Il est maintenant
admis que la capitale de l'Est, surtout en son centre, ressemble chaque vendredi
à une ville fantôme, pour ne pas dire une ville morte. Et ce fait saute aux
yeux en parcourant toute l'agglomération comprise entre la place de la Pyramide
et la place des Martyrs, en somme, l'hyper-centre de la ville, à la recherche
d'un magasin ou d'un café ouvert, d'une pharmacie ou d'un quelconque commerce.
Errant dans les rues, un citoyen d'un certain âge, malade et suivant un
traitement médical l'obligeant à une injection intramusculaire quotidienne,
nous raconte le calvaire qu'il endure chaque week-end, le vendredi et le
samedi, «dans la ville qui se prépare à accueillir, dans un an, un évènement
exceptionnel qui fera d'elle la capitale de la culture arabe», a-t-il dit sous
le ton de l'ironie mais avec fatigue et dépit. «Pas plus tard que samedi passé,
n'ayant pas de connaissance qui puisse me faire l'injection, j'ai dû parcourir
les rares pharmacies ouvertes, les services des urgences du Centre
hospitalo-universitaire, mais sans résultat. Dans les officines
pharmaceutiques, on m'a dit qu'ils ne sont pas habilités à faire un tel acte
médical. Dans le service des urgences du CHU, on m'a balancé d'une structure à
une autre avant de me déclarer qu'ils ne sont pas habilités, non plus, à faire
des injections aux malades venant de l'extérieur. Au moment où j'avais cru que
j'allais rater complètement mon injection quotidienne, tellement indispensable
pour mon traitement, une âme charitable, qui avait entendu mes plaintes, est
venue à mon secours et j'ai pu faire mon injection». Et de conclure en se
demandant si, par accident, les hôtes de la ville de Constantine qui vont être
là en 2015 ne vont pas connaître la même mésaventure que ses pauvres citoyens
qui y vivent en permanence et supportent journellement ces dysfonctionnements.
«Pourquoi les injections ont-elles été interdites dans les pharmacies ?
Pourquoi les établissements sanitaires de proximité, les cliniques et autres
dispensaires sont-ils fermés pendant les deux jours du week-end ? », s'est
interrogé notre malade. Sa première question nous l'avons posée hier à
plusieurs pharmaciens de la ville. Les uns se sont contentés de nous répondre
que la réglementation ne leur permet pas de faire des injections, même si le
concerné est en possession d'une ordonnance du médecin. Les autres n'ont pas
caché que cette prestation leur convient parfaitement et qu'ils ont demandé à
leur syndicat, le Snapo, de l'inclure, ainsi que les analyses, parmi les
revendications à présenter aux pouvoirs publics. Pour la seconde interrogation,
nous n'avons, malheureusement, pas pu entrer en contact avec des responsables
de la direction de la santé ou la direction de la communication du CHU. Les
lignes téléphoniques étaient constamment occupées ou carrément fermées, comme
le sont souvent, dans la ville de Constantine, les moyens d'existence et de
soins durant les week-ends et les jours fériés. «Où allons-nous si l'on
n'arrive même pas à se faire une petite injection ?!», s'est interrogé, en
conclusion, le malade en question.