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«Le domaine des
droits de l'hom-me exige de la part des acteurs institutionnels et non
institutionnels une vigilance à toute épreuve, un suivi rigoureux et continu
et, enfin, une évaluation périodique, partielle ou globale, de l'ensemble du
corpus des droits de l'homme afin de prémunir l'être humain des exactions,
violations, manquements ou non-respect de ses droits édictés par les instruments
juridiques nationaux et internationaux», explique le rapport sur les droits de
l'homme établi par la CNCPPDH (Commission nationale consultative de promotion
et de protection des droits de l'homme) et transmis dernièrement au président
de la République.
La CNCPPDH estime que «le cadre légal relatif à la protection et à la promotion des droits de l'homme en Algérie constitue un corpus évolutif, faisant l'objet d'un effort d'amélioration continu et soutenu». Ce constat lui fait dire qu'une volonté politique et une détermination certaine d'aller de l'avant vers la promotion des droits de l'homme est démontrée par les autorités algériennes. Le rapport insiste sur la répression des infractions commises contre les droits, les libertés et les atteintes physiques ou morales de l'être humain, la liberté du commerce, de l'industrie et de la création intellectuelle, artistique et scientifique, l'inviolabilité du domicile, la liberté d'expression, d'association et de réunion, en plus des autres droits fondamentaux que tout le monde connaît. L'Algérie a ratifié plus de 50 conventions et protocoles internationaux relatifs à la protection des droits de l'homme, à la lutte contre la discrimination sous toutes ses formes, aux crimes de guerre, de génocide, de torture ou de crimes contre l'humanité, à la protection des femmes, des enfants, des handicapés, de la jeunesse. Des protocoles, accords et conventions relatifs au terrorisme, aux disparitions forcées, aux droits humanitaires des réfugiés, à l'esclavage et à la traite de l'être humain et du travail forcé, ont aussi été signés ou ratifiés par le Gouvernement algérien. Cependant, et malgré l'engagement officiel de l'Etat et des autorités algériennes en faveur de la promotion des droits de l'homme, «des efforts substantiels doivent être faits pour hisser les lois de notre pays au rang de celles des pays avancés», estime le rapport, «notamment celles en rapport avec la lutte contre la corruption, la valorisation et l'exploitation des ressources humaines, à l'équité des opportunités». Droits de la femme en Algérie Passant au volet évaluation de la question liée au genre (homme-femme), le rapport de la commission présidée par Me Ksentini estime que des progrès notables ont été accomplis en Algérie, bien que d'autres efforts doivent être faits pour atteindre tous les objectifs fixés par les différentes déclarations. Ainsi, l'évaluation du système d'éducation et de formation établit que les filles ont très largement accès à l'éducation et à la formation, représentant près de 50 % des effectifs du primaire et du moyen et plus de 57% dans l'enseignement secondaire, alors que ce taux atteint plus de 44 % des stagiaires de la formation professionnelle. Les filles sont prédominantes aussi dans l'enseignement supérieur avec 58,1 % de l'ensemble des étudiants. Pour ce qui est de l'emploi des femmes, elles sont près de 1,5 millions à occuper un emploi, principalement dans les secteurs du commerce et des services, mais ne représentent quand même que 15,1 % de la population active. Quant aux femmes ayant un emploi permanent, elles se concentrent essentiellement dans la Fonction publique et sont au nombre de 520852, soit 29,4 % de l'effectif total de ce secteur. Pour la mission d'éducation dans le secteur, les femmes représentent plus de 50 % de l'effectif alors que pour l'administration des établissements scolaires elles ne sont que moins de 7 % pour le primaire, 25 % pour le moyen et, enfin, 28 % pour le secondaire. L'encadrement de la fonction justice est féminisé à près de 40 % alors que la participation de la femme à la fonction médicale et paramédicale enregistre une nette évolution : plus de 50 % des maîtres-assistants, plus de 48 % des personnels paramédicaux et gestionnaires d'établissements hospitaliers et elles sont respectivement de 37,83 %, 28,3 % et 25,86 % pour les docents, praticiens médicaux et professeurs. Les différents corps constitués de l'Etat ont aussi intégré l'élément féminin, notamment l'ANP (une femme nommée au grade de général), la Sûreté nationale avec 12 000 éléments (116 commissaires et 580 officiers de police), soit 8 %, la Protection civile avec 1154 agents dont 3 commandants. La Gendarmerie nationale, les Douanes et les Transmissions nationales comptent aussi un effectif assez important. La participation de la femme à la vie politique est assez importante avec 146 femmes députées à l'APN et 10 sénatrices au sein du Conseil de la nation. Concernant les différents dispositifs d'aide et de soutien à l'emploi, la