L'Etat durcit la
loi pour se prémunir contre les nombreux tentacules de la contrebande et le
dernier Conseil des ministres, tenu fin septembre, l'a rappelé en examinant et approuvant
un projet de loi modifiant et complétant l'ordonnance 05-06 du 23 août 2005
relative à la lutte contre ce phénomène. Un nouveau texte de loi qui vient
renforcer l'arsenal juridique déjà existant mis en place par le gouvernement et
le renforcer pour le rendre davantage efficient dans la protection de
l'économie nationale en visant notamment la lutte contre le trafic de carburant
devenue une véritable économie souterraine ces dernières années au niveau des
régions frontalières. Ce projet de loi s'inscrit dans cette optique de mettre
en place un cadre juridique suffisamment dissuasif à même de prendre en charge
les insuffisances enregistrées dans le domaine de la lutte contre la
contrebande. Et pour affirmer la volonté de l'Etat à ouvrir un véritable front
contre la contrebande et souligner sa dangerosité, ce projet de loi prévoit de
mettre sur un même pied d'égalité pénale les infractions relatives à la
contrebande avec ceux du port d'arme à feu ou de la contrebande d'armes, c'est
dire l'engagement du gouvernement à en finir avec ces barons de la contrebande
qui ont bâti des fortunes colossales au détriment de l'économie nationale ou de
la santé publique. Ainsi, la contrebande est assimilée à une forme grave du
crime organisé transnational qui est en relation avec le terrorisme et le
trafic d'armes et de stupéfiants. Par ailleurs, l'article 11 de ce texte, dont
l'APS a obtenu une copie, stipule que tout individu ayant gonflé son réservoir
à des fins de contrebande est passible de deux à dix ans d'emprisonnement et
d'une amende de 200.000 à 1.000.000 DA. Une pratique en vogue au niveau des
frontières terrestres qui consiste à doubler la capacité d'un réservoir ou
carrément à placer un autre réservoir supplémentaire pour optimiser au maximum
les trajets vers le Maroc, la Tunisie ou en direction du Mali. Les
contrevenants sont également passibles, en vertu de ce projet de loi, de «la
radiation, selon le cas du registre de commerce ou du registre de l'artisanat
et des métiers, de la confiscation du matériel utilisé dans la commission de
l'infraction et de la fermeture du local». L'article 11 stipule aussi que
«toute personne qui détient dans le rayon des douanes un dépôt destiné à des
fins de contrebande ou un moyen de transport spécialement aménagé aux mêmes
fins, est punie d'un emprisonnement allant de deux ans à dix ans et d'une
amende égale à dix fois la valeur cumulée de la marchandise et des moyens de
transport confisqués». Pour les hallaba, l'amende prévue est égale à 100 fois
la valeur du carburant sur le marché national. Rappelons que le gouvernement
Sellal avait annoncé, en mai dernier, un durcissement des sanctions prévues
dans le code pénal, en réaction aux chiffres quasi quotidiens des saisies
opérées par les différents services de sécurité au niveau des frontières
terrestres est et ouest. La lutte contre la contrebande est devenue, au fil de
ces derniers mois, une priorité dans le programme du gouvernement conduisant
ainsi les pouvoirs publics à durcir les sanctions. Les frontières algériennes
posent désormais problème à la sécurité intérieure puisque, et à l'instar de
ses frontières sud avec le Mali, le problème de la contrebande a pris des
proportions alarmantes. En effet, il ne se passe pas un jour sans que les
forces combinées de l'armée, des douanes et des gardes-frontières
n'interceptent un convoi en direction des terres maliennes. Au début du mois de
septembre, les éléments des forces combinées ont saisi 7.500 kg de denrées
alimentaires à Timiaouine. Cette affaire vient juste après la dernière saisie
de 300 quintaux de denrées alimentaires par les mêmes services, dans cette
région de l'extrême sud du pays. En mars dernier, ce sont 60 tonnes de denrées
alimentaires qui ont été interceptées. Quatre camions chargés de sacs de farine
et de semoule en route vers le Mali, destinés probablement aux groupes
terroristes éparpillés dans le nord du Mali, ont été arrêtés par les gendarmes
en patrouille sur l'axe Bordj Badji Mokhtar et Timiaouine. Et depuis
l'intervention française dans la région, l'activité des contrebandiers a connu
une hausse importante.
L'inquiétude
d'Alger réside dans cette proportion prise par le phénomène de la contrebande
où denrées alimentaires, carburant, appareils électroménagers, couvertures et
médicaments prennent le chemin du Mali. Une inquiétude renforcée par la
classique interconnexion entre les réseaux terroristes et les contrebandiers
qui leur servent de relais, d'observateurs, de guides et qui les alimentent en
produits de première nécessité et en armes, en contrepartie de l'argent des
rançons.