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Moins de carburant
d'Algérie et c'est toute la vie de l'Oriental marocain qui s'en ressent. Une
partie de ceux qui vivaient du négoce avec les hallabas se rabat sur un autre
gisement de contrebande. Le nombre des « mules » qui vont à Ceuta et Melilla
est en hausse.
Le durcissement depuis l'été 2013 de la répression de la contrebande des carburants par les autorités algériennes a un impact sur la région orientale marocaine dont l'évaluation n'est pas encore faite. L'activité étant informelle, elle échappe en grande partie à la collecte statistique. Mais l'impact est incontestable comme en témoigne l'accroissement de la contrebande entre le Maroc et les enclaves de Ceuta et Melilla sous domination espagnole. Une partie de ceux qui vivaient de la contrebande des carburants en Algérie se sont reconvertis, en attendant un éventuel relâchement de la lutte contre le trafic. Qui risque de se faire attendre, les autorités algériennes ayant décidé d'alourdir les sanctions pour les « actes de contrebande » de combustibles et carburants (?) avec des peines de prison de un à cinq ans et des amendes égales à cinq fois la valeur de la marchandise saisie. Un responsable de l'APCO (association de protection des consommateurs de l'Oriental), Mohammed Benkaddour, a estimé entre « 3000 et 5000 » le nombre de familles marocaines vivant du trafic du carburant avec l'Algérie. En précisant qu'il faut multiplier ces chiffres par cinq pour obtenir le nombre des personnes concernées et dont les ressources ont été taries par la lutte contre les trafics en Algérie. «COMMERCE ATYPIQUE» L'impact sur les prix des produits de première nécessité a été presque immédiat. Outre les revendeurs de carburants, ce sont les agriculteurs, obligés de s'approvisionner en carburants à des prix marocains, qui subissent les conséquences du « raidissement » algérien. L'agriculture dans la région de l'Oriental marchait très largement - à 75% - avec du gasoil en provenance d'Algérie. Signe de l'importance du facteur carburant algérien, Oujda, avec ses 800.000 habitants comptait moins d'une dizaine de stations-service. Beaucoup de ces stations ont en effet fermé, incapables de concurrencer le carburant algérien. Une partie de ceux qui activaient dans le commerce du carburant algérien se sont reconvertis en « mules » dans ce qui est appelé, par euphémisme, le « commerce atypique » entre les enclaves sous domination espagnole et le Maroc. Pour la seule enclave de Ceuta, le délégué du gouvernement espagnol, Francisco Antonio González Pérez, a estimé à au moins 5000 le nombre de nouvelles « mules » venant du Maroc faire des achats et repartir. Elles étaient déjà estimées à 20.000. Le plus souvent, ce sont des femmes-mules qui ramènent sur leur dos jusqu'à 80 kg de marchandises exemptées d'impôts car considérées comme des bagages personnels. Les femmes-mules font jusqu'à trois voyages par jour et sont payées en général entre 4 et 6 euros la charge. L'activiste marocain Said Chramti, qui milite au sein du Comité de libération de Sebta et Melilla (CLSM), a estimé, dans une déclaration au journal El Pais, l'augmentation du « commerce atypique » au cours du mois de novembre 2013 à environ 40% alors qu'un responsable de la Garde civile espagnole la situe à 20%. DES MULES QUI FONT VIVRE LE COMMERCE DES ENCLAVES Les exportations atypiques de chacune des deux enclaves sont estimées à 700 millions d'euros. Ceuta et Melilla ont exporté en tout pour 1,5 milliard d'euros en 2012. Pour les entreprises espagnoles, le marché marocain est important puisque les marchandises exportées via les enclaves sont soumises à une TVA réduite. Les achats marocains dans la ville de Ceuta représentent entre 40 et 45% de la facturation des magasins, selon un responsable de la confédération des entrepreneurs, Raphaël Montero. Les autorités marocaines tentent de juguler le phénomène qui prend de l'ampleur. Le projet de loi de finances 2014 propose d'interdire aux Marocains résidants à l'étranger de ramener des fourgons des marchandises et les contrôles aux frontières sont devenus plus serrés. Il n'y a pas que les « mules » marocaines qui se plaignent de ce « durcissement », les commerçants espagnols des deux enclaves aussi et le manifestent pas l'organisation de grèves. Selon les chiffres cités par la presse marocaine, le manque à gagner pour l'économie en raison de la contrebande sera de 20 milliards de dirhams par an. |
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