femme s'est taillée une part importante, surtout pour le micro-crédit par le biais de l'ANGEM qui a attiré un nombre très important de femmes au foyer. Ainsi, entre 2005 et 2010, elles ont été 117 441 femmes qui ont bénéficié d'un micro-crédit et ont représenté 60 % du total des crédits alloués (40 % pour les hommes), ce qui leur a permis de créer 8774 micro-entreprises. Elles ont aussi été 42 % à avoir bénéficié du filet social (IAIG) et le taux de participation des femmes dans les autres dispositifs se rapproche des 50 %. En outre, la femme investit de plus en plus le secteur d'entrepreneuriat et le CNRC compte près de 115000 femmes inscrites, ce qui représente environ 9 % du total. En conclusion, la CNCPPDH estime que «la question du genre a été renforcée dans un passé récent par un certain nombre d'actions stratégiques de première importance». Parmi ces actions, elle relève la définition de la stratégie nationale de la promotion et de l'intégration des femmes, la mise en œuvre du programme de promotion, de l'équité et de l'égalité entre les genres, la mise en œuvre d'un mécanisme de protection contre la violence à l'égard des femmes, le programme pour l'égalité des sexes et «l'autonomisation» des femmes. Passant ensuite aux questions relatives à la discrimination à l'égard des femmes, le rapport note des améliorations certaines mais signale «la présence de dispositions législatives et la persistance de pratiques discriminatoires lors de la mise en œuvre de certaines dispositions qui perpétuent et consolident les inégalités et la discrimination à l'égard des femmes algériennes». Concernant le code de la nationalité, la Commission nationale relève une certaine discrimination qui se dégage de l'article 18 qui dispose que : «perd la nationalité algérienne la femme qui, épousant un étranger, acquiert effectivement du fait de son mariage la nationalité de son mari et a été autorisée par décret à renoncer à sa nationalité algérienne». La polygamie quasi-inexistante Quant au code de la famille, le rapport rappelle tous les amendements qui y ont été introduits et estime que des efforts louables ont été consentis par l'Etat pour l'adaptation de son cadre législatif et réglementaire avec le cadre de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, bien que cette convention n'ait fait, à ce jour, l'objet d'aucune application directe de la part des tribunaux algériens. Pour ce qui est de la polygamie, le rapport estime qu'elle est quasi-inexistante puisqu'elle ne concerne que moins de 1% des hommes mariés, selon les statistiques recueillies par la Commission nationale. L'alinéa rajouté à l'article 87 du code de la famille est, d'après le rapport, «pour le moins ambigu». En effet, l'alinéa en question consacre que : «la mère peut suppléer le père lors de l'accomplissement des actes à caractère urgent concernant ses enfants, en cas d'absence ou d'empêchement du père» alors que la mère, ne pouvant souvent apporter aucune preuve de l'absence ou de l'empêchement du père, elle se heurte au refus des administrations de lui accorder un quelconque droit sur ses enfants. La CNCPPDH propose de «définir des modalités pratiques sans équivoque pour permettre une application conforme au plan du fond des dispositions de cet alinéa». Le rapport note aussi que, malgré la présence de plusieurs dispositifs pour lutter contre la violence envers les femmes et le lancement, en 2006, de la stratégie nationale de la lutte contre la violence faite aux femmes, aucun changement n'est signalé en l'absence d'une loi pénalisant la violence, notamment au sein de la sphère conjugale. Ainsi, le constat établi par la Commission nationale fait ressortir quatre formes de violences envers les femmes en Algérie : violence domestique, harcèlement sexuel, statut des mères célibataires et femmes vivant seules. Dans ce cadre, la CNCPPDH déplore «la multiplication des violences à l'égard des femmes puisque, pour la seule année 2012, la DGSN a dénombré 8500 femmes victimes de violences diverses dont 6070 au niveau des villes, alors que 300 femmes ont été victimes de viols». Il faudrait aussi ajouter à ce nombre celui des femmes ayant fait l'objet de violences mais qui n'ont pas déposé de plaintes ou les ont retirées pour divers motifs. Pour ce qui est de la violence conjugale, le rapport se montre assez pessimiste puisqu'il relève qu'aucune disposition de prise en charge psychologique de la femme victime de violences conjugales ni de prise en charge d'urgence, même si la vie de la femme ou celle des enfants est menacée. Il en est de même au plan juridique puisque les violences conjugales sont considérées du domaine privé et, à ce propos, «aucune loi ne fait mention de l'expression ?violence conjugale'», note aussi le rapport. Avec, toutefois, la prise en charge des coups et blessures volontaires par l'article 264 du code pénal et l'article 267 qui prend en charge les violences contre ascendants. |
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