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Attentat-suicide à Tombouctou : Le Mali renoue avec ses démons

par Salem Ferdi

Un jour après un communiqué d'AQMI, diffusé vendredi par l'Agence Nouakchott d'information (ANI), annonçant de nouvelles nominations, à la tête de deux « unités combattantes », au nord Mali, un camp de l'armée malienne, à Tombouctou a été visé, hier samedi, par un attentat-suicide. Les premières informations faisaient état de la mort de deux kamikazes qui étaient dans le véhicule et de deux civils. L'attaque a visé un camp militaire situé au centre-ville. Deux civils qui se trouvaient à proximité du camp ont été tués. Un militaire membre de la Minusma (mission de l'Onu pour le Mali), déployée à l'aéroport de Tombouctou, a confirmé l'attaque. «Les kamikazes se sont infiltrés dans Tombouctou. Ils sont venus devant le camp pour (faire) exploser leur véhicule. Ils sont morts, et étaient au nombre de deux. Il y a au moins deux blessés civils», a-t-il déclaré. L'attentat est, probablement, le fait des djihadistes qui marquent, ainsi, de manière offensive, les « désignations » effectuées par ?Aqmi' à la tête des «unités combattantes », dans la zone. L'agence Noukchott d'information avait rapporté vendredi que Saïd Abou Moughatil (un Algérien) a été désigné à la tête de la ?katiba Tarek', en remplacement d'Abdelhamid Abou Zeïd, tué au cours de l'intervention française. L'agence faisait état, également, de la désignation, à la tête du bataillon ?Al Forkane' du Mauritanien Aderrahmane, alias Talha, en remplacement de Mohamed Lemine Ould El-Hassen dit Abdallah Al-Chinguitty, tué, lui aussi, au cours de l'intervention française. L'attaque contre le camp de l'armée malienne, à Tombouctou, paraît être le signe d'une « réanimation » de l'activité djihadiste, au nord du Mali.

Attaque à Kidal

Elle intervient dans un contexte de montée des tensions entre les rebelles de l'Azawad et Bamako. Alors que la rébellion a décidé d'une suspension des discussions avec Bamako, deux militaires maliens ont été blessés, vendredi, dans une attaque à la grenade. «Deux grenades offensives ont été lancées, aujourd'hui, contre des militaires maliens qui gardaient une banque, au centre-ville de Kidal. Une seule grenade a éclaté et on compte deux blessés parmi les militaires maliens», a indiqué un responsable malien qui a parlé d'un « attentat contre l'armée ».

L'incident intervient, un jour après la décision de la coordination des mouvements de l'Azawad (Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA, touareg), le Haut conseil pour l'unité de l'Azawad (HCUA, touareg) et le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA) de suspendre les discussions avec les autorités de Bamako. L'incident de Kidal a été jugé, suffisamment, inquiétant pour qu'un responsable de l'organisation ouest-africaine Cédéao et un autre de la Minusma, la mission de l'ONU au Mali, soient dépêchés sur place, en « mission de paix », pour rencontrer des notables. Le Président malien Ibrahim Boubacar Keïta a tenté d'être apaisant à l'égard des mouvements de l'Azawad, en affirmant qu'il est « en train de faire ce qu'il faut ».

Un problème de «confiance»

De New York, il a appelé à la « confiance » pour « obtenir des résultats ». Le ministre malien de Réconciliation nationale et Développement des régions du Nord, Cheick Oumar Diarrah a admis l'existence d'accrochages, depuis la signature de l'accord de Ouagadougou, mais, a-t-il assuré, le « gouvernement malien reste disposé au dialogue», a-t-il dit.

La France qui reste un acteur majeur au Mali, a appelé à la poursuite du « processus de dialogue», à «s'abstenir de tout recours à la violence» et a renouvelé son «soutien» au président Keïta «dans ses efforts pour relever les défis de la stabilisation, du développement et de la paix au Mali. Bamako a apporté des « précisions » au communiqué des groupes armés. Mais le texte porte sur les détails alors que le cœur du différend est la question de « l'autonomie» que Bamako refuse de discuter. Au risque de rallumer les tensions et les feux.