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51 manifestants tués dimanche, 9 morts dans des attentats lundi : L'Egypte dans une mortelle spirale

par Salem Ferdi

Les militaires tiennent la barre et préparent le général Sissi pour la présidence, les Frères musulmans et les anti-coup d'Etat ne désarment pas. Ils manifestent et meurent. Les djihadistes se font plus actifs et multiplient les attaques. Rien n'arrête la spirale mortelle en Egypte.

Au lendemain de manifestations anti-coup d'Etat brutalement réprimées (51 morts) surtout au Caire, trois attentats ont fait neuf morts, hier lundi, dans plusieurs régions. L'Egypte est, depuis la dispersion violente et sanglante, des sit-in des opposants à la destitution de Mohamed Morsi dans un cycle répression-violence qui va en s'amplifiant. Au plan politique, l'armée est engagée dans une politique d'écrasement de l'organisation des Frères musulmans et de ses organisations satellites. Mais les opposants au coup d'Etat, malgré l'emprisonnement de milliers de cadres et la répression, n'ont pas baissé les bras. Les manifestations sont restées régulières dans certaines zones du Caire et dans de nombreuses villes du pays. Elles ont culminé, dimanche, à l'occasion du 40ème anniversaire de la guerre d'Octobre de 1973. Ce devait être l'occasion pour les militaires de mesurer le soutien que leur apporte une partie de la population, hostile aux Frères. Mais les opposants au coup d'Etat ont également décidé de manifester et d'aller, comme «les autres», à la Place Tahrir. Ils en ont été brutalement empêchés par la police. 51 personnes ont été tuées, la police n'a enregistré aucune perte. C'est le bilan le plus sanglant depuis les carnages du 14 août dernier avec l'évacuation brutale des places où les opposants au coup d'Etat organisaient des sit-in. Des sources médicales donnent le bilan de 51 morts et 268 blessés alors que le ministère de l'Intérieur fait état de 47 morts et de l'arrestation de plus de 423 personnes. La police a utilisé des balles réelles et en caoutchouc pour empêcher les manifestants d'arriver Place Tahrir pour gâcher la fête.

PLACE TAHRIR POUR? LE GENERAL !

Les récits des journalistes mettent en exergue la brutalité de l'intervention de la police alors que le ministère de l'Intérieur a accusé les manifestants d'avoir tiré sur les forces de l'ordre et d'avoir vandalisé des biens publics, justifiant ainsi l'intervention musclée. La commémoration sanglante du 40ème anniversaire de la guerre d'Octobre illustre la permanence des divisions au sein de la société égyptienne après la destitution de Mohamed Morsi. Malgré la répression des services de sécurité qui ont «carte blanche» pour tirer sur les manifestants, les Frères musulmans ont maintenu une présence dans la rue. Côté Place Tahrir, les choses ont bien changé. Et alors que les avions militaires survolaient à basse altitude le Caire, les milliers de manifestants rassemblés pour l'occasion ne brandissaient que le portrait du général Sissi, qui est clairement en configuration de devenir le futur «Raïs». C'était la journée du général Sissi et des manifestants tués. Le président par intérim, Adly Mansour, et le Premier ministre jordanien Abdallah Nsour qui accompagnaient le général Sissi dans un stade militaire pour un feu d'artifices faisaient figure de «comparses». Avec un discours et une posture mimant Nasser, il a lancé : «L'armée, la police et le peuple sont ensemble, main dans la main... Nous protégerons l'Egypte, le peuple égyptien et la volonté des Egyptiens».

VIOLENCE DJIHADISTE

L''Alliance contre le coup d'Etat a appelé à d'autres manifestations vendredi et rend les «les autorités responsables du coup d'Etat et les militaires entièrement responsables de tout le sang égyptien répandu en ce moment et de chaque Egyptien qui a été tué aujourd'hui».

Le bras de fer politique perdure alors que la violence djihadiste s'installe dans certaines régions du pays et notamment au Sinaï. Un attentat à la voiture piégée a tué trois personnes dont un policier devant un commissariat de police à Al-Tur, dans le sud de la péninsule du Sinaï. Un coup dur alors que les stations balnéaires de la mer Rouge commençaient à enregistrer un retour des touristes. A Ismaïliya, sur le canal de Suez, six soldats ont été tués par des inconnus qui ont ouvert le feu sur leur patrouille. Dans la nuit, des tirs de roquettes ont endommagé une gigantesque antenne d'un centre de communication satellitaire à Maadi, un quartier huppé du Caire. Vendredi, les anti-coups d'Etat manifesteront, la répression sera au rendez-vous. L'Egypte est dans la spirale.