
Annoncée en
filigrane le 3 mars dernier dans un communiqué émanant du syndicat d'entreprise
d'ArcelorMittal Annaba, la colère des sidérurgistes qui est montée hier d'un
cran a entraîné la paralysie d'une bonne partie de l'usine.
Un arrêt de
travail intempestif initié dans la matinée d'hier d'une façon inopinée par près
de 60 % de l'effectif global a gravement perturbé la chaîne de travail au
niveau du complexe, nous a confirmé une source syndicale. On est donc arrivé au
stade de la grève sauvage, déclenchée dans un climat tendu, qui plus est marqué
par une grave rupture de dialogue et des relations entre le partenaire social
et l'employeur au pire du pourrissement. « Le partenaire social a décidé de
rompre toute relation de travail avec tout le staff de la direction des
ressources humaines jusqu'à ce qu'une décision ferme et juste soit engagée par
la direction générale à l'encontre du DRH et son équipe », a-t-on pris soin de
rappeler sur le PV de carence établi le 3 mars par le syndicat d'entreprise.
Comme le répétaient ces derniers jours, avec insistance, les membres du comité
de participation et les syndicalistes, le risque de voir les travailleurs
prendre eux-mêmes à bras le corps leur revendication et s'engager dans des
actions de protestation sans balise ou couverture syndicale est maintenant une
réalité qu'il faut gérer avec toutes les conséquences envisageables dans ce cas
de figure. Les grévistes dont les revendications portent sur plusieurs
préoccupations socioprofessionnelles, soumises auparavant par leurs
représentants, à savoir le non-respect de la convention collective,
surexploitation humaine en heures supplémentaires, licenciement abusif, refus
de mettre en place un nouvel organigramme et non-respect du pacte de stabilité
sociale, durcissent aujourd'hui le ton en exigeant carrément le départ du
directeur des ressources humaines et toute son équipe, accusés d'être à
l'origine du conflit par leur attitude foncièrement provocatrice. « C'est un
préalable (ndlr, le départ du DRH et son staff) à toute discussion et
négociation visant une reprise de travail », a-t-on appris hier auprès des
travailleurs. Ces derniers sont convaincus dur comme fer que le partenaire
étranger « est en train de saborder l'outil de travail, visant clairement la
mise sur le carreau de la moitié des salariés à travers les pertes qu'il fait
subir au complexe, des pertes évaluées à 2,5 milliards de centimes par semaine
», nous a avoué récemment un syndicaliste qui n'a pas manqué hier de rappeler
qu'on ne peut en vouloir au syndicat d'entreprise qui a tiré la sonnette
d'alarme à propos d'une grogne des travailleurs qui déboucherait fatalement sur
une crise si l'on ne traite pas rapidement les problèmes d'une façon radicale.
Pour le moment, les syndicalistes ne font que constater la montée de la colère
des travailleurs qui rejoignent la contestation par groupes massifs. Hier dans
l'après-midi ce sont les travailleurs du haut fourneau, le cœur du complexe
sidérurgique, qui ont rejoint le mouvement de débrayage et la grogne ne cesse
de faire boule de neige. « Pratiquement toutes les unités productives sont à
l'arrêt », nous a indiqué hier en fin d'après-midi M. Ammouri, le porte-parole
du syndicat d'entreprise d'ArcelorMittal Annaba, tout en signalant que rien à
l'horizon ne plaide en faveur d'un dénouement. En tout cas, la conjoncture avec
laquelle coïncide cette énième protesta des sidérurgistes n'est pas de bon
augure.