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Hollande présente ses regrets à Bouteflika : Un «coup de fil» pour effacer une boutade polémique

par Moncef Wafi

Le semblant d'incident diplomatique ou la brouille passagère entre Alger et Paris, né d'une plaisanterie «douteuse» du président français sur l'Algérie, est en train de se résorber à grande vitesse, si l'on croit tous les discours d'apaisement échangés des deux rives de la Méditerranée. Ainsi, et selon l'APS qui rapporte une source officielle, le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, a reçu ce lundi une communication téléphonique de son homologue français François Hollande. Ce dernier, au plus fort de cette «tempête» médiatico-partisane, a exprimé dimanche dernier ses «sincères regrets» pour «l'interprétation» faite de ses propos tenus récemment sur l'Algérie, selon un communiqué de l'Elysée. La même source indiquera qu'il fera part de ses regrets «directement au Président Bouteflika».

Rappelons que toute cette affaire trouve son départ, le lundi 16 décembre dernier, lors d'une rencontre officielle du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) qui fêtait ses 70 ans. Visiblement peu au courant de l'agenda de son gouvernement, et évoquant un futur voyage de son ministre de l'Intérieur Manuel Valls en Algérie, François Hollande, visiblement un peu trop euphorique, selon le tweet du coprésident du Front de gauche, Jean-Luc Mélanchon, a souhaité bon voyage à son ministre avant de se faire reprendre par ce dernier qui lui expliquait, à l'oreille, qu'il revient justement d'Algérie. Le président français ne trouvera pas comme répondant que de se réfugier derrière un humour douteux, selon les Algériens, en le félicitant de son retour «sain et sauf». Les critiques aussi bien du côté algérien que des adversaires politiques internes de M. Hollande ont fusé exigeant du président socialiste des excuses publiques.

Samedi 21 décembre, soit cinq jours après la boutade polémique, le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, réagit en la qualifiant «moins-value» à l'esprit qui enveloppe les relations algéro-françaises. A propos de cette affaire, il dira qu'il est préférable de tourner la page eu égard à l'embellie des relations bilatérales entamées par la visite d'Etat de François Hollande en Algérie. «Ce qui pose un problème dans l'absolu, c'est quand des propos sont sortis de leur contexte pour être instrumentalisés», a affirmé ce lundi la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, comme pour mettre un terme à cette histoire «franco-française», si l'on se fie au «Canard Enchaîné» qui affirme que la blague ne visait pas l'insécurité régnant en Algérie mais plutôt les relations à couteaux tirés entre le Premier ministre Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls, tous deux partis dans le même avion. Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a appelé M. Hollande à présenter des excuses pour ses propos «provocateurs» à l'encontre de l'Algérie alors que le Rassemblement national démocratique (RND) a estimé que ces mêmes propos «dénotent la haine vouée par les Français aux Algériens». La porte-parole du RND, Mme Nouara Saadia Djaafar, a qualifié cette plaisanterie d'un retour «au point de départ». Si pour la classe politique algérienne, et pour le reste de l'Algérie, ces propos qui renvoient à une époque révolue de l'histoire toute récente du pays n'est pas passée, les partis d'opposition en France n'ont pas mis de gants pour condamner ce dérapage verbal surtout après la visite du Premier ministre français Jean-Marc Ayrault à la recherche de nouveaux marchés pour les entreprises hexagonales. Jean-François Copé, le président de l'UMP, regrette lui «le dernier dérapage verbal du président de la République» expliquant que «l'exigence de la fonction présidentielle n'autorise pas une formule aussi déplacée». L'ex-ministre UMP, Valérie Pécresse, a qualifié ces mêmes propos de «particulièrement maladroits» alors qu'un responsable du parti de droite, Geoffroy Didier, avait, lui, qualifié d' «indigne» et d' «ironie fétide» la boutade du chef de l'Etat français, estimant que le président français devait «présenter ses excuses au peuple algérien».

Devant ce tollé, la présidence française, devant l'impossibilité de nier ce «dérapage», a essayé pour le moins de minimiser l'incident diplomatique créé entre Paris et Alger en le faisant passer pour une simple «plaisanterie légère». La communication de l'Elysée tente alors d'expliquer que cette plaisanterie «pouvait viser n'importe qui dans n'importe quel pays et qui n'avait aucun sens particulier concernant l'Algérie». Pourtant difficile de croire à cette thèse connaissant le passif entre les deux pays et surtout la perception qu'ont les socialistes français de l'Algérie. «Il n'y a pas de tension particulière au niveau des autorités algériennes», a ajouté la même source élyséenne après qu'Alger eut réagi timidement aux propos jugés déplacés de Hollande.