
Qui peut se
targuer d'être à l'abrid'un accident de la circulation, d'un accident
domestique ou de travail qui entraînerait des lésions médullaires le clouant au
lit ? Combien de personnes sont tombées alors qu'elles marchaient
tranquillement et qui se sont retrouvées paraplégiques ou tétraplégiques ? Les
statistiques étant ce qu'elles sont, en Algérie, nous ne pouvons qu'extrapoler
sur le nombre en disant qu'il est vraiment élevé. Tous ces malades se
retrouvent, du jour au lendemain handicapés moteurs car les lésions qu'ils ont
subies sur la colonne vertébrale les ont privés de motricité et de certaines
fonctions pas vitales mais très contraignantes. Scientifiquement, les lésions
médullaires (blessures médullaires) sont liées à la moelle épinière et sont
causées par un traumatisme qui a touché cette dernière, ce qui empêche les
informations et les ordres d'aller du cerveau vers les parties en-dessous du
lieu de la lésion. Pour rappel, un tétraplégique est un malade qui a perdu
l'usage de ses quatre membres et le paraplégique est celui qui a perdu l'usage
des membres inférieurs. En plus de réduire la motricité, ces lésions peuvent
affecter, et ceci dans la plupart des cas, le fonctionnement des organes,
notamment la vessie et les intestins ou le sphincter. Ces disfonctionnements
deviennent très contraignants et le blessé devient un poids très lourd pour ses
proches. Parfois ces lésions guérissent mais c'est plutôt rare et rien n'est
laissé au hasard pour que le malade puisse reprendre un peu de sa motricité et
il est alors, tout naturellement, dirigé vers le service de rééducation
fonctionnelle où les spécialistes tentent de lui redonner, sinon une liberté de
mouvements, du moins qu'il réapprenne certains gestes en fonction des lésions
qu'il a subies. A partir de là, le malade devient un habitué des hôpitaux,
souvent pour toute sa vie, et sa prise en charge est souvent difficile, même
avec les meilleures volontés des médecins et paramédicaux qui le soignent.
C'est afin de
trouver les meilleurs moyens de venir en aide à ces handicapés qui ont vu leur
vie basculer en un laps de temps très court et qui doivent réapprendre les
gestes les plus simples du monde, que le Pr Chérif Abdelkhallak Nouar, chef du
service de rééducation fonctionnelle au CHU ?Frantz Fanon' a décidé
d'organiser, le 21 décembre prochain, une journée ayant pour thème principal :
?Les lésions médullaires'
Cette journée est
destinée à faire connaître cette spécialité que «de nombreux confrères ignorent
ou connaissent mal, alors que nous devons travailler en étroite collaboration
avec la plupart d'entre eux» nous a affirmé le Pr Nouar. Ainsi, et selon notre
interlocuteur, les gens ne voient, en général, que la partie visible de ces
lésions car, souvent, «ils disent que tel individu est tétraplégique ou
paraplégique et c'est tout, oubliant que derrière ce constat, c'est toute une
prise en charge qu'il faut penser car cet homme (ou cette femme) est devenu,
subitement, handicapé et il a alors besoin d'un fauteuil roulant, de quelqu'un
qui l'aide dans les gestes les plus simples et les plus naturels comme aller
aux toilettes ou monter des escaliers. Il a aussi besoin qu'on lui réaménage le
lieu où il vit et même le poste de travail qu'il occupait s'il ne peut plus
reprendre ses activités» a continué, d'une traite le Pr Nouar. En outre, le
patient peut être atteint de plusieurs pathologies comme des problèmes
respiratoires, de vessie, des sphincters ou des organes génitaux. Plus que
cela, le Pr Nouar nous a déclaré qu'il y a d'autres problèmes dont on ne parle
pas assez et qui sont très importants, comme pour cette patiente qui l'a
interpellé pour lui faire part de sa volonté d'avoir des enfants : «comment
vais-je faire, Dr ?» a-t-elle lancé d'une voix pathétique. Pour répondre à
cette femme, il faudrait faire intervenir des spécialistes comme les
gynécologiques et les psychologues afin de trouver des solutions, permettant à
ces nouveaux handicapés de continuer à vivre en procréant et en ayant des
relations conjugales normales. Ceci pour le règlement de ce problème, et c'est
la même chose pour les autres cas. Le Pr Nouar estime que pour avoir des
résultats probants, il faudrait avoir des réseaux de médecins qui prennent en
charge, chacun selon sa spécialité ces patients qui présentent des pathologies
en liaison avec leurs nouvelles conditions d'handicapés. Le nombre de lits, au
service de rééducation, est en lui-même un handicap pour les spécialistes de ma
rééducation car : «le nombre de malades augmente, chaque jour, alors que le
nombre de lits est le même depuis plusieurs années, pourtant notre service
n'est pas comme les autres, nos patients demeurent malades toute leur vie et
nous sommes obligés d'en garder beaucoup pour très longtemps, au moment où d'autres
malades, dans les mêmes conditions, arrivent» a tenu à préciser notre
interlocuteur. Il faudrait donc créer d'autres structures qui prennent en
charge ces malades qui nécessitent un compagnonnage à vie. D'autres problèmes
rencontrés par les spécialistes en rééducation fonctionnelle seront,
certainement, mis en avant lors de la journée du 21 décembre et des solutions
préconisées par les intervenants.