Le périmètre
irrigué de Maghnia créé en 1974 a désormais son budget bien à lui. Une somme de
400 milliards de centimes a été accordée par le Premier ministre lors de sa
dernière visite à Tlemcen. À quoi va servir cet argent ? Selon un ingénieur
agronome des services agricoles de Tlemcen, il s'agira notamment d'améliorer la
situation des ressources hydriques par le financement de la fourniture, le
transport, la pose et l'essai de dizaines de kilomètres de conduites, soit en
PVC, soit en béton précontraint à âme tôle (BPAT) dans le périmètre irrigué qui
s'étend sur une superficie de plus de 5.000 hectares dont une partie est
enclavée entre Oued Ouerdeffou et Oued Abbès qui donnent naissance à Oued Tahar
Haret. Ce dernier est un sous bassin de la Tafna. De même, il est prévu la
réalisation de plusieurs infrastructures inhérentes au projet, à savoir
stations de pompages et réservoirs. L'impact de ce méga-projet est plus que
positif, puisqu'il créera des centaines d'emploi directs et indirects, mais
aussi favorisera l'agriculture et préservera les nappes souterraines. Le
développement du périmètre d'irrigation de la région de Maghnia aura pour
conséquence directe d'augmenter le rendement et la production agricole en
mettant en place un climat favorable au déploiement d'unités agro-industrielles
et par là même améliorera le niveau de vie de la population rurale et
l'incitera à diversifier la gamme des cultures et relancera toutes sortes
d'élevage animal. « L'irrigation se définit comme l'apport artificiel d'eau aux
cultures, en complément aux précipitations naturelles. L'objectif est de créer
des conditions favorables de production, tant au point de vue quantitatif que
qualitatif. Le réseau d'irrigation est un ensemble formé par des organes,
ouvrages et appareils qui assureront le transport, la répartition et la
distribution des eaux à chaque exploitation agricole ainsi que l'évacuation des
eaux excédentaires », souligne cet ingénieur agronome. Selon lui, pour
alimenter un périmètre d'irrigation, deux conditions doivent être réunies : «
premièrement, le niveau de l'eau doit permettre le fonctionnement du canal
pendant la période où l'on a besoin d'eau. Deuxièmement, il faut maitriser la
quantité d'eau que l'on dérive vers le périmètre en fonction des besoins et des
variations du niveau de l'eau dans la rivière. La construction d'un ouvrage de
prise contrôlant les conditions d'amenées d'eau vers le canal est donc
nécessaire. C'était un moment très attendu à la fois par les « petits » et «
gros » agriculteurs que par des travailleurs de l'Office du périmètre irrigué
(OPI) qui souffraient le martyre avec l'ancien périmètre irrigué qui a sombré
dans l'oubli à la suite du délabrement de toutes les canalisations et la
détérioration des équipements hydromécaniques. Il faut rappeler qu'il n'y a pas
longtemps, la plaine de Maghnia, véritable grenier de l'Ouest, battait tous les
records dans la production de la pomme de terre et des céréales grâce à ses
terres très fertiles. « Cette terre, c'est le rêve ! Pas un caillou sur des
centaines d'hectares, elle part en poussière quand on la travaille et elle
n'use pas le matériel. Elle est extrêmement fertile et surtout, elle stocke
bien l'eau. Aucune région ne dispose de terres de cette qualité », explique un
fellah de Maghnia. Mais, la rareté croissante de l'eau et l'urbanisation ont
imposé une grande pression sur les capacités d'irrigation. La production de
pommes de terre et des céréales, secteurs extrêmement dépendant de
l'irrigation, font ainsi face à un défi sans précédent. La sécheresse a frappé
fort dans cette zone. Les puits se sont asséchés. Les agriculteurs ont été
obligés de vendre leur bétail, des familles entières ont dû abandonner leurs
champs et leurs maisons pour regagner la ville et rechercher d'autres boulots.
Ceux qui sont restés, ont recouru aux forages et c'est toute la nappe d'eau qui
en pâtit. En effet, la multiplication des forages à travers toute la plaine de
Maghnia a mis en danger l'ensemble des ressources hydriques. Le nombre de
forages est estimé à des dizaines et chaque semaine de nouveaux trous sont
forés ! Plus de 10 forages par kilomètre carré. Un vrai gruyère ! Certains
forages mal réalisés, abandonnés ou multi-crépines constituent un vecteur de
pollution important pour les eaux de la nappe. Cette contamination a lieu en
période estivale quand les pompages intensifs réalisés dans la nappe profonde
entraînent une baisse importante de la pression dans l'aquifère. Le phénomène
de détérioration de la qualité des eaux profondes est déjà mis en évidence dans
plusieurs secteurs de la plaine de Maghnia à cause des concentrations en
chlorures dans les nappes profondes et des nitrates présents dans la nappe
superficielle qui se retrouvent par endroits dans la nappe profonde. « Un
forage est un ouvrage d'art complexe dont la majeure partie n'est pas visible.
Pour qu'un forage dure longtemps et qu'il préserve les eaux souterraines, tant
du point de vue quantitatif que qualitatif, sa réalisation doit respecter
certains principes et certaines règles obligatoires. Tous les forages doivent
être munis d'un compteur et déclarés obligatoirement en mairie et tout forage
supérieur à 10 m doit être déclaré à la banque de données du sous-sol »,
souligne un technicien des services agricoles de Maghnia. Ainsi, les besoins
agricoles au niveau national vont continuer d'augmenter ces prochaines années,
la plaine de Maghnia se doit d'être bientôt prête.