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Le Qatar sommé d'ouvrir son portefeuille

par Kharroubi Habib

Quand à la « surprise » générale le Qatar a obtenu d'organiser chez lui la Coupe du monde de football 2022, la décision de l'instance dirigeante de la FIFA avait soulevé une forte controverse en Europe et en France spécialement. Elle avait alors tourné autour de la question de savoir s'il était indiqué d'octroyer l'organisation de cet événement à un pays dont le climat terriblement chaud risque de constituer un handicap pour les équipes qui y participeront et dont la population n'est que modérément « accro » au sport roi planétaire. Quelques détracteurs de la décision de la FIFA avaient émis le soupçon que le choix du Qatar est intervenu en résultat d'un « arrosage » financier effectué par l'émir d'un riche émirat dont en a bénéficié la crème du sérail dirigeant de la FIFA et des influentes fédérations nationales et continentales du foot.

Elle a semblé s'éteindre, le Qatar ayant promis de mettre le « paquet » pour que sa Coupe du monde soit un succès à tous points de vue. Mais voilà qu'elle rebondit dans les mêmes lieux sur fond de campagne électorale pour l'élection du président de la très puissante et juteuse FIFA. Les arguments que s'échangent partisans et adversaires de l'organisation par le Qatar de la Coupe du monde sont cette fois de nature politique et morale. C'est un média anglais qui l'a relancé en « révélant » que pour la construction des infrastructures dont le Qatar a décidé de se doter pour accueillir sa Coupe du monde, les autorités ont fait appel à une main-d'œuvre étrangère qu'elles soumettent à des conditions de travail et de vie proches de l'esclavage auxquelles se greffe un manque de sécurité sur les chantiers qui est déjà à l'origine d'une cinquantaine d'accidents mortels parmi cette main-d'œuvre ignominieusement traitée.

Partant de cette « révélation », la polémique a tourné au procès de l'émirat et de la nature rétrograde de son régime. Ce qui n'est pas pour nous chagriner. Sauf que sachant que l'Occident ne couvre d'éloges ou ne s'indigne que quand il a intérêt à le faire, il nous faut savoir pourquoi le Qatar est subitement dans le collimateur des Européens. Ce n'est certainement pas parce qu'en Europe on ignorait que le clinquant de la « modernité » qu'il affiche cache une réalité aussi sordide que celle d'autres Etats du Moyen-Orient qui focalisent leur indignation. Le problème du Qatar qui lui vaut en l'occurrence d'être négativement sur la sellette c'est d'être riche, trop riche.

En annonçant que son pays va injecter 200 milliards de dollars pour la construction des infrastructures en rapport avec la Coupe du monde de football, son émir a fait saliver le monde des affaires et les hommes d'Etat européens dont les économies nationales sont dans une très mauvaise passe. Ils se bousculent pour obtenir une part du pactole au profit de leurs entreprises nationales. Faire alors la pression sur les autorités de l'émirat par la voie du chantage à la dépréciation de l'image de marque au plan international du Qatar et de sa société, ne rebute pas les quémandeurs.

Il n'y a absolument rien de spontané et de sincèrement indigné dans la campagne à laquelle le Qatar est soumis. Elle s'éteindra aussitôt que ceux qui l'ont inspirée obtiendront satisfaction. Ainsi « va le monde » dont le Qatar et l'Arabie Saoudite chloroforment la conscience par la politique du portefeuille. Qui ignore la réalité de ces deux Etats et le projet politique moyenâgeux et liberticide dont ils sont les financiers à travers le monde musulman ? Et pourtant ils bénéficient d'une tolérance qui a le goût du sang et du génocide pour les peuples de cette région.