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Dans une deuxième tentative de calmer le jeu : Bouteflika lâche Saâdani, défend le DRS, met en garde la presse

par Salem Ferdi



Amar Saâdani est un «irresponsable» qui a donné des arguments aux «ennemis» de l'Algérie pour essayer d'attenter à l'unité de l'armée et à inventer des «conflits imaginaires» entre les institutions de l'Etat. Le désaveu a été exprimé par Bouteflika qui a défendu avec vigueur le DRS (Département Renseignement et sécurité) et implicitement son chef, le général Mohamed Mediene dit Toufik.

Le président Abdelaziz Bouteflika a désavoué de manière sans équivoque le secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, dont les propos «irresponsables et irréfléchies» ont été, selon lui, exploités à l'intérieur et l'extérieur pour faire accroire l'existence d'un conflit entre la présidence et les services de renseignements (DRS) ou au sein de l'armée. Amar Saâdani n'est pas cité nommément mais il est clairement désigné sous le nom d'une «haute personnalité publique» qui a émis des déclarations «irresponsables» et «non mesurées». Des déclarations qui ont été, affirme Bouteflika, suivies de commentaires et d'écrits de presse développant la thèse de divergences au sein de l'armée et de conflits entre les appareils de l'Etat.          Ceux qui sont à l'affut veulent faire accroire faussement en l'existence de divisions au sein de l'armée et suggérer que le DRS agirait en dehors de tout cadre légal, affirme Bouteflika. Le président de la République a déjà essayé de «calmer le jeu» dans son message adressé aux victimes du crash de l'avion militaire à Oum El-Bouaghi. Mais en termes très généraux qui n'ont pas eu l'effet escompté. «Nul n'est en droit, quelles que soient ses responsabilités, de s'en prendre à l'Armée nationale populaire ni aux autres institutions constitutionnelles», avait-il déclaré. Il avait dénoncé un «acharnement» sans précédent visant à porter atteinte «à l'unité de l'Armée nationale populaire ainsi qu'à la stabilité du pays et à son image dans le concert des nations». Le message était tellement général sur les responsables que même Amar Saâdani s'est même permis d'en faire une exégèse en sa faveur. Il avait souligné qu'il n'était pas le seul destinataire du message présidentiel mais que celui-ci était adressé à tout le monde. Sans surprise, cette tentative de siffler la «fin de partie» est restée sans écho comme en témoigne la charge de l'ex-général Benhadid contre le «clan présidentiel» et le général Gaïd Salah.

CELUI PAR QUI LE DERAPAGE EST ARRIVE

Pour essayer de calmer le jeu cette fois, le président Bouteflika désigne de fait Saâdani comme étant celui par qui le dérapage est arrivé et surtout il défend avec force le DRS et son chef, le général Mohamed Mediene, qui n'est pas cité nommément. A l'encontre des propos de Saâdani sur les intrusions du DRS dans les partis, la presse et la justice, le président critique ceux qui prétendent que les services de renseignements agissent en dehors du cadre du règlement. Il en appelle les services à continuer à travailler normalement sans tenir compte des attaques. «Le Département du Renseignement et de la Sécurité, en tant que partie intégrante de l'Armée nationale populaire, doit continuer à exécuter ses missions et attributions». «Nul n'est en droit d'attenter aux fondements de l'édifice républicain ni aux acquis.  Nul n'est en droit, quelles que soient ses responsabilités, de se placer au-dessus des dispositions de la Constitution et des lois de la République».

UNE CHARGE CONTRE LA PRESSE

Dans ce nouvel appel à la cessation des hostilités, les acteurs, visibles ou non, sont appelés à ne pas «régler des comptes personnels» au détriment des «intérêts suprêmes» de la nation. Alors que le pays a vécu - et vit toujours - avec inquiétude les débordements dans le sérail, le président affirme même que ces problèmes seraient purement imaginaires voire un complot ourdi. «Contrairement aux allégations et aux spéculations rapportées par voie de presse au préjudice de la stabilité de l'Etat et de l'Armée nationale populaire, le Département du Renseignement et de la Sécurité reste pleinement mobilisé pour la bonne exécution des missions qui lui incombent, à l'instar des autres composantes de l'Armée nationale populaire».     L'appel à l'unité, à refuser les divisions qui affaiblissent et font de l'Algérie une «proie» s'accompagne d'une charge contre la presse. Dans l'habituelle tendance à mettre en cause le messager quand le message est déplaisant. Le président évoque des menaces «palpables» contre l'Algérie liées à la situation sécuritaire aux frontières du pays. Il demande à cet effet «aux responsables concernés à prendre les mesures nécessaires pour un retour au niveau souhaité de coopération et de coordination sain à tous les niveaux et faire que toutes les structures et responsables travaillent suivant le cadre réglementaire régissant leur activité au service de l'intérêt supérieur de la nation». Les forces armées et les services sécuritaires sont, affirme-t-il, la cible des «forces sournoises» et «des Etats» qui les instrumentalisent afin de paralyser les activités de sécurité nationale. La cible, c'est l'armée et l'Etat national. Des «conflits imaginaires» au sein de l'Etat sont inventés dans le cadre d'une «opération étudiée» visant à attenter à l'indépendance du pays.