialisé de santé publique. Ce dernier étant, selon la réglementation en vigueur, le seul habilité «à réaliser et à adapter les articles destinés à corriger les défauts ou déficiences de la vue sur prescription médicale», se trouve désormais concurrencé, dans une confusion des genres artistiques et d'une vile manière, par de nombreux autres commerçants qui n'ont absolument rien à voir avec le métier. «C'est la confusion totale» dans les missions de tout un chacun, estime un groupe d'opticiens diplômés de la wilaya de Tlemcen qui a alerté, à travers une lettre dont copie est en notre possession, toutes les autorités concernées par la problématique que pose l'exercice de cette profession dont l'importance a trait au précieux sens de la vue. Estimant qu'il y a un véritable amalgame sur le terrain, ces opticiens dénoncent «une méprise flagrante entre la loi qui précise les obligations d'un opticien qui exécute les prescriptions de l'ophtalmologue, alors que l'artisan est un simple monteur de cadre de lunettes devant travailler sous le contrôle d'un opticien. Or, il s'avère que l'artisan peut ouvrir une officine et exécuter le travail d'un opticien», sans être inquiété par des agents de contrôle, ni s'inquiéter lui-même outre mesure des dégâts et dommages qu'il peut causer aux citoyens et à l'Etat qui paie au bout du compte la facture de ces errements dans les octrois d'autorisation d'exercice de la profession. Quelle aberration peut-elle ouvrir la voie devant un artisan monteur-réparateur de lunettes pour s'auto- proclamer opticien lunetier et lui permettre en un trompe-l'œil de faire le travail dévolu aux spécialistes ? Le groupe d'opticiens qui a tiré la sonnette d'alarme à propos de la décadence de la profession préconise l'application de la loi avec fermeté et vigueur, « il y a lieu d'interdire l'exécution des travaux réservés à l'opticien, voire l'interdiction carrément aux artisans lunettiers d'ouvrir des officines d'opticiens », clame-t-on, expliquant ou argumentant dans ce sens que « l'article 602102 du registre de commerce réglemente clairement les tâches d'un opticien lunetier conformément à la loi, alors que sur le terrain, l'artisan n'a pas besoin de registre de commerce et se trouve de ce fait en porte-à-faux de la loi ». Et on ajoute dans ce contexte que « la correction de vue doit être assimilée à un acte médical devant être pratiqué par des compétences avérées, contrôlées et soumises à un registre de commerce sous des conditions plus précises et plus draconiennes. Il est impératif de classer le métier dans la catégorie des pharmaciens et les soumettre aux mêmes conditions de formation et d'autorisation d'exercice ». D'autre part, on dénonce des pratiques frauduleuses dues à cette banalisation d'une profession médicale. « Grâce à un jeu subtil, avec un agrément délivré par le ministère de la Santé, on ouvre son officine d'optique médicale et en utilisant la codification 512102, on ouvre d'autres magasins de vente en détail de lunettes non médicales dans lesquels magasins l'optique médicale sera pratiquée sans le moindre souci de charges fiscales, parafiscales et sociales, du moment qu'un seul cachet est utilisé pour tous les locaux ! », dénonce-t-on encore. Voilà au moins une explication à ces enseignes lumineuses qui poussent comme des champignons sur les devantures des locaux dans les centres urbains. Il y a aussi à souligner que le citoyen est averti et qu'il doit faire la différence entre un opticien médical et un lunetier réparateur de cadre de lunette auquel il ne faut sous aucun prétexte confier sa vue.